Un Edward Yang en état de grâce. Où est la Palme d'or?
Bande annonce
Avis Express
Yi Yi sonne comme le chef d'oeuvre du cinéma taïwanais des années 2000, le film-somme d'un cinéaste parti trop tôt, qui avait encore tant à apporter à l'édifice qu'il avait lui-même bâti au cours des années 80, une époque annonçant la nouvelle vague d'auteurs taïwanais particulièrement concernés par leur pays. Dans Yi Yi on y trouve aussi bien le Taïwan moderne et ses businessmen cherchant le moindre profit que celui qui vit grandir toute une génération d'enfants et d'adolescents devenus ce qu'ils sont maintenant. Entre les contraintes professionnelles et familiales, tout ce beau monde continue de vivre, d'évoquer la vie, la mort, la famille mais aussi le souvenir, mêlant ainsi passé, présent et futur au sein d'une narration juste parfaite et emplie de grâce. La question de la dualité (en référence au titre du film) confronte ainsi deux générations mais aussi l'idée du double, le double de NJ et Sherry avec son fils et celle qui irradie sa vie. Edward Yang juxtapose donc deux histoires (une infinie? 1+1=2, 2+2=4, nous, vous) presque identiques vécues à deux époques bien différentes, première magie, montre sous un aspect tout simplement déchirant les aléas de la vie (la grand mère sur son lit de mort, un espoir et un modèle pour sa petite fille), deuxième magie, narre avec une noirceur toute poétique l'amour de plusieurs petits groupes de personnes, des jeunes mariés qui vivent un calvaire à une famille décomposée pour déplacement professionnel et raisons médicales, en passant par la tendre étape de l'enfance où les garçons font peur aux filles (voir l'inverse) et où l'on manque son coup en jetant une bombe à eau sur la tête de son professeur tyrannique, troisième magie. Une magie omniprésente au sein du procédé narratif. Plus spirituelle encore est la quête du petit Yang Yang, consistant à capturer la nuque des gens à l'aide de son appareil photo afin de leur montrer ce qu'ils ne peuvent pas voir, leur autre facette. Ainsi on serait également tenté de dire que Yi Yi grappille également quelques places au sommet de la grâce cinématographique rien qu'avec cette petite idée. Enfin, que dire de plus lorsque la mise en scène réglée au millimètre, inouïe de cohérence avec son sujet, délivre des instants de grâce absolue, de la première photo de mariage -sous un réarrangement musical sidérant de pureté, à l'enterrement final? Assurément l'un des plus beaux films du monde.
La poésie comme apogée
Le cinéma peut, selon son emploi, extraire du monde une tranche de vie sans faire que celle-ci devienne un monde à part entière. Loin des puérilités faciles d’un monde factice qui n’existerait que dans le cadre du film d’un générique à l’autre (début, fin) YiYi a d’emblée cette puissance qui déborde le carde. Le cadre justement n’est qu’une focalisation, une fenêtre ouverte qui ne permet pas de voir le monde mais simplement une portion. C’est le premier trait de grandeur de ce film qui s’inscrit de fait dans une pensée libre. Cela peut paraître sans sens ; il faut expliciter un peu le propos.
Dans tout un pan du cinéma, les films sont dès le début sous tension avec leur fin. Tout le dispositif n’est qu’un couloir étroit bordé de vide, un couloir en ligne droite dans lequel le spectateur avance comme un cheval ayant des œillères à marche forcée vers une fin unique, fermée, définitive. C’est d’un événement exceptionnel que naît le film, un point de départ sans antécédents et qui s’achemine de manière mécanique vers son point final, sans avenir. Ce type de produits, somme toute reposant car foncièrement fascisant (la pensée unique), n’a besoin d’aucun spectateur pour s’acheminer vers son dénouement. Comme le pilotage automatique permet de faire circuler des métros sans conducteur ces films peuvent avancer sans publique pensant, sans individus. Preuve en est d’ailleurs le principe de la bande annonce qui donne dans cette mécanique industrielle une idée aux spectateurs absolument exacte de ce qu’ils vont voir : Une catastrophe à grands renforts d’effets spéciaux, un héros qui doit sauver le monde, une belle indépendante. Nul besoin d’autres précisions pour savoir que le héros va invraisemblablement sauver le monde tout en séduisant la belle indépendante devant nos yeux ébahis et brillants de l’éclats des explosions et autres excès visuels et sonores tapes à l’œil et lobotomisant (je vous laisse devinez de quel(s) film(s) il s’agit)nb.
