L'idée de confronter deux êtres d'eau et de feu logiquement opposés est un des éléments encourageants du film. Pourtant, si l'on y regarde de plus près, La Femme de l'eau dispose d'un paquet de défauts malgré un pitch de départ intéressant. Le vrai problème est l'incohérence de la mise en scène de Sugimori, étalant sur près de deux heures tous les tics possibles et inimaginables venant de la pub (la séquence où UA, de dos, recueille des perles de pluie dans sa main est un des nombreux exemples) et les autres à l'origine du cinéma d'auteur plasticien par excellence (les quelques interminables zooms) qui font que le film manque de sincérité et de personnalité sur le plan strictement formel. A vrai dire, même la narration peut jouer des tours par son côté roublard et facile notamment dans la relation qu'entretiennent Yusaku et Ryo malgré leur opposition : une incompatibilité vitale et amoureuse donne pourtant lieu à quelques moments gentiment intimistes et déjà vus comme lorsque les deux tourtereaux improvisent une partie de badminton dans le bain public ou font l'amour en pleine nature. Du cliché, certes, mais le langage des "sens" est perceptible grâce à l'interprétation intéressante de UA et Tadanobu Asano. Deux personnages orphelins de leurs parents (au cinéaste hélas d'instaurer la symbolique facile du collier appartenant à la mère d'un tel), deux êtres dans la douleur, qui seront paradoxalement amenés à être séparés par la "mère" de Ryo, clocharde recueillie par cette dernière.
Le film vaut en revanche pour quelques séquences joliment barrées qui ont le mérite de créer une rupture de ton dans cette entreprise incroyablement lente : la présence du vieux peintre venu redonner un coup de jeune au mont Fuji peint en façade, cet homme accompagné de son chien sur la plage et pris d'une violente querelle au téléphone, cet enfant à demi enfoncé dans le sable. Le souvenir est aussi grandement -mais parfois lourdement- évoqué au cours de l'oeuvre hélas entachée par une quantité hallucinante d'ellipses ou de séquences qui ne trouveront de sens que bien après (le bras enfoncé dans la terre, la vue subjective trouble et renversée), le cinéaste se la joue alors donneur de leçon dans sa démarche de narration ou simple opportuniste pompant un style que l'on a déjà vu chez un Kurosawa Kiyoshi ou un Iñarritu. Moyen, mais si l'on regarde cela d'un oeil un peu naïf on peut y voir de bien belles images et un bien beau conte. En fin de métrage, la fatalité est téléphonée, mais prouve que le feu et l'eau sont bien incompatibles malgré les efforts de chacun. Propos puérils ou vraie vision d'auteur de la chose, chacun se fera une opinion s'il désire tenter cette aventure bleue marine pas inintéressante mais loin d'être aussi prometteuse qu'on pensait au vu d'un tel script casse gueule.
Du potentiel, la Femme d'eau en avait sur le papier. La présence au casting d'une Ua ayant composé le score du beau Shara suscitait un minimum de curiosité. Et puis le minimum d'intérêt que suscite la présence à l'écran d'un Asano Tadanobu au CV doré. Aucun des deux n'a d'ailleurs de part de responsabilité dans le ratage du film. On ne saurait en dire autant d'un Sugimori Hidenori. Cet admirateur avoué de Renoir (le titre clin d'oeil à la Fille de l'eau) affirme avec beaucoup de modestie être loin d'avoir le talent de ce dernier. Au vu de ce film arrivant en France après avoir fait son petit tour des festivals internationaux (Venise, Sundance, Rotterdam...), on ne le contredira pas.
Histoire d'évacuer les question "culturelles", évoquons à ce stade la place du "sujet" dans la culture nipponne. Les hommes pluie et femmes pluie sont au Japon des êtres censés amener la pluie à chacune de leurs apparitions. Sujet qui devient prétexte à un film reflet d'un des travers récurrents d'un certain cinéma d'auteur "pubeux": n'être pensé qu'en terme de concept(s). Il s'agit ici de confronter cette femme pour qui il pleut à chaque étape importante de sa vie à un pyromane (un homme feu en somme). Quant au bain public dont l'héroïne est propriétaire, il a été choisi de l'aveu du cinéaste parce que c'est un lieu où se rencontrent eau, air, terre et feu. Tout le film n'est ainsi pensé qu'autour de la confrontation des grands éléments naturels. Confrontation où la déclinaison de concept prime sur une progression narrative déjà pas gâtée par l'abus d'ellipses du récit. La mise en scène de Suginori est quant à elle plombée par les travers d'un certain "cinéma fait par d'ex-réalisateurs de spots publicitaires". Soit un recours quasi-systématique à des cadrages, des angles de vue qui ne sont là que pour faire du plan "joliment" composé et des idées sentant l'affèterie (ces zooms démesurément lents...). De l'esthétisme publicitaire version contemplative qui finit par agaçer à la longue...
