Le fils de l'homme
Attendu comme le messie blanc après son premier coup de maître ("Rain Maker", tout simplement l'un des meilleurs films indonésiens de TOUS LES TEMPS), "Jermal" de Ravi Bharwanie en confirme malheureusement pas son exceptionnel talent. Plusieurs raisons à cela: la pression des principaux investisseurs pour ne surtout pas leur livrer une version aussi tordue, expérimentale et commercialement inexploitable, que son précédent "Rain Maker", la présence au générique des "Fonds Sud", généreux contributeurs pour des films d'auteur asiatiques, mais terribles castrateurs de vrais talents en imposant – plus ou moins directement – des formules éprouvées pour être certains de plaire dans un circuit festivalier mondial et la présence à la réalisation de deux coréalisateurs (Rayva Makarim & Utawa Tresno), qui ont très certainement empêché Ravi de faire tout ce qu'il aurait souhaité.
L'autre déception, c'est que "Jermal" évite soigneusement toute polémique autour du VRAI sujet du film: l'exploitation au travail de pêche d'enfants mineurs, fléau social, qui est toujours pratiqué de nos jours au large des côtes indonésiennes. Des enfants, logés dans des conditions extrêmement rudimentaires et qui sont exploités pour pêcher à longueur de journée le poisson. L'action se passe sur l'une de ces plateformes, les conditions primaires sont effectivement abordées, notamment par le biais du pauvre nouvel arrivant, souffre-douleur de toute l'équipée, mais sinon toute l'aventure ressemble davantage à une petite promenade en famille, où tout le monde passerait du bon temps sous les ordres d'un homme certes bourru, mais tellement sympa des les exploiter…
En n'y regardant pas de trop près, on se retrouve avec un petit film indépendant foncièrement sympathique, au lieu exotique et un cast de premier crû, sur fond d'histoire vue et revue (curieux, tous ces films indépendants, qui se sont intéressés à la difficile filiation ces dernières années après la vague de films de l'impossibilité d'exprimer l'amour en couple…), mais fort sympathique. Le parfait produit formaté de circuit festivalier, quoi – mais qui n'aura curieusement (et injustement) pas fait grandes vagues.
