Désordre de coeur
Nouvelle déclaration tout feux tout flamme à la femme par Mizoguchi et son actrice fétiche Tanaka Kinuyo qui y tient un rôle de pivot. L'oeuvre de Mizoguchi tient sa réussite avec un matériau de base pourtant très simple, l'hésitation amoureuse, la barrière des traditions, les mariages forcés. Si l'ensemble de ses thèmes ne sont pas forcément tous passés au crible par le cinéaste, on les ressent tout de même à travers les personnages de Shinnosuke, Oshizu et Oyu. D'abord, les relations se passent uniquement dans le cercle familial, ce qui annonce déjà une certaine idée du renfermement et des traditions vieillottes. La complexité de certains personnages aussi, comme Oyu et son refus d'épouser Shinnosuke, Oshizu qui veut le bien de sa soeur Oyu et qui pense que son mariage avec Shinnosuke n'est qu'un mariage de forme et que dans le fond, elle reste ni plus ni moins qu'une de ses soeurs éloignées. Shinnosuke, lui, éprouve une immense admiration pour Oyu, grande chanteuse et joueuse de Gu Zheng dont il finira par tomber amoureux.
Mizoguchi réalise aussi de savoureux moments de cinéma, intenses et poignants, lorsque notamment Shinnosuke allonge Oyu des suites d'un malaise et pour profiter de son inconscience, la reluque jusqu'à vouloir passer à l'acte. Mais il s'y refuse, par respect et parcequ'il reste conscient de son lien de parenté avec cette dernière. La confrontation des sentiments et des traditions atteint son apogée dans cette séquence, faites en plan-séquence et chichement éclairée comme pour instaurer un climat d'effroi qui tend justement au refus de l'acte sexuel et au trouble que ressent son acteur. Si ce passage étonne par sa singularité et son opacité clairement revendiquée, Miss Oyu ne diffère pas grandement des classics de Mizoguchi : on a droit aux éternelles explications sentimentales dans les jardins lors d'une pleine lune, des sempiternels plans de barque voguant délicatement sur l'eau, d'une mise en scène rigoureuse au service d'un montage très long (cher au cinéaste), et une sur-dramatisation de tous les instants. A noter aussi la superbe musique de Hayasaka Fumio. Et si Miss Oyu est un excellent film, on le doit principalement à sa narration posée et son final qui laisse le spectateur dans le flou. A lui d'écrire la suite de l'histoire à sa manière...
Mal d'amour
Très belle adaptation de Mizoguchi. Une intrigue bien plus simple, que ses riches oeuvres précédentes, il s'atache à brosser la difficile relation triangulaire entre un jeune couple, dont l'homme est amoureux de la soeur de son épouse, qui - elle - est parfaitement au courant de la situation.
Une nouvelle fois un mélo-drame, Mizoguchi réussit cette fois à capter d'avantage le véritable mal-être de ses personnages par moments pour supplanter le simple mélodrame de la situation et a même l'intelligence d'ellipser un vrai épisode dramatique (la mort du fils de la maîtresse) pour ne pas nuire à son intrigue principale.
Une nouvelle fois, il crée un personnage de femme forte, qui se sacrifie pour l'amour de son mari avec toutes les lourdes conséquences que cela comporte pour elle.
Loin de la maîtrise de ses futurs classiques, Mizoguchi affine pourtant sa touche personnelle et réussit une très belle oeuvre mineure.
Film injustement meconnu
Film tres representatif de l'univers Mizoguchi, aussi bien au niveau du fond que de la forme. Une photo magnifique. Un grand film a ne pas rater.