Xavier Chanoine | 1.5 | Lorsque l'ennui dépasse les propos des cinéastes. |
Ordell Robbie | 2 | Un film à sketches médiocre |
Yann K | 3.75 | Six bonnes surprises, et quelques excellentes |
Dans l'ensemble, If you were me ne parvient jamais à captiver malgré ses divers thèmes abordés. Chose plutôt étonnante de la part d'un film à sketchs dont le principal but est de varier les genres et d'opposer plusieurs points de vue entre eux. On s'assoit autour d'une table pour poser les difficultés de la Corée face à la discrimination sociale ou physique et on s'endort gentiment.
The Weight of her est un segment potable, montrant la difficulté des femmes à s'insérer dans la société. On marche au physique, les étudiantes sont même pesées en classe et humiliées devant tout le monde par un professeur tyrannique et ridicule au possible. La fin particulièrement étrange finit par fatiguer, faute d'une narration particulièrement faible et d'une réalisation soporifique au possible. 2.5/5
The man with an affair est sans doute l'opus le plus inutile et incompréhensible. On s'ennuie ferme devant ce gamin qui sonne aux portes pour quémander du sel, galèrant à droite à gauche dans un univers abstrait fait de longs couloirs blanc cliniques particulièrement étouffants. Et ce n'est pas cette photographie argentée et ces idiogrammes gravés sur les murs qui me rassureront d'avantage, je me suis senti totalement perdu devant cet opus signé Jeong Jae-eun. Le néant. 0/5
Crossing propose un contenu qui sur le papier est intéressant (la condition des handicapés physiques et mentaux dans la société) mais qui se révèle au final être un bon gros pamphlet humoristique, incroyablement mal narré. Les petits dessins illustrant chaque séquence sont formellement justes, mais plombent plus le rythme qu'autre chose. Un drôle de regard porté sur les handicapés, quelques séquences amusantes, on est bien loin de la pure satire sociale. 1.5/5
Tongue tie demeure sans doute le segment le plus douloureux. Réalisé par Park Jin-Pyo, l'on se demande clairement l'intérêt de filmer une opération chirurgicale sur la langue d'un gamin. A part des pleurs contrastant drôlement avec les décors enfantins et un gros plan sur la langue du malheureux, que doit-on en tirer de tout cela? Simple délire de la part du cinéaste? Complaisance face à la douleur d'autrui? Quel intérêt? 0/5
Face value est une bouffée d'air frais, pas très intéressante dans le fond mais qui a le mérite d'être par moment touchante. Les séquences se déroulant dans le parking sont amusantes, le plan final beaucoup moins. Peut-être l'opus le plus accrocheur au niveau du visuel, doté d'une très bonne trame sonore.3/5
Mais la plus grosse déception de cet exécrable programme demeure sans aucun doute le segment réalisé par le grand Park Chan-Wook, NEPAL retraçant le parcours chaotique d'une femme laissant son Népal pour travailler en Corée du Sud. Malheureusement la barrière de la langue provoquera un revirement de situation improbable puisqu'elle sera prise pour folle, mettant alors en avant les limites de la communication du pays. Le sketch hésite beaucoup trop entre délires comiques (le médecin incapable de comprendre Chandra) et docu-fiction (l'intro et la conclusion au Népal), laissant une impression au final plus que mitigée. De plus la mise en scène subjective et les teintes monochromes agacent, Park Chan-Wook nous ayant habitué à mieux. Trop impersonnel pour paraître sincère malgré la démarche louable de pointer les limites de la communication.2/5
Déception.
Ce projet de film à sketches contre toutes les formes de discrimination en Corée a comme points forts son bon niveau formel d'ensemble ainsi que la grande diversité des genres, des parti pris formels et narratifs, diversité qui est aussi celle des formes de discrimination choisies par les cinéastes. Avec au final des sketches souffrant dans l'ensemble d'une trop grande lourdeur démonstrative mais aussi quelques bonnes surprises.
The Weight of her: Ce sketche signé Lim Soon Rye est bien monté et réalisé. Malheureusement, ses effets comiques tombent à plat et il est plombé par le caractère beaucoup trop lourd et démonstratif de sa dénonciation des discriminations à l'égard des femmes. On comprend qu'au vu de ce qu'est la condition féminine en Corée le cinéaste ait voulu frapper un grand coup. Mais reste qu'il frappe ici trop fort. 2/5
The Man with an affair: Ce sketch de Jeon Jae Eun dénonçant la discrimination à l'égard des gens qui ont un casier judiciaire non vierge a quelques idées de base intéréssantes: l'univers orwellien dépeint, l'ambiance clinique que crée la photographie. Mais il souffre de son caractère trop démonstratif qui finit par le rendre ennuyeux. Bien exécuté là encore. 1.5/5
Tongue Tie: Mieux filmé que Too Young to die, ce sketche signé Park Jin Pyo est plombé par sa trop grande lourdeur symbolique (décor et détails enfantins vs table d'opération) et formelle (sobriété au début vs filmage frontal et brouillon de l’opération en forme d’effet choc facile). 0.75/5
Crossing: Ce sketche réalisé par Yeo Kyun Dong souffre de la comparaison avec ce que Lee Chang Dong a pu faire du thème de la discrimination vis à vis des handicapés : son humour tombe à plat et même s’il est bien exécuté il peine à émouvoir du fait de l’absence de fil conducteur narratif fort. 2/5
Face Value : De tous les sketches, c’est celui qui prend le moins de risques au niveau formel et narratif mais le vétéran Park Kwang Soo finit malgré tout par émouvoir un peu à partir d'un thème moins fort que celui des autres courts, celui des discriminations dues aux apparences physiques et de classe sociale. Si un certain caractère démonstratif est toujours présent dans le sketche, il parait relativement léger comparé à celui présent dans les précédents. Cette histoire simple se laisse donc regarder sans ennui, c’est déjà ça de pris comparé à d’autres sketches dont les audaces n’atteignent pas vraiment leur cible. 2/5
NEPAL : Si son titre (Never Ending Peace And Love) est du niveau du comptoir, le sketche de Park Chan Wook se détache légèrement du lot. Partant d'une une histoire vraie d'une femme venue du Népal pour travailler dans une usine en Corée du Sud, le cinéaste réussit à évoquer la question de l’immigration en évitant manichéisme et lourdeur démonstrative. Si Park Chan Wook déroule une image monochrome eighties à à effet tape à l’œil, il cherche à apporter une certaine variété en multipliant les points de vue (caméra subjective, cadrage de près, filmage distant… ). Et le film étonne une fois de plus lorsqu’il finit par bifurquer sur la fin vers le documentaire. Au final, en téléscopant à une vitesse folle les points de vue (de mise en scène, des personnages avec sa multiplication d'interviews), le cinéaste finit par émouvoir tout en offrant matière à réflexion une fois le visionnage terminé. Sa limite: sa mise en scène n'est qu'idée, concept (le point de vue subjectif...). Travers d'un certains (mauvais) cinéma indépendant américain... .2.25/5
Au final, ce film à sketches révèle ce qui peut faire parfois du cinéma coréen un cinéma passionnant : s’il a une tendance un peu trop systématique à reprendre ce qui marche ailleurs sans se le réapproprier, il prend parfois beaucoup de risques dans ses choix quitte à peut etre se planter en beauté et finit par imposer un paysage cinématographique d’une grande diversité dans les genres abordés (meme si la manière de les aborder laisse souvent à désirer). Diversité et prise de risques qu'on retrouve ici.