Ordell Robbie | 2 | Lost Boys |
A défaut d'être grand, Helpless est emblématique. Emblématique du cinéma d'auteur japonais des années 90 d'abord. Il s'agit du premier film pour le cinéma d'un Aoyama Shinji qui se fera une petite gloire hors du Japon trois ans après avec Eureka. Et qui fut aussi assistant-réalisateur de Kurosawa Kiyoshi. Produit par la figure phare du cinéma d'auteur nippon de l'époque (Sento Takenori), le film comporte dans son casting un Asano Tadanobu n'ayant pas encore gagné l'envergure d'acteur qu'on lui connait désormais. L'ambition d'Aoyama est ici de peindre le portrait d'une génération ayant grandi avec le récession économique du Japon des années 90, une génération sans repères et dépolitisée. Thématique des "générations perdues" dont le cinéma d'auteur nippon n'eut d'ailleurs pas le monopole dans les années 90. Peu bavard, Helpless est un Aoyama se laissant regarder. Le sens du cadre de sa future fresque sépia y fait de plus déjà surface.
Sans qu'ils plombent le film autant que bien de ses futures réalisations, on y retrouve malheureusement aussi les travers du cinéaste. Soit une lenteur poseuse même si dans des proportions moindres qu'à venir, des tendances au surlignage thématique atténuées par le caractère peu bavard de cet opus inaugural, de la fausse audace (les intertitres indiquant les heures pour donner une sensation de temps réel) et surtout de l'influence trop souvent mal digérée. Certes, Aoyama ne recycle pas mal trop l'usage kitanien du hors champ et de l'ellipse lors des scènes violentes reflétant des personnages en marge, sans repères, pour qui la violence n'a pas de sens. Mais il est bien moins convaincant que Kitano dans ses ellipses narratives, le film finissant par s'y perdre. Un usage du son masquant les paroles sent l'héritage godardien transformé en procédé gadget. L'usage très décalé du score (procédé si années 90) ne fonctionne pas.
Pas dénué de promesses d'un bel avenir de cinéaste, Helpless contient malheureusement en germe ce qui les gâchera le plus souvent. A regarder juste pour se souvenir d'une époque...