Femme fatale
TOMIE est d’abord un Manga populaire (traduit en français) de Junji ITO.
Devenu le film TOMIE en 1999 avec la douce Miho KANNO en spectre, son succès entraînera trois suites : REPLAY en 2000, REBIRTH en 2001, et enfin FORBIDDEN FRUIT en 2002.
Mais tout comme pour le cycle RING, il y a eu une adaptation destinée à la télévision et au marché de la vidéo, ce ANOTHER FACE tourné après le premier opus dés 1999.
L’histoire de cette jeune fille devenue fantôme et entraînant dans la mort de nouvelles victimes à chaque épisode ne se démarque pas vraiment de toute la vague fantastico-horrifique nippone et coréenne initiée par RING.
On voit bien qu’il ne s’agit là que d’un téléfilm au budget limité qui ne s’encombre pas de fioritures esthétiques. Parfois le tournage se passe directement dans la rue, on voit quelques passants regarder curieusement la caméra.
Les trois sketches s’enchaînent sans temps mort ni longueur, le rythme est efficace.
Au-delà de la simple envie d’avoir peur du fantôme, ce qui rend ces trois parties intéressantes se trouve dans les choix des sujets et des interprètes.
Le premier segment compte une banale rupture adolescente se transformant en meurtre impossible, intrigue plaisante à suivre mais cette irruption de l’irrationnel dans le terne quotidien a souvent été exploitée.
Dans le deuxième film, un photographe d’age mur tombe raide dingue d’une jeune fille qui lui en rappelle une autre des années auparavant. Incarnation de sa vision de la femme idéale, il se laisse mener par le bout du nez jusqu’à l’issue attendue et fatale. Le scénario rend parfaitement compte de cette fascination nippone bien réelle et réputée pour les beautés juvéniles, l’humour noir de la chute finale (…) dépassant largement le cadre du film d’horreur. Le meilleur des trois épisodes.
Le dernier met en scène l’ennemi intime de TOMIE, l’ex-médecin légiste Oota. Ce Van Helsing de l’archipel essaie de convaincre un salaryman borné que sa nouvelle conquête est plus que dangereuse. Là aussi, les fantasmes masculins en prennent pour leur grade, l’employé se comportant en parfait Otaku qui ne discerne plus rien de la réalité si elle ne concerne pas sa chère TOMIE.
Ces histoires auraient moins de saveur si le spectre TOMIE n’était interprété par Runa NAGAI, gravure girl japonaise magnifique et très populaire née en 1982, donc à peine âgée de 17 ans à la sortie de cet opus.
Ses prestations télévisées dans la série sexy « Minisuka Police » ont permis à ses fans de profiter de son physique pulpeux. Elle joue ici presque son propre rôle : que ce soit les séances photos dans le 2° sketch qui composent l’essentiel de son métier en dehors de ses rôles d’actrice, ou la fascination naturelle qu’elle provoque chez ses compatriotes dans la vraie vie, Runa NAGAI n’a pas à se forcer, et le fait qu’elle soit une revenante n’est pas gênant vu qu’elle est bien sûr restée aussi jolie « qu’avant »…Elle apporte néanmoins par sa seule grace acidulée et sa fausse innocence un tantinet perverse toute la beauté vénéneuse nécessaire au rôle. Nouvelle version de la femme fatale, Runa/Tomie résume elle-même à la fin la philosophie de son comportement : se multiplier pour faire toujours plus de victimes. Si tous les fantômes avaient son allure, les dégâts seraient en effet irréversibles…
[avis aux amateurs] fan-service Runa Nagai inside
Deuxième adaptation filmée de
Tomie,
Another face peut facilement ne pas être considéré comme opus à part entière de la série, ce pour deux raisons : tout d’abord, il s’agit d’un épisode tourné pour la télé (ce qui n’est d’ailleurs pas sans conséquences, notamment sur l’absence de gore) contrairement au film de
Oikawa Ataru et de tous ceux qui ont pu suivre et de plus, la forme qu’il prend est différente. En effet, il est composé de trois histoires quasiment indépendantes entre elles, là où les autres films formaient des histoires complètes.
La première partie et sa bluette sentimentale perturbée par les incessantes réapparitions de Tomie est assez intéressante et tire en particulier profit d’un certain humour cynique, absent dans les autres segments de
Another face, alors qu’ici la jeune Tomie fait de manière appréciable preuve d’ironie et de nonchalance. A vrai dire, il est probable que plus développée, une telle histoire puisse donner quelque chose de bien, mais malheureusement expédiée en 20 petites minutes elle ne décolle pas et se réduit finalement à une simple anecdote.
La seconde est bien moins intéressante, même si l’idée pouvait tenir la route. Mais elle est surtout handicapée par quelques scènes assez ridicules (la scène de danse qui tombe comme un cheveu sur la soupe sans justification – le scénariste a du expédier le boulot) et surtout se résume en grande partie en une longue, très longue séance photo. A noter quand même qu’il s’agit d’une des rares fois où on se trouve (dans les épisodes filmés) en présence de deux Tomie.
La troisième et dernière histoire est plus "classique" dans le cadre de la série : il s’agit de détruire le monstre, et non plus de se débarrasser d’une petite amie encombrante. Ce n’est malheureusement pas plus passionnant. Seule la fin assez perverse et finalement sans espoir relève le niveau, et encore, c’est pas forcément gagné.
Et si toutefois ce troisième segment tente de relier les deux premiers (qui se révèlent en fait des enquêtes de Ota, et dans lesquels il apparaissait furtivement), ce lien est trop diffus et artificiel pour être réellement intéressant. Tout au plus justifie-t-il le fait que
Another face ne soit pas un film à sketchs. Tant que je parle d’artificialité, un rapide mot au sujet de l’utilisation de la voix-off. Compte tenu du format très court, c’est en effet le moyen rêvé d’installer rapidement les différentes histoires, mais ceci est fait de manière bien lourdingue et sans grande subtilité et finalement c’est aussi passionnant qu’une séance diapo chez grand-mère.
Si on ajoute que, passage TV oblige, le réalisateur ne peut pas se permettre de gros gore qui tache, ce
Tomie : Another face n’est finalement pas très palpitant. Et encore plus que de ces scénars pondus à l’arrache et aux personnages bancals, il souffre de sa réalisation de seconde zone, de son image indigne d’un film de mariage, de sa musique horripilante et de son casting de débutants très loin d’êtres doués mais parfois fort mignonnes -
Runa Nagai dans un rôle sur mesure. Le rendu s’en retrouve finalement plus proche du téléfilm sentimental que du film d’horreur.
A oublier sans grands regrets.
21 janvier 2007
par
Epikt