Et de notre côté on préférera toujours les vrais talents à l'ego démesuré à un Sugimori dont la lucidité sur ses limites actuelles en tant que cinéaste n'excuse pas la médiocrité.
"2 heures de rêverie envoutantes", "troublant et beau" dixit "Studio et L'express" . "La femme d'eau" est certe tout cela, mais cela est dû en partie aux décors et à l'esthétisme qui se dégagent de ce film . Mais ce n'est pas suffisant pour en faire un bon film, bien que les acteurs jouent avec justesse, il manque le petit plus qui fait la différence . Etant sensible à l'esthétisme, j'ai pourtant trouvé "La femme d'eau" ennuyeux comme la pluie ; le film ne m'a touché à aucun moment, au contraire il me faisait glissé dans les bras de Morphé .
Premier long-métrage d’un cinéaste qui a tourné pour la télévision et la publicité, LA FEMME D’EAU est un convaincant début.
Les rapports entre la jeune Ryo et le beau pyromane sont au centre de cette histoire d’eau, chacun représentatif d’un élément originel : en l’occurrence l’eau et le feu, alors que la terre et l’air trouvent une personnification d’en d’autres protagonistes. Le folklore et les traditions locales ont aussi une importance dans l’histoire, rappels réguliers des « pouvoirs » de Ryo.Mais SUGIMORI évite de rester dans une métaphore hermétique pour privilégier les sentiments entre les deux héros au sein d’une relation un peu en dehors du temps, loin des contingences matérielles et basée sur le non-dit voire l’ignorance de la réalité et le mensonge. Les scènes amoureuses sont d’ailleurs très bien conçues, ballet nocturne et aquatique dans cet environnement de bains publics très évocateur. Toute une galerie de gens gravite autour de ce lieu emblématique de la société japonaise ancienne sous l’autorité majestueuse du mont Fuji peint sur un mur, se transformant au gré des rapports du couple central. Cependant, aucune béatitude n’est ici de mise, le drame reprend vite ses droits, à l’image de la vraie vie ou rien n’est jamais définitif.
Le scénario nous réserve de jolis moments d’émotion et de rêveries entre deux détails plus terre à terre et révélateurs.
LA FEMME D’EAU est aussi un hymne à la nature, d’un enchantement visuel incontestable grâce à une photographie très travaillée sublimant le décor de ce Japon des campagnes. La pluie omniprésente offre des instantanés d’une esthétique incroyable : une camionette suivant un promeneur en parapluie devant une verdure luxuriante, une écolière traversant une rue ou seul le présentoir typique d’un coiffeur local ressort de la grisaille, autant de paysages subtils rappelant les visions poétiques des maîtres de l’animation Miyazaki (la forêt de TOTORO par exemple) ou Takahata (le merveilleux OMOIDE PORO PORO). La musique très inspirée accompagne parfaitement cette déambulation un peu mélancolique
L’interprétation de UA est très probante, sa silhouette gracile et son visage peu commun convenant parfaitement au rôle, alors que Tadanobu Asano assure encore une fois dans un nouveau rôle de marginal attachant mais aussi inquiétant.
Si Hidenori SUGIMORI cite Jean Renoir pour référence, il faudrait y rajouter son compatriote Hirokazu Koreeda : cette façon de filmer en prolongeant volontairement certaines séquences, l’utilisation de l’ellipse, la contemplativité de l’ensemble, et une thématique finalement assez proche quand on regarde par exemple MABOROSHI de Koreeda, plus ancré dans le réel et le social cependant. Comme son homologue, SUGIMORI privilégie l’émotion sans délaisser l’esthétique, pour un cinéma d’auteur inspiré et séduisant.
Domage, les plans de caméra et la réalisation globale est assez intéressante, la photo en philtre bleu constant donne un style assez particulier également.
Malheureusement, peu de dialogues viennent allonger le scénario déjà assez plat, on attend que quelque chose se passe dès les 10 premières minutes. Hélas il faudra attendre le générique pour comprendre que rien ne mérite notre attente, pas même la fin :/
Je suis déçu, je m'attendais tellement à mieux pour ce film que j'attendais avec impatience. Bah, tant pis, ça arrive de temps en temps.