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A Scene at the Sea

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les avis de Cinemasie

10 critiques: 4.3/5

vos avis

53 critiques: 3.76/5



Xavier Chanoine 4.5 Violent cop pose ses guns et prend la mer
Marc G. 4.5 Pas besoin de discours
Ordell Robbie 4.25 Regarde la mer
François 4 L'homme qui voulait être surfeur par un Takeshi Kitano toujours aussi silencieu...
Ghost Dog 4.25 Un film de surf pas comme les autres...
Junta 4.25 Un Kitano avec un héros sourd-muet, une oeuvre rafraîchissante.
Kame 4.5
Ryoga 4.25
Alain 4.75
Tenebres83 3.25
MLF 5
classer par notes | date | rédacteur    longueurs: toutes longueurs moyen et long seulement long seulement


Violent cop pose ses guns et prend la mer

Kitano n'est pas le Tarantino Japonais comme on essaie vulgairement de nous faire croire, ou comme on essaie lâchement de le caractériser sous prétexte que son Violent Cop est ultra violent (voir amoral) et que son Jugatsu reste si provocateur dans sa forme. Non, Kitano c'est un type aux idées claires, sans doute maladroit de par son expérience guère mature dans le domaine du cinéma, comme le prouve cette merveille -non sans défaut- qu'est Scene at the sea.

Encore un film inclassable dans la petite filmo du Maître, (2 yakuza eiga, un mélodrame) prouvant que finalement Kitano sait faire autre chose que de se cantonner dans la peau d'un clown. Cette fois-ci il n'apparaît pas dans son métrage et préfère laisser la place à deux acteurs sourds et muets à l'occasion. A vrai dire cela ne fait pas non plus une grosse différence dans la mesure où ses films ne s'axent pas vraiment sur les discussions (Kitano, quand il ne baise pas, il flingue). C'est pourquoi Scene at the sea paraît si familier dans un aspect purement fondamental, avec une intrigue pratiquement inexistante certes, mais dont un véritable climat recouvre cette oeuvre fragile. Les sourds et muets font leur vie et on ne les emmerdent pas. Point barre. On les suit, mais cet aspect "voyeur" s'arrête là. Même la caméra ne s'approche pas trop près d'eux, sous peine de les brusquer. Les deux "amoureux" côtoient la plage, s'invitent à une bande de surfeurs tendance, puis Shigeru s'en va vers la mer histoire de tâter de sa nouvelle planche de surf, trouvée tristement le long d'un trottoir.

Le fil ne change pas de direction, c'est bien un "real" programme que nous concocte Kitano. Presque un docu-fiction où une bande de journaliste filmerait incognito la vie de deux sourds et muets dans la société nippone. On y voit des gens rejetés à vrai dire, Kitano avouant que les handicapés y sont souvent discriminés. Les détracteurs n'hésiteront pas, dans un tout autre cas de figure, à caractériser Scene at the sea d'oeuvre mollassonne, et ils n'auront pas tord. Mais que diantre, on s'en contre fiche! L'essentiel est d'apprécier, de savourer ce pur produit Kitanesque ou Takeshiesque (un brin moins classe) en long et en large. D'apprécier cette bande-son si magique remplaçant les paroles, (Hisaishi étant le meilleur compositeur nippon de sa génération, quoi de plus normal) ou le bruit des vagues. Et puis, c'est toujours l'occasion de faire la rencontre de personnages hallucinants (les deux surfeurs maladroits) ou alors hauts en couleur. Kitano a également la bonne idée de terminer sur une note positive et touchante, tirant les larmes des spectateurs les plus sensibles. Une merveille de sensibilité.



11 juillet 2006
par Xavier Chanoine




Regarde la mer

La grande force et la grande faiblesse du cinéma de Kitano, c'est d'etre organisé autour du jeu de Kitano acteur, du fait qu'il est un personnage dont le visage n'exprime rien (ce qui rend ses colères d'autant plus imprévisibles). Et paradoxalement cette quasi-inexpressivité en fait le centre d'attraction d'un groupe composé de seconds couteaux au jeu immobile mais très expressif (le Kitano team habituel). Si ce système crée une tension formidable, il y a risque de se reposer dessus. Dès lors, les films où Kitano ne jouait pas furent d'une grande importance dans la progression artistique de son cinéma. Dans cette situation, Takeshi est obligé de rechercher d'autres moteurs à son cinéma, moteurs qu'il intègrera dans les films où il joue.

Ce n'est donc pas un hasard que A Scene at the Sea ait été tourné juste avant le premier everest kitanien Sonatine (un peu comme plus tard Kids Return avant Hana Bi). Car si Violent Cop et Jugatsu contenaient déjà une certaine dimension poétique et contemplative, c'est ici qu'elle va acquérir pour la première fois sa véritable ampleur, notamment du fait qu'il s'agisse de sa première collaboration avec Hisaishi Joe. Son score est d'une richesse extraordinaire: arpèges doux, gouttes de synthétiseur en suspension, envolées lyriques, cordes classiques. Hisaishi montre ici toute l'étendue de son registre musical et on peut dire que l'effet produit est non négligeable dans la réussite du film. Au niveau montage et mise en scène, Kitano opère rien de moins que la synthèse de tout un pan du cinéma japonais: la capacité à captiver le spectateur à partir d'une situation très simple et travail sonore sur des bruits sourds -vagues, vent- avec une grande minutie (Shindo Kaneto), la distance rendant paradoxalement l'émotion plus forte (Mizoguchi) et enfin les plans construits avec la minutie d'une toile de maitre (Kurosawa).

