Un grand hymne aux femmes
Ca fait une éternité que j’ai vu ce film, mais je me souviens encore de son atmosphère très posée dans une maison close d’un quartier chaud de Tokyo. Après une décision imminente du gouvernement qui souhaite marginaliser la prostitution, les réactions parmi les femmes qui exercent ce métier pour faire vivre tant bien que mal leurs familles sont vives mais désabusées. Mizoguchi nous livre un portrait très juste de cette époque en prenant parti pour les femmes, laissées-pour-compte de la société nippone. Dans le rôle principal, Machiko Kyo est particulièrement bouleversante.
Un honnête portrait du japon et de ses bordels.
[Express]
Peu avant sa mort, Mizoguchi livrait sa dernière création, celle d'un portrait de prostituées emprisonnées de leur situation -délicate il faut bien dire- incapables de changer de métier et ainsi rebondir sur une meilleure vie. Le métier de femme de mauvaise vie n'est clairement pas réputé au japon d'après-guerre et Mizoguchi démontre tout au long de cette petite heure 20 les problèmes sociaux de ces dames, cadenassées dans leur bordel tout en attirant -peu farouchement- le moindre individu osant s'aventurer devant l'établissement.
Une chronique du quotidien de prostituées est certes une chose plutôt intéressante à suivre surtout avec Mizoguchi aux commandes, mais son traitement un poil trop larmoyant et disons le, particulièrement mou, finit par agacer. C'est bien joli de suivre des discussions à n'en plus finir, mais je ne me suis pas senti une seule fois impliqué dans les propos de ces dames, encore moins par le pessimisme -assez terrifiant- du film. Difficile de trouver un grand intérêt à l'oeuvre de Mizoguchi quand on la regarde avec passivité du début à la fin. Il y a certes des moments plutôt forts (lorsqu'un des hommes apprend que Yasumi lui prenait son argent par intérêt et non par amour) et l'interprétation demeure profonde, mais dans l'ensemble je n'ai pas réussi à accrocher. De même que la musique, assez laide dans l'ensemble et la mise en scène très -trop- propre de Mizoguchi finissent par décevoir. Un honnête film, à des années lumières du sublime
Contes de la lune vague après la pluie.
Dirty Shame
Dernier film de Mizoguchi, qui allait être précocement emporté par une leucémie l'année suivante.
Revenant à sa thématique préférée du portrait des femmes (prostituées), le cinéaste réalise également l'un de ses métrages parmi les plus noires et désespérées de sa carrière.
A travers l'histoire de cinq prostituées employées d'un bordel ironiquement appelé ''Le Pays du Rêve'' (Dreamland), Mizoguchi s'attache à dépeindre leur difficile condition dans un système ne leur permettant pas de s'en sortir. Cherchant toutes à quitter leur condition, seule Yasumi semble y parvenir en trompant les hommes de ses réelles intentions, qui sont de leur extirper de l'argent pour racheter sa liberté. A travers ce personnage, le réalisateur semble vouloir dire, que seuls arrivent à leurs fins les plus manipulateurs d'entre nous.
Quant aux autres filles, toutes leurs tentatives sont vouées à l'échec.
Le cinéaste s'attache également à montrer les conséquences directes de l'exercice du métier le plus vieux du monde sur l'entourage immédiat des prostituées : une fois leur véritable existence révélée, les autres membres de la famille ne peuvent plus se marier, ni étudier ou sont carrément chassés de leur village.
Finalement, le temps d'action du film situé juste avant l'avènement d'une loi interdisant leur profession sonne comme une lourde menace lourde de conséquences : unique chance de pouvoir survivre ou de subvenir aux besoins de leur famille durant la difficile période de l'après-guerre, cette loi anéantira encore d'avantage une population très appauvrie. La situation est également terriblement paradoxale, l'occupant américain usant et abusant des filles de joie durant leur séjour au Japon et les quartiers rouges n'ayant connu un tel essor, que durant cette période historique.
Enfin, le dernier plan de la riche filmographie du réalisateur est également l'un des plus éprouvants : le racolage d'une jeune femme intimidée, se jetant à corps perdu vers sa fatalité sans issue...
Charite bien ordonnee commence par soi.
Dieu merci, le pedantisme de Frederic Mitterand n'atteint ni la suffisance ni l'imagination de Maggielover. Cette capicite qu'a notre critique du dimanche a lire les pensees de Mizoguchi en ayant vu 3 de ses films nous laisse bien pantois en effet.
Le propos de maggielover est creux, il pourrait s'appliquer pratiquement a n'importe quel film (d'ailleurs dans La Rue de la honte point de "fantasmagories impressionnistes" comme dans Les contes par exemple). Et que dire de son style ampoulé, boursouflé. A croire que notre m'as-tu-vu est critique de peinture contemporaine...
Bon, les inepties de l'autre comique me ferait presque oublier de parler du film:
Le dernier film de Mizoguchi je crois. Un film de maturite en tout cas, tres representatif de son oeuvre . Et puis, ya Machiko Kyo bien sur! A voir sans hesitation donc.
Citations.
Il faut se procurer une version de La rue de la honte qui soit présentée par Frédéric Mitterand. Dans toute la drôlerie pédante dont il était capable, il parvenait peut-être, en écrasant tout le film sous son verbe, d'en dire néanmoins quelque chose de plus intelligent que tout ce que les commentateurs habituels de Mizoguchi ont pu proférer. C'est Skorecki qui le disait : Mizoguchi était le plus japonais des réalisateurs japonais - et c'est sans doute pour cela que, en fin de compte, on n'y a jamais rien compris. Tandis que Kurosawa, ce grand pornographe ridicule... C'est qu'en effet Mizoguchi ne filme pas. Il ne fait pas de cinéma. Il s'agit bien d'images qui bougent, d'acteurs qui jouent la comédie, d'histoires fabriquées. Mais il ne s'agit pas de cinéma. Le cinéma, c'est le miroir d'une époque et d'un lieu. D'une époque qui n'a jamais existée autre part que dans la nostalgie des regardeurs ; et d'un lieu qui n'a jamais été autre chose que de l'ordre du fantasme. La nostalgie et la fantasme, Mizoguchi et ses fantasmagories impressionnistes ne connaissent pas. Ils s'adressent à des gens, à d'autres gens, qui parlent une autre langue. Ils sont perdus pour les cinéphiles. Les films de Mizoguchi rendent la cinéphilie grotesque, prétentieuse, bête. Ils s'y soustraient dans la nécessité de faire des images. Parce que les images, pense-t-il, c'est peut-être la vie. Rien de plus simple pour lui. Rien de plus compliqué pour nous qui devons vivre avec l'héritage de Méliès et des Lumière. Notre héritage. Lui, Mizoguchi, il n'en a que faire.