YiYi, Un et deux tout comme Ying et Yang. Le fil conducteur est certes cette grand mère qui tend vers la mort mais c’est très visiblement une histoire de Taiwan et de Formose. Tout comme Un et deux, tout comme Ying et Yang le film parle de l’individu, de l’individu et du collectif : Un par rapport à deux, deux par rapport à un et aussi un en complément de deux, deux en complément de un. Ils sont très clairement différents, tant de choses les dissocies et pourtant ils ont tant en commun. Il faut faire attention, c’est une articulation conceptuelle, il ne faut pas la concevoir de façon stricte, il ne faut pas la voir comme une dualité. C’est une chaîne infinie de reconnaissances non exactes. Ainsi, l’histoire du père qui s’éveille en souvenir dans le présent unique de chacun de ses enfants. On ne sait pas bien si quelque chose se reproduit, se répète ou se poursuit.
YiYi est un des plus beaux films que le cinéma ait vu naître, un joyau sans faux semblant dont l’éclat n’est pas dans l’apparence. YiYi nous offre une portion de vie, entre un mariage et un enterrement que rien ne lie. L’histoire reconstruit son passé tout en appréhendant son avenir, son présent est une condensation du passé et de l’avenir : c’est la magie de l’instant qui se concentre ici, une poésie de la vie. YiYi est une illustration parfaite de l’acte poétique fondement de toute chose dont parle Gaston Bachelard (L’Intuition de l’instant). YiYi est un acte poétique qui ouvre tout les champs du cœur et de l’esprit, nos sens et nos âmes n’en sont que les outils et retrouvent ainsi leur fonction première dans cette résonance poétique.
Nb : Cela veut il dire qu’il ne devrait pas y avoir de film comme ça. Bien entendu, la question n’est pas là. Il est inimaginable pour un esprit ayant un peu de sérieux de condamner l’existence de tout un pan du cinéma tout en continuant à prétendre aimer le cinéma. Non vraiment, la question n’est pas là.
Fresque familiale
On sent chez Edward YANG l'amour de ses personnages. Comme A Brighter Summer Day, Yi Yi ne déroge pas à ce principe d'intimité qui semble lier le réalisteur à ses personnages et qui rejaillit sur les relations entre les personnages du film. Entrer dans ce film, c'est se retrouver baigné dans une atmosphère bien particulière, on y ressent ce mélange d'ouverture et d'exiguité si caractèristique du cinéma taïwanais mais traité chez Edward Yang avec une délicatesse toute particulière. Et ce traitement est à la fois la force du film et sa faiblesse pour ceux qui auront du mal à accrocher au propos du film.
Cette fresque familiale est à la fois ample et contenue. Si le fil directeur est représenté par le père de famille, chaque personnage a droit à son propre développement avec autant de soin. Il est difficile de ne pas faire le rapprochement entre la réalisation du film et l'écriture musicale, les différentes partitions se retrouvant pour créer par leur union la musique propre à chaque scène. Chacun pourra trouver parmi tous ces personnages, certains qui le marqueront plus que d'autres (celui du concepteur japonais est à mes yeux proche de la perfection) mais pour autant il est difficile de ne pas apprécier l'ensemble cohérent et foncièrement organique que constitue ce film.
Coté technique, la photographie est particulièrement belle et vient renforcer l'aspect de naturel plutôt que de se donner à voir pour elle-même. La fluidité de la réalisation est pour beaucoup dans la dynamique à la fois lente et un peu solanelle du film. Les acteurs sont à créditer dans leur ensemble d'une performance sans fausse note et le plus souvent d'un grand naturel.
Pour peu que vous vous laissiez emporter par le courant de la vie qui porte ce film d'un bout à l'autre, ce film sera l'occasion d'un voyage qui fera parti de ceux dont on se souvient longtemps.
