Cat III made in Marseille
La vision qu’ont des chinois les auteurs marseillais (de naissance)
Yann et
Conrad m’a toujours emballé, cette sorte de mélange étonnamment digeste de racisme primaire et d’une certaine culture très renseignée – donc respectueuse – de cet étrange peuple qui sent l’huile. Franck White aurait sans peine pu scénariser cette grande histoire pleine de petites, dans lesquelles les tortures diverses et variées y sont pléthores, l’esprit de meute joyeusement moqué et l’érotisme souvent – toujours – évoqué crûment.
Alix, Alix, au pays des merveilles...
J’avais découvert ça jeunot dans le journal de BD
Spirou, qui eut tôt fait de stopper la chose en voyant le chemin provoc’ et gratuit choisi par les auteurs, clairement assimilable par chez nous à de la Catégorie III. Même si j’ai lu l’intégralité de cet ovni dans le désordre, j’ai toujours accroché à ces personnages, à l’humour de Yann, aux dessins de Conrad, qui sait user de traits enfantins pour raconter des sales histoires d’adultes. Toujours scandaleuses, blasphématoires et subversives mais jamais dénuées d’amour, d’honnêteté, de bon esprit. On n’est pas dans le cradouille nihiliste d’un
Polar extrême de
Jodo, les angles sont toujours arrondis par la bonhommie des personnages principaux, principalement le gros Mac et l’innocent Timm, complexes mais toujours justes. "Anarchiste bon enfant" aime d'ailleurs à se définir Mac, ce qu'est la BD, car à se faire mélanger ainsi autant de différences, qu'elle s'en moque ou qu'elle reste neutre sur ces particularités, elle ne fait, au bout du compte, que les prôner. Ce sont les différences qui alimentent le quotidien, l'inconnu qui titille la curiosité et... bon, bref.
Le tout se termine dans un grand n’importe quoi, le cycle US, où sont invoqués les fonds de tiroirs d’un imaginaire fatigué, plein de transsexuels, de nazis, de cannibales, de psychiatres pervers et de ruskofs extra-terrestres, qui interagissent tous dans un joyeux bordel.
En parlant de bordel, c’est d’ailleurs là l’objectif de Mac : retrouver sa femme Alix, sa p’tite fille Jade, puis s’en aller vivre, heureux, dans un bordel, à Hong-Kong. Une certaine idée du bonheur… que le destin retarde sans cesse mais que l'acceptation du chaos permet de retrouver épisodiquement. Un bonheur ephémère, donc décuplé. Le bordel. Etant donné que c'est le bordel tout le temps là-dedans, mettons que Mac gagne tout du long la mise.