L'un des meilleurs films de l'histoire 6/5
La trilogie "Apu" depasse les frontieres du cinema indien, c'est un sommet du cinema mondial et de l'Art tout court. Ces 3 films sont si proches de la perfection qu'ils rivalisent avec le meilleur de Kurosawa ou Chaplin. L'opus qui ouvre la serie "Pather Panchali" est un chef d'oeuvre humaniste hallucinant, d'autant plus ahurissant qu'il s'agit du premier film de son realisateur Satyajit Ray. Soyons clair et net: c'est le meilleur "premier film" de l'histoire du 7ieme art, la maitrise du realisateur est incroyable, mise en scene austere geniale, remarquable composition des acteurs amateurs et musique admirable de Ravi Shankar. La maniere dont ce film suscite chez le spectateur une emotion profonde avec une economie de moyens me laisse pantois. Bref, si je devais sauver 5 films, "Pather Panchali" en ferait partie...
Don't worry, be APU
Premier de la trilogie d'"APU", ce film est également le premier métrage de RAY. Financé par ses propres moyens pour commencer, le cinéaste dit être insatisfait de la première moitié, où lui et la plupart des membres de l'équipe (et des acteurs) devaient tout apprendre par eux-mêmes pour pleinement maîtriser le support filmique. Impressionné, le gouvernement Bengale ne s'est pas trompé à sponsoriser la fin du film : dès ce premier long métrage, RAY signe un véritable chef-d'oeuvre ! En totale opposition sur les méthodes de travail habituelles des studios bollywoodiens, il réussit à retranscrire avec précision, simplicité et humilité une tranche de vie de quelques personnes criant de vérité. Peu de cinéastes peuvent se targuer d'avoir su autant humaniser leurs personnages; seul KUROSAWA a réussi à toucher ces uniques moments de grâce similaires.
Dépeignant le quotidien tout sauf trépidant du jeune APU, le réalisateur sait se mettre à la hauteur de l'enfant et de découvrir les choses l'entourant avec un même air émerveillé. Les chamailleries avec sa soeur ou la magnifique scène de la découverte de l'existence du train restent de moments d'une sincère beauté aussi poignantes que les purs moments de dramaturgie vers la fin du film. Tout au long des trois films, APU devra surmonter des obstacles intimement liés à la vie en général; jamais il ne baissera les bras, jusque dans le magnifique dénouement du troisième - et dernier épisode - qui laissera la suite de ses aventures en un large suspens; mais à RAY de réussir tout au long de sa trilogie - comme à la fin de ce premier épisode - ce qui pourrait bien se passer, tant l'univers d'APU semble familier, thèmes et messages universels.
Un très grand film pour démarrer la carrière d'un des réalisateurs parmi les plus grands de l'Histoire du Cinéma Mondial !
Petit Apu deviendra grand
On pourrait dire de Satyajit Ray qu'en assistant personnellement Renoir sur le tournage du
Fleuve en Inde il a été à bonne école. Pourtant, au sein de ce premier film et premier – c'est un euphémisme – coup de maître, l'influence du grand cinéaste français se perçoit difficilement sinon pas du tout. Selon les exégètes, il faudrait plutôt aller chercher du côté de De Sica et le néo-réalisme en général pour déceler la principale source d'inspiration de Ray. C'est d'ailleurs après avoir découvert
Le Voleur de Bicyclette que celui-ci aurait caressé l'envie de devenir réalisateur. Au misérabilisme gênant et affecté du metteur en scène italien, l'auteur du
Salon de Musique substitue en fait une honnêteté et une humilité qui touchent bien davantage. Il y a un côté pris sur le vif dans la manière de filmer les situations et de diriger les comédiens – amateurs pour la plupart – qui n'inhibe pas une délicatesse de tous les instants dans la mise en scène, qu'il s'agisse des mouvements d'appareil superbement opérés par Subrata Mitra ou simplement du fait de « capturer » les hommes, les animaux et les éléments (l'eau en particulier) avec la même attention, le même degré d'importance.
La Complainte du Sentier n'obéit à aucun impératif d'ordre visuel ou dramatique et, au rythme des sublimes partitions de Ravi Shankar, semble s'écouler naturellement comme les eaux divines du Gange. On peut parfois trouver le temps long mais on ne peut s'empêcher d'être bouleversé par les purs moments de grâce et d'émotion que renferme l'œuvre. À contre-courant de la production bollywoodienne spécialisée dans les loukoums de 3h avec force intermèdes musicaux et élans folkloriques, ce film à la beauté brute met en lumière le talent d'un réalisateur dont la postérité allait se souvenir. Du grand cinéma.