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Tokyo Biyori

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les avis de Cinemasie

2 critiques: 2.88/5

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6 critiques: 3.08/5



Alain 2.75
Ordell Robbie 3 un film assez intéréssant meme s'il aurait pu etre plus fort
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un film assez intéréssant meme s'il aurait pu etre plus fort

Tokyo Biyori, une adaptation par Takenaka Naoto d’un livre du cèlèbre photographe à scandale Araki Nobuyoshi sur sa femme morte d’un cancer en 1990, fut un succès surprise au box office japonais. Si le film aurait pu etre bien plus réussi et meme devenir un classique grand public –comme peuvent l’etre les films de Iwai Shunji par exemple- avec un peu plus de rigueur au niveau montage et réalisation, reste que le film est dans l’ensemble réussi.

Car des acteurs transcendés et un scénario écrit peuvent parfois faire tenir debout à eux seuls un film et c’est le cas ici. Le scénario sur la plongée d’une femme mariée dans la folie pourrait par exemple faire penser à Une Femme sous Influence ou si l’on en reste au cinéma japonais au magnifique Okaeri. Mais là où Cassavettes et Shinozaki enregistrent la reconstitution d’un couple au travers de la folie, Takenaka filme une femme qui sombre sous l’œil indifférent de celui qu’elle aime : elle devient furieuse lorsque ses amis ne la reprennent pas lorsqu’elle se trompe sur nom d’éditeur, un gamin l’appelle grand-mère, elle veut absolument habiller en femme ce dernier, elle quitte l’appartement pour disparaître de chez elle et finalement toujours revenir, fait mine de s’intérésser à un autre homme pour finalement s’en détourner. Le personnage très complexe de Yoko est interprété avec talent pr une Nakayama Miho passant avec aisance du comique à des attitudes de joie extraverti et des colères pathétiques. Takenaka Naoto est exemplaire de retenue et réussit à donner une impression d’indifférence sans froideur –il est plus incapable de la comprendre que hautain- et soutient un casting assez exceptionnel. Le fait que son personnage photographie les gens sans leur demander contribue à créer une certaine tension lors de quelques scènes où l’on partage sa crainte des réactions des autres. Et les photos jouent également un role d’enregistreur glaçé de la chute d’une femme. Asano Tadanobu fait une apparition en jeune homme attentionné qui essaie d’offrir de la joie à Yoko tandis que Tsukamoto Shinya fait un beau caméo en acteur shakespearien qui s’en prend à Shimazu parce qu’il a été photographié à son insu dans le métro. Le réalisateur Suo Masayuki (Shall we Dance) joue également dans le film. Une des autres qualités du film est celle de beaucoup de films d’acteurs à savoir une vraie aptitude à construire le plan autour des comédiens et une vraie passion à cadrer ces derniers. Il est aussi porté par une belle photographie légèrement orangée.

Mais s’il y a une vraie personnalité dans la direction d’acteurs, on ne peut en dire autant de la mise en scène. Il ne s’agit meme pas d’une bonne mise en scène classique –ce qui aurait pu etre intéréssant vu le choix de Takenaka de faire un film discret, effacé à partir des écrits d’un photographe surtout connu pour ses exçès de provocation- mais d’une mise en scène qui ne choisit jamais son camp. On passe ainsi d’un plan à l’autre à une stylisation voyante –l’usage du ralenti, les nombreuses mise au point à la focale- à une mise en scène distante faisant durer certains plans puis à des tentatives de refléter par les mouvements de caméra une certaine légèreté –les caméras portées tremblantes. Certes, c’est bien cadré et cela ne coule pas le film mais ce manque d’unité est un peu préjudiciable à l’impact émotionnel du film. Un autre défaut est que Tokyo Biyori est également indécis au niveau rythmique : on a ni les variations crées par l’approche virtuose d’un Iwai Shunji ni la capacité à faire ressentir la durée des cinéastes qui choisissent l’option contemplative sous l’effet des contraintes de l’économie de moyens ; il s’agit bien plus d’un entre deux bancal et informe que de l’option médiane qui offre sa grace somnambule au cinéma d’un Kurosawa Kiyoshi. Il n’y a pas de longueurs –le scénario est irréprochable de ce point de vue- juste quelques scènes ne trouvant pas la durée des émotions vécues par les personnages. C’est lorsque le film offre des variations rythmiques inattendues avec quelques scènes au ralenti, notamment un final nostalgique où la musique prend une ampleur classique après avoir été plus légère durant tout le film, qu’il réussit à toucher le plus le spectateur. Ce n’est pas non plus du découpage catastrophique à la Miike mais là encore ça pourrait etre bien mieux. Cela se veut peut-etre un flou rythmique à la hauteur de l'incompréhension du narrateur mais cela ne parvient à créer qu'une certaine monotonie pas à la hauteur de situations poignantes qui auraient gagné énormément à etre soutenues par des choix artistiques affirmés dans un sens classique ou dans le sens opposé.

Malgré tout, Tokyo Biyori reste très agréable à regarder parce que la dimension humaine absente de la réalisation du montage y est apportée par les acteurs. Le couple idéal selon Takenaka est du type artiste/modèle et la sexualité en est absente. Heureusement que les acteurs et quelques situations imprévues lui apportent par moments la chair manquante. Cette chair dont l’abondance transforme un bon film -Tokyo Biyori mérite le coup d’œil- en grand film.



17 décembre 2002
par Ordell Robbie


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