09 janvier 2006
par
jeffy
Un portrait de famille intéressant, mais malheureusement beaucoup trop long et trop hermétique
Yi Yi a reçu le Prix de la Mise en Scène à Cannes en 2000, ce qui est une jolie récompense. Ce film clairement autobiographique est dans l'air du temps, au même titre par exemple que Le Goût des Autres d'Agnès Jaoui : décrire des personnages qui frôlent la quarantaine et qui se rendent compte que leur vie, telle qu'elle est, ne leur plaît pas, sous une forme quasi-documentaire et assez minimaliste consistant à filmer des bouts de vie pas forcément reliés entre eux logiquement et temporellement, forme que je qualifierais dans le cas de Yi Yi d'assez hermétique.
Pourquoi ? Tout simplement parce que ce style du film qui s'empêche de raconter une histoire comme on en a l'habitude sous prétexte de vouloir rendre la vie plus « vraie » au cinéma peut, lorsqu'il est poussé jusqu'au bout de cette théorie, engendrer un manque d'émotion, un détachement du spectateur vis-à-vis du film, voire un ennui profond devant cette suite de è sans véritable rythme. Et lorsque l'on nous propose ça sur près de 3H, cet ennui peut devenir un calvaire.
Non pas que ce que Edward Yang n'ait rien a nous montrer, rien à nous raconter, au contraire ! Le film sonne juste, le propos est intéressant et nous concerne tous, les personnages sont attachants, à commencer par NJ, un ingénieur quadragénaire qui se remet en cause depuis qu'il a revu son amour de jeunesse : a-t-il choisi la bonne femme, le bon métier ? Ne serait-il pas plus heureux s'il avait vécu avec elle, s'il avait fait un autre métier ? Et s'il repartait à zéro avec cette femme, abandonnant au passage femme, gosses et job ? La femme de NJ est en proie aux mêmes doutes, se lamentant sur son sort parce que chaque résumé de sa journée à sa mère dans le coma ne dépasse pas 30 secondes. Idem pour leurs enfants, la jolie Ting-Ting étant confrontée aux premiers émois amoureux, et le génial petit Yang-Yang, drôle et très attachant, se posant des questions existentialistes auxquelles même les adultes ne savent répondre. Et, symbole fort de la description de la déstructuration d'une famille, chaque membre est filmé à part, et jamais la famille n'est réunie en un seul plan ! Assurément, Yang-Yang représente le réalisateur petit, et NJ le représente adulte : Edward Yang, diplômé d'une école d'ingénieurs, a décidé de plaquer son métier du jour au lendemain pour assouvir sa passion, l'écriture de scénario et la réalisation de films.
Comme on le voit, tout cela aurait pu donner un film vraiment plaisant, sensible, voire passionnant. Au lieu de cela, et à cause de cette forme délibérée de docu-fiction chiante qui provoque des claquements de sièges dans chaque salle où il passe, Yang signe un film forcément un peu décevant, et vraiment beaucoup trop long. Je suis pourtant convaincu qu'avec un peu de volonté pour renouer avec le récit traditionnel, Yang aurait pu faire passer le même message mais de façon plus agréable et plus abordable. Il a préféré faire autrement, au détriment du plaisir cinématographique que chaque spectateur est en droit d'attendre en allant voir un film.
un grand film
yiyi est une frèsque intimiste qui boulverse le spéctateur. toute la galerie de personnage qu'edward yang filme est à la fois émouvante et touchante (on a tous vécu au moins une situation similaire que l'on peut voir dans le film).La durée du film n'est pas un problème car on "vit" le film, on en sort boulversé, les personnages restent en vous a vie, ce film parle de choses à la fois très simples et très complexes. Pour résumé Yi-Yi est un grand film qu'on est pas pret d'oublier.
yi yi, yé yé!
Edward Yang nous livre avec yi yi un film de moeurs calme et posé, une mise en scène sans esbrouffe à base de plan fixes toujours bien sentis.
Les personnages sont attachant, que se soit le père: blasé, la fille: romantique ou le petit gamin: adorable.
