Bon sujet pour un moyen métrage, pas pour un long
Le matériau de départ ne manquait pourtant pas de piment : un frère et une sœur adolescents bifurquent sans comprendre pourquoi vers un monde parallèle quasi-similaire au leur, mais dans lequel ils ne voient plus leurs parents. Les 2 jeunes personnages ne manquaient pourtant pas de fraîcheur : Daigo, petit rondouillet bougon, et Eriko, jeune fille au visage singulier, sont les guides plutôt attachants de cette fugue spatio-temporelle qui reste ancrée dans leur quotidien citadin. Mais Route 225 tourne rapidement à vide, faute de carburant dans le moteur. Une fois qu’on a saisi qu’on était dans un univers A’ différent de l’univers A, la quête de la clef de sortie devient monotone et répétitive, et l’étrangeté potentielle du film n’est pas du tout exploitée. On attend donc poliment le générique final en somnolant quelque peu, indifférent aux rebondissements laborieux parsemant l’intrigue, et avec l’impression récurrente d’un beau gâchis.
Juste un p'tit film...
Route 225 est un p'tit film : 2 p'tits acteurs (par leur âge) qui s'en sortent très bien, une p'tite histoire un tantinet mystérieuse basée sur la perte d'êtres chèrs (famille, ami), une p'tite musique au piano bien sympathique, un p'tit peu d'Ikanji pas trop méchant tourné en dérision. Le tout reste léger et possède une agréable mièvrerie assez enfantine, comme le film est du point de vue des enfants ça tombe bien. Bref un bon p'tit film juste un p'tit peu trop long...:-).
Un vrai coup de coeur.
Habité par une fraîcheur communicative, le film de Nakamura Yoshihiro est un superbe conte fantastique, mené par deux jeunes adolescents pris au piège un peu par magie, dans un monde parallèle mais pas tout à fait. Leur quotidien va en effet se mettre à changer un beau jour, leur ville Seki se transforme en S@ki, la mer fait son apparition, même si en fin de compte seul le cadre diffère : les personnages peuplant l'univers restent en effet les mêmes, seul l'espace temporel s'avère aussi bouleversé, avec des connaissances, amis et familles qui ne réagissent plus comme avant, font abstraction d'un passé qui leur semble inexistant, au même titre que leurs affinités bouleversées elles aussi. Les membres de leur famille iront jusqu'à ne plus les reconnaître. Cette originalité scénaristique laisse le cinéaste parfaitement libre de laisser transparaître bonne quantité de fantaisies, qui même si parfaitement louables et cohérentes n'empêchent pas quelques pertes logiques de repères.
Qu'importe, la magie opère, la jeune et talentueuse Tabe Mikako étonne par son naturel confondant et son regard perçant, et son petit frère rappelle à moindre mesure le petit Masao de L'été de Kikujiro de Kitano pour son air quelque peu benêt. Bien réalisé et mis en musique, Route 225 est une parfaite réussite et une preuve qu'un cinéma simple doté de quelques touches fantastiques a encore de belles heures devant lui, qui plus est au vu de la médiocrité du cinéma japonais actuel. Les irréductibles de la mise en scène chanmée iront voir ailleurs, ici tout n'est que simplicité, transparent d'originalités visuelles tout simplement car il n'en a pas besoin pour avancer. Il se suffit, en gros, à lui-même.
A travers les âges
Une occasion en or pour le réalisateur Nakamua Yoshihiro de se débarrasser de son étiquette peu glorieuse de faiseur de tous petits films d'horreur sans aucune gloire en adaptant un populaire roman signé des mains d'une romancière transsexuelle très célèbre pour ses nombreuses frasques et son changement de sexe surmédiatisé. L'accueil réservé à la sotie du film a été des plus mitigées, surtout pour ne pas livrer les clés du voyage temporel selon les propres dires de son réalisateur – c'est pourtant sous-estimer son cher public.
Car si une bonne partie d'un public plus habitué à des films purement commerciaux risquent de passer à côté de la métaphore des difficultés liées au franchissement du cap de l'enfance/adolescence (surtout liées à la perte de ses parents), Yoshihiro manque très certainement de la carrure nécessaire à supporter un tel projet sur ses frêles épaules. Soit un film au budget trop restreint, au casting honnête, sans être transcendant (pourtant premier impératif pour assurer l'identification au spectateur) et surtout, surtout une mise en scène tout à fait quelconque. Yoshihiro emballe son histoire sans aucun génie, là, où il aurait fallu une réalisation collant parfaitement à l'étrange ambiance et lourde de double-lectures, afin de donner quelques clés à la bonne compréhension du message profond du film. La mise en scène serait plutôt digne d'un téléfilm pour enfants destiné à la télévision un dimanche après-midi, plutôt que de mériter passer sur un grand écran.
Le film se laisse voir, l'intrigue (et ses nombreux rebondissements) tient suffisamment en haleine pour que l'on ne décroche pas avant la fin – mais il manque tout simplement du talent au réalisateur pour faire quelque chose de son intelligent matériel de base. Un prochain etour par la case horreur?!!!