(Il ne faut pas) Pousser la chanson
Adaptation du populaire manga de même nom d'Inio Asano.
Bon, il ne faut absolument pas se leurrer: "Solanin" s'inscrit dans cette folle tendance de vouloir adapter des dizaines (centaines ?) de mangas chaque année – d'autant plus, quand ceux-ci se réfèrent à l'un des genres parmi les plus populaires du cinéma japonais contemporain: la chronique adolescente…Et comme la musique est furieusement à la mode ces derniers temps ("Beck", "Bandage", "Detroit Metal City", Shonen Merikensack", "8000 Miles 1 & 22 pour n'en citer que quelques exemples parmi d'autres), pas besoin de chercher midi à 14 heures.
Ensuite, il faut savoir, que le présent film a été avant tout pensé comme nouveau "véhicule à star" pour la bellissime Miyazaki Aoi, à qui l'on demande de faire ce qu'elle sait faire de mieux: des jolies moues. Elle grimace donc à longueur de film, soit des petits sourires charmeurs pour écoper de gros papouilles de son petit ami, soit des rictus plus peinés, quand elle pense avoir été plaquée, soit des moues torturés à coups de riffs de guitare; mais le VRAI argument commercial, c'est d'avoir su la vendre guitare à la main, clope au bec !!! Véridique ! Il n'en faut plus grand-chose pour tenter de rameuter les foules dans une cinématographie nipponne commerciale sérieusement ravagée ces derniers mois.
Bon, reste…le reste…Le manga était extrêmement simpliste, mais réussissait à aborder un thème relativement nouveau dans le genre qui nous intéresse: l'actuel désœuvrement des trentenaires nippons, qui ne savent où aller…Un phénomène répandu depuis des nombreuses années en Europe, où les jeunes adultes enchaînent les petits boulots intérimaires sans trouver de poste fixe, ou où l'on nous pousse à poursuivre des études jusqu'à trèèèèès tard avant de nous balancer sur le marché sans avoir aucune connaissance / pratique, mais en nous ayant bien inculqué de viser els postes les plus hauts, payés à prix d'or, puisque sinon à quoi servirait d'avoir fait des études aussi longtemps, nom d'un chien ?!! (en même temps, il faut se grouiller de trouver un job, car les 42 ans de cotisations, faudra les remplir avant nos 62 ans pour espérer toucher un jour quelques centaines d'Euros pour payer les maisons de retraite surtaxées…bon…bref…). Bon, ben voilà, là, c'est pareil, la fille traine surtout du côté de la photocopieuse après trois ans au sein d'une grande entreprise, tandis que le gars glande dans un magasin de musique en se rêvant chanteur à succès à force d'avoir gobé les mensonges des téléréalités musicales et du star system nippon. On assiste donc à une première heure au mieux divertissante, sinon complètement vaine, faite de petits riens, qui permettent une meilleure identification à des personnages foncièrement sympathiques (on se demande quand même à quoi sert cette intrigue parallèle du gros – mais forcément sympa – épris d'une punkette, alors qu'il sort déjà avec la meilleure amie de l'héroïne… …).
Ensuite on embraye sur la seconde partie, FORTE dans le manga pour avoir réussi de faire du mélodrame REUSSI, celui qui est forcément attendu, mais réussit à vous arracher une larme à coups de beaux sentiments super bien croqués sur le papier. Eh bien, ça ne marche absolument pas dans le film – la faute avant tout à un réalisateur d'un premier film – et surtout musicien par ailleurs. Bon, franchement, j'ai déjà beaucoup de mal avec un jeune homme, qui se fout sciemment en l'air, parce qu'il n'aura pas réussi à devenir une super star après avoir fait deux / trois concerts, quand il était en fac et envoyé UNE maquette à 5 malheureux studios. Il ne faut pas déconner…Faut s'accrocher mon gars ! Il faut trimmer un peu avant d'espérer avoir du succès !!! Enfin, bref, ce détail d'importance m'a profondément horripilé et j'ai donc tenté de reporter ma concentration sur Miyazaki, qui enchaînait ses moues en tentant d'apprendre la guitare…Alors, curieusement, TOUT tombe à plat. Les scènes s'enchaînent sans véritable implication…Que fait donc Miyazaki ? Souffre-telle à digérer la perte de son ami / à apprendre la guitare ? Quels sont ses progrès ? Où veut-elle vraiment aller ? Que font les autres pendant ce temps-là ?!! C'est un M2LODRAME, nom d'un chien, il faut DONNER de l'émotion pour pouvoir en ressentir…or là, chaque scène arrive sans rien apporter.
Alors, forcément, la dernière scène tant attendue tombe mais alors plus qu'à plat. On y joue une chanson, on sait qu'il aurait dû se passer un truc, on écoute, poli, mais c'est 0 côté sentiments. Indescriptible à quel point c'en est dénué, d'ailleurs.
Alors, un simple conseil au réalisateur: celui de regarder "Live Tape", une docu-fiction, qui peut peut-être sembler un peu longuette, mais qui en quelques minutes, tout à la fin, en ne connaissant quasiment rien de l'interviewer et l'interviewé réussit à créer une émotion, une vraie, où l'on nous a donné quelques clés pour appréhender une chanson, qui prend alors tout son sens, quand elle est chanté, INTERPRETE et hurlé au ciel pour des raisons bien précises…Alors, là, OUI ! On comprend, ce que "Solanin" aurait dû être depuis le départ.