Une narration simple et parfois géniale lorsque le père et son amour de jeunesse se remémorent leur histoire d'amour, Yang ne nous propose pas les flash-back habituels mais des moments simultanés de la vie des enfants (la fille et le petit gamin) qui vivent exactement ce que leur père a vécu à leur âge (dit comme ça à l'air plutôt obscur, mais c'est vraiment très bien fait).
Un film long mais jamais chiant qui nous fait découvrir la société Taïwanaise. Un film parsemé de moments agréables, toujours tendre et parfois drôles où Edward Yang nous expose (au travers d'un dialogue entre la fille et son petit ami) sa théorie sur l'utilité du cinéma. Un film touchant à l'image de la lettre d'adieu du gamin à sa grand-mère qui clos le film (et cette critique par la même occasion).
Le point de vue des dormeurs.
Les dormeurs ont-ils un point de vue conscient sur le monde qui les entoure ? Si l'on en croît les définitions et études scientifiques, non (sommeil = "suspension de la vigilance" , "suspension de la vie consciente" ). Ainsi, il n'y a pas de point de vue possible du dormeur. Lorsque dans une scène, un personnage dort, la scène est vue d'un point de vue omniscient ou du point de vue des éveillés, qui s'évertuent à ne pas réveiller le dormeur. Le spectateur est alors dans l'incapacité de mesurer si le dormeur ressent ce qu'il se passe autour de lui. La mise en scène répond en règle générale à sa place : le dormeur ne s'est rendu compte de rien. Ainsi, par exemple, dans le mémorable la Grande vadrouille de Gérard Oury, Louis De Funès s'introduit par mégarde dans la chambre d'un officier allemand en train de dormir (et ronfler), et se rendra compte de sa méprise sans que le dit officier ne l'apprenne.
Yi-Yi, le film d'Edward Yang, propose pourtant une belle solution alternative. Le personnage de la grand-mère se retrouve dans le coma après une attaque, et repose dans sa chambre dans l'appartement familial. Les médecins, cependant, demandent à la famille de ne pas tenir compte de ce sommeil prolongé, et de continuer à lui parler. Ainsi, chaque soir, les membres de la famille vont tour à tour faire la conversation à la grand-mère. Edward Yang a la formidable idée de ne pas filmer ces conversations unilatérales du point de vue des éveillés, mais du point de la dormeuse. Nous les voyons donc parler, comme si nous voyions à travers les yeux, et les paupières, de la grand-mère, ces plans étant en légère contre-plongée reflétant bien la position couchée de cette dernière et sa subjectivité. En offrant le point de vue des dormeurs, Edward Yang les intègre au monde des vivants et leur offre une conscience qui contredit les études scientifiques pour une bien belle plus idée de communion entre dormeurs et éveillés.
Le cinéaste prolonge cette idée dans la dernière scène du film : le jeune Yang-Yang, lisant son journal intime, continue à parler à sa grand-mère après que cette dernière est décédée, ayant ainsi trouvé le sommeil éternel. Edward Yang rejoint ici Abel Ferrara et son Nos Funérailles, dans lequel Christopher Walken s'adressait à son frère défunt dans son cercueil, mais souffrait de ne pas savoir si ce dernier pouvait l'entendre ou non. Yang-Yang, lui, ne se pose même pas la question.
Tout ça pour dire quoi? Que Yi-Yi, en plus d'être un beau film sur le sommeil, est un film Amor!
L'absolu regard sur la vie.
Sorti en 2000, Yi Yi fut le dernier long-métrage du réalisateur Edward Yang, mort en 2007. Une oeuvre magistralement belle pour laquelle le terme de « chant du cygne » prend tout son sens.
Le film nous narrera la vie de la famille Jiang de différents points de vue : Nj, le père, est un homme d'affaires. Quarantenaire, il va faire par hasard une rencontre avec une ancienne petite amie, qui va alors le pousser à remettre en question les choix de toute sa vie. Sa fille, Ting Ting, vit sa vie, entre rivalités d'amies et premiers amours. Enfin son jeune fils, Yang Yang, découvre le monde qui l'entoure, se posant des questions plus profondes que son esprit enfantin ne peut le formuler.
