Génial plasticien, maitre des intrigues alambiquées, ce cinéaste hongkongais méconnu aura été l'un des plus novateurs et les plus influents de la Shaw Brothers. Ses obsessions sapphiques seront reprises par Ching Siu Tung et les spécialistes du cinéma hongkongais (Assayas, Gans, Tesson) ont fait beaucoup pour sa réputation culte.
Né en 1934 dans la province de Canton, Chu Yuan étudie la chimie avant d'etre attiré par l'univers professionnel de son père, la cinéma. Il choisit d'abandonner ses études pour se lancer dans le métier de scénariste. Très vite, il devient réalisateur et signe son premier film, Grass by the Lake, en 1958. A coup de mélodrames, de teenage movies, de polars et de films d'aventures, il devient un cinéaste à succès qui dépoussière les genres cinématographiques hongkongais. The Black Rose (1964) sera d'ailleurs revisité plus tard par Jeff Lau et Wong Kar Wai. Au début des années 60, Chu Yuan fonde sa propre compagnie, Rose Films. En 1969, le wu xia pian the Cold Blade marque sa rencontre avec Chen Kuan Tai qui chorégraphie une partie du film. Suite à la chute de Rose Films, il s'oriente vers la Cathay, grande major cantonnaise de l'époque. A sa chute, il devient cinéaste pour la Shaw. En 1972, la comédie House of 72 Tenants se permet meme de battre Bruce Lee au Box Office. Mais c'est en adaptant Gu Long et Jin Yong pour une série immaculée de wu xia pian que Chu Yuan va imposer sa patte de cinéaste à l'heure où Chang Cheh abandonne le genre pour se tourner vers les films d'arts martiaux. Killer Clans (1975), The Magic Blade (1976), Clans of Intrigue (1977) se caractérisent par des éléments fantastiques, des intrigues alambiquées dignes d'un thriller, une somptuosité des décors et de la photographie et enfin le charisme d'un Ti Lung en grande forme dans le cas des deux derniers films. Sans parler d'idées visuelles fortes telles que le champ de bataille devenant un échiquier où les guerriers ne sont que des pions et la lame dégainée telle un revolver dans the Magic Blade. Progressivement, la Shaw décline et Chu Yuan devient présentateur de télévision. Il réalise dans les années 80 beaucoup de comédies sentimentales ce qui pousse Tsui Hark à faire appel à lui pour réaliser le délirant Diary of a Big Man (1988). En 1990, il réalise son dernier film à ce jour, the Legend of Lee Heung Kwan. En tant qu'acteur, on l'a vu chez Jackie Chan (les deux premiers Police Story, Miracles) ou Peter Chan (He Ain't Heavy, He's my Father (1993)), chez le maitre du nanar Nam Lai Choi (the Seventh Curse (1986)) ou aux cotés de Jackie Chan chez Tsui Hark (Twin Dragons (1992)) ou Gordon Chan (Thunderbolt (1995)). En 2001, on l'a vu en propriétaire de restaurant dans Dummy Mommy, without a Baby.
source: HKmag
Les wu xia pian de Chu Yuan se caractérisent par une utilisation virtuose de l'ampleur qu'offre le format scope: des plans larges montrent les personnages commes des points perdus dans l'immensité, reflets d'un univers fait de manipulation permanente. Mais Chu Yuan est surtout le maître des idées visuelles soufflantes dont l'audace et la complexité font écho à celles de scénarios: le fameux échiquier déjà mentionné dans Magic Blade, la dizaine d'épées utilisées par un combattant dans le combat final de Death Duel entre autres.
Là où le cinéma de Chang Cheh est centré sur la notion de chevalerie, les wu xia pian de Chu Yuan s'intérèssnt surtout aux tueurs professionnels. Du coup, il emprunte des ressorts classiques du film noir tels que l'idée que les dés sont pipés d'avance. Les tueurs de Chu Yuan semblent prisonniers de leur condition et détournent à leur profit des codes du métier de tueur professionnel qu'ils maîtrisent à la perfection. Chu Yuan affectionne en outre les retournements brusques qui peuvent donner une nouvelle lecture du film alors que l'on est à deux doigts de la fin et les intrigues à tiroirs. Un autre grand thème de son cinéma est le sapphisme qu'il évoque directement dans Intimate Confession of a Chinese Courtesan (1972).
Ordell Robbie
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