Chris | 2 | Brigands vs yakuzas |
Ghost Dog | 2 | Un polar à la française décevant. |
Voilà un film bien étrange. C'est l'époque en France où le film de genre était in, enfin surtout le polar, et tous les réalisateurs devaient s'y essayer. Alors quasi-débutant, un certain Jacques Deray s'attaque à cette histoire censée être exotique et s'avèrera par la suite être l'un des meilleurs polarmen de ce côté-ci de l'Atlantique. Ce film, en surface, possède la structure du film de casse telle qu'imposée par Hollywood (un ratpack de spécialistes, une mission impossible et un "gros" final), mais prend de nombreux chemins détournés pour parvenir à ses fins.
Tout d'abord si on ne lit pas le synopsis (sur Cinémasie, derrière la cassette ou dans le Télé 7 jours), on ne comprend globalement le pourquoi qu'après dix bonnes grosses minutes d'exposition ! Et pendant tout ce temps, le dit-"héros" interprété par Karl-Heinz Böhm ne montre même pas le bout de son nez. Apparaissent également un toujours monumental Charles Vanel dont on ne sait pas trop à quoi il sert et un Michel Vitold chargé d'une haute mission stratégique qu'il va nous falloir deviner. Pendant ce temps, des yakuzas éliminent un supposé brigand, ce qui n'a pas l'air d'émouvoir grand monde.
Ensuite, le récit se perd malencontreusement dans des dédales narratifs peu convaincants voire irritants (apparemment personne n'est heureux d'être à Tokyo), car pour un film de casse, il n'y a quasiment pas d'entraînement et l'enjeu n'est jamais explicité, ce qui est vraiment dommage. Même le morceau de bravoure final, s'il commence de manière trépidante, se clot trop langoureusement. Heureusement, les acteurs s'en tirent plutôt bien : Karl-Heinz Böhm en braqueur cool (même s'il est plus convaincant en voyeur) et la très belle Barbara Lass en femme tristounette en tête. Il y a aussi nombre d'acteurs japonais (dont la toujours très jolie Keiko Kishi), mais qui ne font qu'illustrer ce récit dont on pouvait attendre mieux.
Ils sont 4 français fraîchement débarqués à Tokyo, 4 français parmi 100 millions de japonais. 2 d’entre eux fricotent avec eux, et ça sera fatal aux 4… Il faut dire que ces 4 s’apprêtent à commettre le casse du siècle dans une banque de Tokyo : dérober un joyau d’une valeur inestimable. Pour cela, le cerveau de l’équipe (interprété par le grandiose Charles Vanel) a fait appel à 2 hommes de main vétérans de Corée, joués par Karl-Heinz Böhm (l’inoubliable Voyeur de Michael Powell) et Eiji Okada (Lui dans Hiroshima mon Amour), ainsi qu’un technicien incarné par Michel Vitold. Okada va rapidement succomber sous la violence des gangs japonais. Vitold finit par péter les plombs, Karl-Heinz se fera trahir par sa compagne nippone et Vanel se fera piéger…
Filmer des français en vadrouille au pays du soleil levant n’est pas chose courante. C’est pourtant ce qu’a fait Jacques Deray dès son deuxième film, un polar qui surfe sur la vague des polars français aux dialogues incisifs (Le Cave se rebiffe, Mélodie en sous-sol). Il a voulu montrer l’exclusion de ses personnages dans un pays lointain, une exclusion qui les condamne à échouer dans leur entreprise criminelle. Seul problème, le régal n’est pas au rendez-vous : les trois-quarts de film exposent par bribes la préparation du casse, de manière très décousue et peu passionnante. Deray (ou l’éditeur de la vidéo ?) ne se donne même pas la peine de traduire les scènes où l’on parle japonais, ce qui fait que le spectateur se trouve comme un con à ne rien comprendre ce qui se dit, et du coup ne se sent plus concerné par la trame de l’histoire. Quant au casse, il est loin d’être mémorable : tout se passe de façon mécanique, froide, sans passion, avec un rebondissement final rendu à l’écran de manière si banale qu'il n’a finalement aucun effet. Dommage.