A travers ces trois personnages, le réalisateur nous montrera sa reflexion et son regard sur le monde. Un monde dépeint ici différemment selon les scenes et les trois personnages. Il sera pour Nj bien plus triste et mélancolique qu'il ne l'est pour son fils, qui pose pour sa part un regard émerveillé et curieux sur tout. Trois générations donc, qui poseront des questions fondamentales et répètent chacun à leur façon le cycle de la vie. Pendant que Ting Ting découvre l'amour, son jeune frère commence seulement à en chercher le sens, alors que son père regrette le sien. Lorsque le cadet de la famille cherche à montrer aux gens des choses qu'ils ne peuvent voir, les deux autres comprennent que ceux parmi lesquels ils évoluent ne sont pas toujours ce qu'ils semblent être. Autant de point de vues qui ne sont que les reflets des pensées du réalisateur, certains dialogues tenant presque de l'expérience vécue. Discutions anodines sur l'amour, sur la vérité, les paralleles inter générationnels ne se comptent pas tant ils sont nombreux et sonnent toujours justes, qu'il s'agisse de paroles ou de réalisation pure. Ainsi, alors que Nj et son amour de jeunesse évoque leur histoire passée, la caméra nous montrera en même temps les amours naissants des deux enfants de la famille. Un exemple parmi tant d'autres qui démontre la qualité de la mise en scene.
Cette dernière est par ailleurs remarquable. Faite souvent de plans fixes et calmes qu'il s'agisse de montrer un couloir vide ou une forêt, un personnage ou une déchéance, ces scenes nous prouvent chacune à leurs façons qu'un long silence est parfois mille fois plus éloquent que toute forme de dialogue. À l'inverse, un dialogue tel que celui entre Nj et son collaborateur japonais à propos de leur mélomanie et de leurs amours, se révèle d'une justesse absolue. A cela viendra s'ajouter le rapport des protagonistes face à la mort, par le biais d'une grand mère vivant ses derniers instants. Comment réagir? Faut-il lui parler, et si oui, que lui dire? Et d'ailleurs, qu'est-ce que la mort? Autant de questions qui rajouteront une corde de plus au film, permettant au réalisateur là encore de traiter une pensée sous divers angles, Ed Yang laissant même planer sur les dernières scenes une part de doute sur le sujet, par le biais d'une scene que chacun interprêtera comme il lui plait, avant de conclure sur une tirade des plus touchantes. Il s'agit là aussi d'un exemple pris au hasard, les lectures de chaque instant étant nombreuses, et les sujets étant encore une fois aussi divers que variés, de la société au mariage en passant par la jalousie, les querelles de couple ou le mur des générations.
C'est ainsi avec une grande simplicité et sans superflu qu'Edward Yang nous fera traverser son oeuvre, un film touchant, parfois comique ou dramatique, mais toujours d'une rare justesse et surtout d'une beauté exceptionnelle, ce genre de beauté figurée qui nous rappelle que le cinéma est un art, et qu'un réalisateur talentueux peut nous couper le souffle et nous emporter dans une histoire dont on ne peut se séparer. Il y aura avec ce simple film de quoi parler des heures, aussi me contenterais-je de conclure en disant que si certaines personnes l'ont décrit comme « l'un des plus beaux films que le cinéma nous ait offert », alors je les rejoins totalement sur cet avis.
Une des 8ème merveilles du monde cinématographique?
A LIRE APRES AVOIR VU LE FILM
En quelques plans et quelques notes, « Yiyi » a déjà embarqué son spectateur vers la richesse de son univers. Ce n’est que la première des prouesses que nous offre le Taîwanais Edward Yang pour le 7ème long métrage de son œuvre jusqu’ici peu diffusée.
« Yiyi » va débuter par un mariage et se terminer par un enterrement, boucle assez naturel pour un film sur la famille, et qu’on pourrait craindre d’un lourd symbolisme. Car, à priori, c’est dans le signifiant appuyé que risquerai de se développer le film : tandis qu’une grand mère est suspendue dans le coma, divers composantes d’une famille vont vivre des expériences attendues de leurs existences. Le père, NJ, nous balance sa crise de mi-existence et revisite son passé tandis qu’un montage habile nous invite à faire parallèles pour ce qui ce passez chez ses deux enfants. Mais le film n’est heureusement pas une mise en relation faisant de ses personnages des membres formels d’un long métrage éclaté. De la même manière qu’on est entré rapidement dans la matière du film, chaque personnage de l’œuvre fait son nid d’une part du film dés son commencement, existant non pour un message démonstratif à faire passer, mais pour eux mèmes.
