Une Vie trop ordinaire...
Un an après Deux Voyous, Aoyama persiste et signe dans le yakuza eiga pour un résultat tout aussi peu convaincant. S'y confirment les penchants poseurs du cinéaste entrevus dans ce film-là. Film au titre voulant jouer la carte de l'ironie par rapport à ce qu'il décrit, Wild Life commence de façon pénible et embrouillée. On se perd dans les multiples allers-retours temporels du film et ce n'est pas la voix off qui fera office de boussole. Le film met une bonne demi-heure avant d'avoir quelque chose ressemblant à une narration lisible. En ayant vu le film jusqu'au bout, on pourrait interpréter ce choix comme un reflet de l'évolution d'un personnage principal au début dans la confusion mentale avant d'être de moins en moins déboussolé. Le problème, c'est que le film nous dit trop bien quel propos ce procédé narratif petit malin sert. Aoyama nous administre ainsi quelques plans lourdement signifiants d'un puzzle évoquant en anglais dans le texte le plaisir dans la vie. Vu le caractère routinier du travail du jeune héros du film, ce désordre, ce puzzle à reconstituer devient celui d'un être en forme de cousin yakuza des jeunes salarymen du Japon en récession des années 90. Ce dernier point n'étant pas vraiment creusé par le scénario, tout ceci se met à sentir le cliché thématique du cinéma d'auteur japonais des années 90.
De plus, la pose semble être ici le seul horizon esthétique d'Aoyama cinéaste. Les mouvements de mise en scène amples et les passages caméra à l'épaule sentent le cinéaste se regardant filmer. L'usage de filtres chromatiques sur certaines scènes est clinquant contrairement au célébrissime sépia d'Eureka. L'usage de travellings latéraux distants en mouvements d'allers/retours sent le Godard mal digéré et transformé en simple procédé pour créer du suspense. Le coup de poing montré du point de vue subjectif de celui qui le reçoit fait dans l'audace gadget. De même que ces mouvements circulaires incessants de caméra lors d'interrogatoires partant de l'interrogateur vers l'interrogé, l'interrogé se trouvant être au cours de la séquence soit le yakuza soit son boss. Et la caméra de continuer son tour de piste jusqu'à ce que question et réponses coïncident. Et à part ça? Quelques passages parodiques du genre pas drôles pour un sou et un score de mauvais téléfilm. Et surtout un chapitrage citant classiques cinématographiques et musicaux à chaque fois pour jouer la carte de l'ironie par rapport à ce qui va suivre. Ce procédé facile devient agaçant à force de systématisme.
Le visionnage de Wild Life fait regretter ce qu'a pu être la série B en d'autres temps: un lieu de proposition de cinéma autre. Récupérée par le mainstream à coup de cynisme marchand, elle peut désormais également être un mauvais cinéma d'auteur comme les autres.
note un peu aléatoire
je l'ai pas vu en entier, pas le courage. au bout d'une heure d'ennui mêlé à l'incompréhension partielle, la télécommande a divinement coupé court à ce film d'un platitude à faire palir ..euh.. ben AOYAMA lui même dans ses moins bons moments (desert moon par exemple). on sent bien qu'il a voulu livrer une histoire un peu embrouillée avec des chassés croisés entre les différents protagonistes, mais la sauce ne prend à aucun moment.
quant à la forme je ne l'ai pas trouvé si poseur mais passablement laid à certains moments, en tous cas rien pour retenir le spectateur non plus.