Dès lors, on tient le film idéal à montrer à quelqu'un qui aimerait en savoir plus sur la spécificité du cinéma japonais. Kitano se place face à la mer, la contemple, laisse ses personnages la contempler et cet apaisement compensera désormais la violence sèche de son cinéma. Sans dialogue -et c'est ce qui rend ce film universel-, il prend le temps de diluer les plans mais sans jamais que cette durée soit pesante. A l'image du ton général d'un film qui nous met en contact avec le non-dit, les acteurs montrent beaucoup de retenue dans leur jeu. Mais outre cela Kitano réussit à faire un commentaire sur le Japon contemporain sans faire dans l'exçès de démonstration: les plans des jeunes qui jouent au football et regardent d'abord avec moquerie le jeune couple, ceux des patrons et des employés incrédules évoquent avec un grand sens de l'économie de moyens l'incapacité de la jeunesse et des salarymen à comprendre que l'on utilise son acharnement au travail pour poursuivre un but non lucratif de dépassement de soi.

A Scene at the Sea tient à trois fois rien. Mais c'est parfois avec trois fois rien et un talent immense que l'on peut faire un très grand film. Des années après, Suwa Nobuhiro saura se souvenir de la belle leçon kitanienne en construisant son M/Other sur des cadrages simples et élaborés à la fois le quotidien ordinaire d'une famille recomposée. Preuve qu'il y aura toujours des cinéastes japonais capables de faire du grand à partir de très peu.



23 juillet 2002
par Ordell Robbie




L'homme qui voulait être surfeur par un Takeshi Kitano toujours aussi silencieux. La musique de Joe Hisaishi suffit à enchanter nos oreilles

Dans son monde de silence, Shigeru se prend de passion pour la mer, un autre monde de silence, et pour ses vagues. Pour l'approcher et la sentir, il rafistole une planche de surf et commence son long apprentissage. Le film est à l'image de ce personnage. Simple et directe, silencieux et langoureux. La musique de Joe Hisaishi est magnifique et sa bonne tenue était primordiale dans un film aussi peu bavard.

Kitano laisse couler les plans comme les vagues, plus longtemps que ne le nécessiterait l'action. Sa caméra continue de filmer après le départ des protagonistes, pour enregistrer encore quelques sons, et peut-être aussi nous laisser voir le décor que les personnages nous avaient caché.

L'interprétation est assez réussi, notamment pour Sigeru, dont la démarche n'a d'égal que l'intériorisation des sentiments. Construire un film sur un personnage muet, très peu démonstratif, quelle leçon tout de même ! En fait, le personnage est très simple, entier, à l'image du film. Les autres personnages sont comme des spectateurs autour de lui, tellement son histoire les interpelle. Tout le film est conçu sur une répétition des mêmes è, d'une scène centrale même, celle du titre. Loin de lasser, cette répétition se nourrit de petits détails nouveaux pour garder l'attention du spectateur. Et Kitano se garde son petit moment de surréalisme pour le fin, ce qui a le don de désorienter le spectateur, mais qui ne déçoit pas spécialement. De plus, libre à chacun de l'interpréter comme il le souhaite.



22 octobre 2000
par François




Un film de surf pas comme les autres...

Dès les premiers plans du film, on reconnait le style propre à Kitano: caméra fixe sur un personnage -sourd muet- qui regarde fixement, puis sur le personnage, la mer; élément récurrent à chacun de ses films, elle semble d'ailleurs avoir donner son rythme aux images, empreintes de lenteur et de la tranquillité des vagues qui s'échouent sur la plage. Et le spectateur se doit d'entrer en phase avec ce rythme particulier s'il veut profiter pleinement de cette heure 40.

Ca tombe bien que le héros et sa petite amie soient muets: Kitano n'aime pas parler et déteste être trop expensif, préférant suggérer au spectateur plutôt qu'imposer. Certains pourraient craindre le pire en imaginant déjà l'ennui profond que leur inspirerait ce film au dépouillement total. Erreur: on peut prendre en effet beaucoup de plaisir, car la simplicité apparente du scénario, rendu encore plus léger par les quelques gags le parsemant et par la magnifique musique de Joe Hisaishi, fait apparaitre des sentiments profonds comme l'amour, l'amitié ou la gloire sous un nouveau jour. C'est de plus une alternative à la vie vouée au travail de trop de Japonais: la vie vaut-elle mieux d'être vécue au service d'un patron ou de la société, ou bien n'est-elle pas plus belle quand on en profite vraiment, quand on fait ce qu'on aime (ici le surf) avec ceux qu'on aime?

Tout n'est pas parfait, il faut bien l'admettre (quelques scènes trop longues ou la fin en queue de poisson -ah ah ah- même si elle rappelle curieusement celle du Grand Bleu), mais Kitano affirme son style qui sera si brillant dans ses films suivants.



22 octobre 2000
par Ghost Dog


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