Les enfants ne seront pas des reflets, ils existeront, fortement caractérisés : si Yang-Yang ressemble à son père, c’est aussi cinématographiquement un des plus impressionnants petit garçon qu’il nous ai été donné de voir depuis des lustres. Chahutés par les filles et prenants en photos ce que les gens ne peuvent pas voir, c’est un petit corps qui non seulement exprime le plus la démarche de cinéaste, mais aussi l’enfance tel qu’elle est, sans fioritures. Ting-Ting, l’adolescente, est aussi un personnage magnifique. Yang a eu une belle idée de suggérer sa responsabilité dans le coma de sa grand mère (des poubelles oubliées sur un balcon, tandis qu’elle observait sa copine batifoler) ; fragile et en suspend, sa survie sera un des enjeux du film.
Il faut dire que du côté des parents, c’est pas la joie. La scène ou Min Min éclate en sanglot est bouleversante : elle n’a plus rien à raconter à sa mère qui va mourir, sinon sa routine quotidienne. Le père, NJ, va lui affronter deux tempêtes, se retrouvant au point le plus critique de sa vie professionnelle, et retrouver son premier amour inabouti. La force du film est immense pour décrire la dépression nonchalante de ce personnage, son spleen quotidien né de son trauma sentimental.
Dans « Yi Yi », la grande réussite du cinéaste tient finalement à être parvenu à restituer un état de fait palpable mais peu aisé à figurer : celui de la banalité la plus pure nourrie d’un extraordinaires en amont et en aval. L’extraordinaire est notre quête du bonheur, bercée par les rêves et les expériences du passé, l’idée fixe de la seconde chance. Particulièrement révélatrice, une scène : Ting-Ting boit un coca avec l’ex boy-friend de son amie Lili : ce dernier lui raconte une phrase de son oncle, à savoir que le cinéma permet de goûter à des expériences que nous ne connaîtrons jamais, le meurtre. Prise dans son quotidien, Ting-Ting ne réagit pas autrement que par l’incrédulité devant l’exemple du meurtre. Pourtant, lorsque le gars qui lui aura raconté cette histoire aura tué quelqu’un sauvagement par résultante de disputes vues tous les jours, cet extraordinaire ce sera produit de façon spectaculaire.
C’est une chose que l’on ne prévoit guère, atteindre le bonheur, et ça ne s’opère pas souvent par ce que l’on croit. Interlocuteur représentatif, le japonais Ota va catalyser ce point de vue en le démontrant à NJ ce qu’est la place de la magie, dans sa société en crise ou dans la vie. La relation entre ces deux hommes est magnifiques. Quittant leurs deux langues respectives, ils parlent en anglais, et ce qui se fabrique de leur tête à tête est beau et unique.
Universel, « Yiyi » l’est donc. Et ce qu’il propose, ce n’est pas de s’identifier à un personnage, mais à tous les personnages. C’est un tour de force… On sourira de nostalgie devant les fantasmes de gosses de Yang-yang (un visage de fille devant un écran de ciné montrant un orage), on sera agacé de jouer les intermédiaires comme Ting ting, ayant comme elle parfois du mal à dormir. La quête de spiritualité un peu veine de Min Min s’adressera à nos recherches, nos fuites. Quand aux regrets, actes manqués et brutalité du premier amour de NJ, quelque soit son point de maturité dans la vie, ils parlent au plus profond des expériences d’êtres humains. Seul la Grand Mère reste mystérieuse et fantomatique. Yang-yang ne sait pas ou elle est allé, la mort est un lieu véritablement mystérieux. Mais la quête du petit garçon, comme celle d’Edward yang, est de découvrir ou est allé sa grand mère. Montrer aux gens leur zones d’ombres, « ce qu’ils ne peuvent pas voir », c’est déjà filmer des angles morts et s’approcher de la fin en filmant ce qui essaie d’exister. Cela a un autre nom : la vie. Si le cinéma peu arriver à capter et à sublimer des aspects de la vie, Yang lui est parvenu à un exploit absolument unique et rare : la vie, il a réussi à la filmer dans la beauté de sa généralité
limpidité et émotions brutes
Yi Yi représente un peu au départ le prototype du film "de festival":trés long,lent,avec des acteurs inconnus voire non professionnels,un scénario qui tient de la chronique du quotidien et ses aléas...bref de quoi avoir peur d'y entrer et s'ennuyer ferme en revant d'un bon polar typé.Une fois laissés de coté ces aprioris,force est de reconnaitre que le plaisir procuré par la vision de ce trés long métrage est extraordinaire et DE TOUS LES INSTANTS.
