Chronique mignone à défaut d'être inoubliable...
Le dernier film de Zhang Yuan me pose un véritable cas de conscience. D'un côté, il respire la bonne humeur et la joie de vivre avec cette galerie de bambins irrésistibles et très touchants, d'un autre il sombre rapidement dans le syndrome de ce genre de métrage aux propos naïfs et touchants, c'est à dire dans l'accumulation de scénettes rigolotes mais pas plus cohérentes que ça, la faute à un pitch qui peine à se renouveler malgré les bonnes idées. Des bonnes idées on en trouve à la pelle, comme ces différents portraits de l'enfance, dans le fond très intéressants car multipliant les petites anecdotes et les petits tracas de la vie quotidienne des mômes et des instructrices.
Les petites fleurs rouges est donc une petite chronique sur l'enfance de Qiang, placé dans une pension par son père visiblement trop absent pour s'en occuper. L'enfant, hésitant, mettra du temps avant de recevoir ses premières petites fleurs rouges, symboles de réussite et de bonne conduite. Les enfants les gagnent s'ils se tiennent bien, s'ils font caca quand il faut (bah oui...), s'ils se lavent les mains, s'ils s'habillent tout seul, etc. Déjà, les propos ne volent pas très haut pour quiconque ne s'attendant pas clairement à "subir" les petites maladresses d'enfants de 4 ans. Séquences rigolotes certes, mais dont la teneur "pipi-caca prout" finit par lasser au bout de la quatrième voir cinquième fois qu'elle est rabachée. Oui la maîtresse d'école pète lors de son sommeil, et ça fait rigoler. Si l'on passe outre ces quelques lourdeurs, sans doute involontaires, Les petites fleurs rouges respire la sincérité dans sa démarche de mettre en avant les forces et faiblesses d'un petit être qui alterne joies, peines et solitude. Qiang ne sait jamais réellement où se placer. Le petit enfant timide passera de la victime au bourreau, puis au boulet, ses camarades ayant raz le bol de ses manies désagréables, preuve d'un véritable manque d'attachement de la part d'autrui. Ce ne sont même pas ces deux adorables gamines, aussi malicieuses qu'espiègles qui l'aideront dans son épanouissement, non, Qiang est livré à lui-même et doit assumer ses erreurs.
Sans véritable but ni message quelconque, tout juste aperçoit-on l'armée, preuve que le pays est encore guidé par des idéologies militaires pas forcément bien utiles, le métrage de Zhang Yuan étonne donc par son interprétation, notamment Zui Zhao et Li Xiaofeng (sublime!) toutes deux étonnantes d'abnégation. De plus, la mise en scène très sobre, à l'image des propos du film, alterne plans rapprochés et lointains avec un naturel confondant, donnant au film cette sensation de sans cesse se renouveler au fur et à mesure que le petit Qiang change. Notons aussi l'utilisation d'un score joli comme tout à défaut d'être très original. C'est bien là tout le problème en fait. Le métrage est très beau, souvent mignon tout plein, mais dans le fond il n'y a rien de bien nouveau. Il y a aussi cette désagréable sensation d'être face à une oeuvre guère aboutie, avec un final qui arrive comme un coup de massue sur la tête, sans que l'on s'en rende vraiment compte. On se demande encore comment le film peut se terminer ainsi, si brièvement alors que vingt ou trente minutes de plus n'auraient été de trop.
Les petites fleurs rouges n'a donc réellement d'intérêt que si vous trippez comme pas deux devant les mimiques formidables des bambins, véritables attractions à eux seuls. Future graine de star? Je l'espère fortement, tout comme j'espère un métrage plus abouti venant de la part de Zhang Yuan. Ils/elles valent mieux que ça, finalement.
Esthétique : 3.5/5 - Belle mise en scène, travaillée et variée.
Musique : 3/5 - Un score de qualité, mais qui manque souvent de personnalité.
Interprétation : 4/5 - Les enfants sont formidables de naturel. Belle composition des deux courageuses instructrices.
Scénario : 2/5 - C'est joli, c'est beau, triste, rigolo. Mais très souvent creux et fonctionnant par scénettes.
La guerre des bottoms
Un retour en forme pour le mémorable réalisateur des précédents "East Palace, West Palace" ou "17".
Collaborant une nouvelle fois avec le scénariste et romancier Shuo Wang ("Samsara") suite à leur précédent "I love you", ils adaptent tous deux un point de départ imaginé sept ans plus tôt. Le scénariste avait voulu coucher sur papier ses souvenirs personnels de jeunesse, alors qu'il allait encore à la maternelle. Après quelques pages – et après en avoir fait part au réalisateur – il avait dû mettre le travail de côté, incapable de continuer dans un premier temps. Ce n'est qu'au cours de très longues discussions entre les deux hommes – dont le dernier quart a quasiment été écrit ensemble – qu'ils ont fini par terminer l'ouvrage et pouvoir s'attaquer au long métrage.
Le tournage a été – selon les dires même du réalisateur – particulièrement éprouvant. Le casting important d'enfants de 3 à 6 ans demandait une attention toute particulière constante – mais les efforts ont fini par payer largement, tant toutes les scènes sont d'un naturel confondant.
La bouille du premier rôle demande un temps d'adaptation; mais finit par prouver, qu'il est parfaitement trouvé dans le rôle du petit diablotin.
Bien évidemment, le film est bien moins innocent qu'il ne paraît au premier regard : derrière l'attachante histoire d'un jeune garçon ayant dû mal à s'intégrer au sein de la maternelle se cache une profonde métaphore de l'oppressant régime chinois, où tout est conditionné à vivre en communauté, d'obéir aveuglement aux règles imposées et de marcher au pas dès le plus jeune âge. Il n'y a pas de place pour des caractères plus indépendants et toute tentative de rébellion est durement réprimandée. En même temps, l'incroyable persévérance du jeune garçon prouve également que les instances au pouvoir sont finalement bien démunies, si quelqu'un décidait effectivement d'aller à l'encontre des lois – mais à quel prix et pour atteindre quel idéal?
Un parfait film pour toute la famille, qui donne autant de plaisirs à de jeunes spectateurs, que de sujets de réflexion aux grands.