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Tokyo Bordello

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Pikul 2.75
Illitch Dillinger 3.5
Anel-kun 3
Toxicguineapig 4.25
OshimaGosha 4


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Le dernier chef d'oeuvre de Gosha

Avec sa trilogie d’adaptations des romans de Tomiko Miyao (Dans L'Ombre Du Loup, 1982, Yokiro, 1983, et La Proie de l'homme, 1985), Hideo Gosha avait atteint une forme de point limite dans la maîtrise de son art, merveilleusement élégant, souverainement classique. Il revient ici dans le monde des geishas et des maisons de plaisir avec un film ovni qui est l’une de ses plus belles réussites. Gosha endosse les habits du maître Mizoguchi pour nous proposer une peinture très convenue de Yoshiwara, le quartier des plaisirs de Tôkyô (fermé en 1957, ici dépeint dans les années 1920). Les situations paraissent en effet avoir été vues mille fois : l’arrivée de la novice, qui vient régler une dette familiale et qui découvre avec les yeux d’Uzbek les mœurs de sa maison, les rivalités entre geishas, les amours, forcément décevantes, avec les clients qu’on espère épouser ou ratisser, l’alcool et l’usure qui conduisent les femmes vers des maisons de moins en moins cotées et vers la prostitution la plus crue… Rien de neuf sous le soleil levant. Mais quelle virtuosité dans la mise en scène ! Gosha s’éloigne du style classique pour construire un monument baroque, qui oscille en permanence entre son héritage japonais et la modernité occidentale, ne cesse de varier les registres et de tester toutes les formes. Alternance de scènes de chambres avec tatamis et panneaux de fenêtre en papier de riz, filmées en champ contre-champ, et de magnifiques plans séquence de foules, cadrages déroutants (avec une prédilection pour les plongées) et utilisation des couleurs les plus vives avec une maestria étonnante (récurrence du motif rouge pour les héroïnes, du bleu et du vert pour les décors), pittoresques plans paysagers avec soleil couchant et subtils plans de transition entre scène à la Ozu : c’est d’une beauté visuelle permanente et, en dépit de la variété des formes, totalement cohérente. Gosha ose même une scène saphique d’une subtilité et d’une beauté déconcertantes, qui devrait faire périr de honte Abdellatif Kechiche. Jusqu'aux maquillages des actrices (ternes et froids dans la journée, pétaradants de rose, de rouge et de blanc en soirée) et à la musique de Masaru Sato (un thème principal à la Morricone et des variations dans le style de la musique traditionnelle japonaise) qui portent la marque de ce choix délibéré des contrastes, de la mobilisation de toutes les palettes. Souvent considéré comme un sous-Kurosawa, Gosha vaut mieux que le rang d’excellent artisan où l’on a tendance à le cantonner. Quoiqu’il soit de la même génération que les cinéastes plus reconnus de la nouvelle vague (Teshigahara, Shinoda, Oshima, Yoshida), il apparaît, avec ses films des années 1980, comme le dernier maître du cinéma classique japonais, un cinéma qui n'était pas fossilisé dans ses certitudes mais innovait jusqu'à sa disparition.

26 juillet 2017
par zybine


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