Edward Yang réussit donc l'exploit de donner une histoire ou la lenteur ne nuit pas à l'intéret,mieux :les pérégrinations des personnages nous deviennent de plus en plus proches au fil des minutes et l'on finit par ressentir leurs émotions à fleur de peau .
Le scénario est d'une limpidité absolue,son traitement par la mise en scène touche à l'épure pour nous toucher au plus profond.Ici pas la moindre touche d'exotisme extrème-oriental,on voit dériver des taiwanais de la classe aisée dans des décors passe-partout de grande ville ,mais justement cette absence de pitoresque renforce l'universalité des situations .Yang en évitant la surenchère fait preuve de subtilité :il sait bien que son film est QUAND MEME un authentique film asiatique par sa vision des choses et sera perçu comme tel,alors pourquoi rajouter du décorum...
Bien sur les retrouvailles trente années aprés des deux amoureux sont le point central du sujet et offrent les scènes les plus authentiques et émouvantes du film,mais toutes les autres histoires viennent se greffer autour pour former un puzzle cohérent,maitrisé,et passionnant à parcourir.Car Yang en ne cherchant jamais le sentimentalisme facile et le mélo -cliché nous touche encore plus prés par un procédé d' identification aux membres de cette famille.Nous devenons ces gens-là pour la durée du film ,et au final sommes un peu tristes de les laisser à leur sort...
La musique est à l'image des scènes qu'elle accompagne:elle arrive par petites touches,sans en avoir l'air,pour devenir élément essentiel de la narration.
Et merci à tous ces acteurs naturels,toute la distribution joue sur le meme registre,à commencer par ce gamin,Yi Yi,gosse "normal" et loin des tetes à claques formatées du cinéma US actuel,il rappelle un peu le "neveu"de Kikujiro par son absence de cabotinage.
Quand une oeuvre joue ainsi de la sobriété sans tomber un instant dans la sècheresse et l'austérité,le spectateur n'a plus qu'à se laisser entrainer dans une histoire simple mais bouleversante,éprouvant alors le sentiment de voir la vraie vie défiler sur l'écran,une sensation rare et magnifique.Merci à Edward Yang pour ce tour de force.
Long...
Un bon film, boosté par les apparitions du petit garcon, et au final un joli portrait de famille. Trop long à mon gout toutefois...
Yi Yi est un film très touchant dans la pure tradition taiwanaise. Le film est très long, mais je dirais qu'on ne voit pas le temps passer, enfin presque. Pour ma part, j'ai eu mon attention captivé par la prestance, l'intelligence et la bonté de l'adolescente. Les malheurs de ce personnage m'ont vraiment touché, bien plus que la nouvelle vie du père qui m'a paru secondaire. Evidemment, ceux qui n'aiment pas les films trop long, de surcroît dit d'auteur, vous aurez du mal à être enjoué par ce film. En tous les cas, j'ai apprécié.
* * * * * Mon film culte !! * * * * *
Edward Yang nous a réalisé une magnifique histoire de la vie à travers plusieurs génération... que je ne puis expliquer davantage, c'est un véritable chef d'oeuvre, je reste ébahi à chaque je le regarde.
Désolé, je n'ai vraiment pas aimé ce film.
On parle de film intimiste. Je ne suis pas d'accord. Dans un film intimiste, on RENTRE dans l'intimité. Ici, on l'éffleure. Le film est effectivement très long, la musique est loin d'être entrainante. La réalisation, je ne pense pas qu'elle valait le prix de la mise en scène à Cannes, elle est très classique, et ne vaut en aucun cas celle de in the mood for love.
Comble de malheur, j'ai vu le film en VF ce qui bien sûr n'a rien arrange. Mais en tout cas, je ne me suis vraiment pas senti proche des personnages. Une gallerie de paumés, d egens qui ont raté leur vie, ça peut être interessant, mais c'est du vu et revu, alors si on ajoute rien d'original (bon, on veut la "vraie" vie, mais alors là, ça en devient si vrai que les gens risquent de devenir aussi dépressifs que les personnages) A ce titre, je ne trouve pas que ce soit la vraie vie... j'avoue ne pas avoir regardé le film jusqu'à la fin (ce qui m'arrive rarement) mais je n'ai rien trouve qui ai eveille mon intérêt, pas le moindre petit détail (ah si, le japonais dans le bar, qui se met à chanter...) De plus, on nous montre la vie d'une façon si pessimiste, comme si tt le monde était au bord de la dépression (la vie n'est pas gaie, mais il ne faut pas éxagérer, trop c'est trop, ça n'est plus crédible) les traits sont trop forcés.
En voyant la bande annonce et en entendant l'histroie, j'ai pense que ce serait un très bon film, mais je n'ai pas du tout retrouve le climat auquel je m'attendais avec la bande annonce, qui semblait présenter une ambiance mélancolique (nostalgique meme) san spour autant être desesperee. Ici, aucune voie n'est offerte, la vie est laide et c'est tout. Je trouve ça regrettable, ç'aurait pu être à mon sens nettement plus interessant, mais je n'accroche pas, trop de distance par rapport aux personnages, trop de creux (un peu à l'image des relations entre eux dans le film) Les anges dechus nous presente egalement des paumes (bcp plus extravagnats il est vrai) mais d'une manière nettement plus originale et stylisée, avec un schéma narratif plus approprié et un rythme plus interessant. Et puis ZZZZzzzzzz alors!
L'insoutenable légereté de l'être
Tout a été déjà dit dans les autres crtiques - ou presque.
Personellement, j'ai également eu l'impression d'un film trop long, qui aurait gagné à être raccourci par moments; en même temps, on se laisse happer par ces petits "riens", qui constituent un beau compte-rendu d'une vie en général.
Mais la véritable prouesse du film tient indéniablement dans son scénario, mêlant étroitement la vie des personnages, passé et présent : "La vie n'est quéternel recommencement" et c'est ainsi, que les souvenirs du père trouvent redondance dans la vie actuelle de ses parents : son amour avoué à son "premier amour" et ce dès la primaire se re-trouve auprès de Yi-Yi se chamaillant avec une mignonne jeune camérade d'école (et l'observant à la piscine); autre souvenir, celui de la première fois, qu'il avait pris la main de sa jeune fiancée - également traduit et re-conduit par sa propre fille lors d'un RDV (montré en parallèle).
Magnifique.
Le thème du jeu vidéo (M. Ota) est repris visuellement dans la séquence du journal télévisé relatant le fait divers commis par l'ex de Ting Ting.
Edward Yang se joue de son propre histoire croise et décroise épisodes et personnages, parfaitement à l'aise de ce qu'il raconte et se permettant jusqu'à des écarts dans le fantastique (le reveil de la grand-mère); le tout est enrobé d'une bonne dose d'optimisme, la plupart des dures scènes étant désamorcées par la suite (prétendu suicide de l'oncle, noyade de Yi-Yi...), d'autres - au contraire - nous prenant par surprise (le meurtre...). Tel que le "tour de cartes" de M. Ota, le film entier semble baigner dans une éspèce d'aura magique, où les fauchés s'enrichissent à "coups de pierres", les salary men roucoulent au pigeon posé sur leur épaule et que l'"Eve Moderne" apparaît tel un ange devant un simple écran de projection à l'école.
Et à Yang de se poser en "photographe des nuques" pour nous montrer, ce que nous-mêmes sont incapables de voir, mais qui est bien visible aux autres : nos propres travers, notre propre personnalité.
Un beau film avec des moments forts mais un film très long dont la lenteur ne va pas bien à tous les passages
05 octobre 2009
par
A-Lai