Pas mal, pour un film de commande.
Je suis assez bon client du cinéma de Ishii Takashi. J'ai regardé "Gonin" un nombre incalculable de fois, j'aime "Black Angel" pour ses petites audaces formelles (et aussi parceque c'est un "Girls With Guns", j'avoue), et "Freeze Me" est un huis clos d'assez bonne facture.
Et puis si on regarde bien, mis à part "Shinjuku Triad Society"/"Rainy Dog"/"Blues Harp" de Miike, certains des premiers Kitano ("Violent Cop", "Sonatine") et "Gonin" de Ishii Takashi, le cinéma japonais n'a pas eu grand chose à offrir de bon en matière de polars noirs/films de yakuza, ces quinze dernières années.
Alors je ne pouvais que me réjouir de découvrir "Gonin 2".
Déjà, il faut préciser que ce n'est pas une suite du premier. De toute façon, il n'appelait pas à une suite. Le casting est donc différent, avec cette fois 5 femmes. Mais il y a également un personnage masculin, interprété par Ogata Ken, qui va se joindre aux filles au cours de l'histoire.
C'est du Ishii Takashi, donc c'est très sombre et assez violent par moments. A y réfléchir, c'est même celui qui contient le plus de violence "graphique", avec quelques gerbes de sang au programme. Et puis surtout, il y a ce côté "fun" (voire même "manga"), qui donne un charme supplémentaire à "Gonin 2". J'en veux pour preuve le personnage du tueur à gage, qui remplace Kitano et son accolyte du premier film, et qui a un look et des attitudes bien sympa. Sans oublier l'usage du sabre par "maître" Ogata en personne (discret hommage aux ninkyo de la grande époque ?).
Scénaristiquement, le film tente de se démarquer du premier "Gonin" en ne le copiant pas de bout en bout (en gardant tout de même l'idée de base), mais le tout se révèle moins efficace. La relation entre les différents personnages n'est pas aussi forte et moins bien développée. Et puis ça manque un peu de "grands moments", comme dans le premier, lorsque Shiina Kippei faisait irruption chez les yakuza après la mort de sa copine, où lorsque Motoki Masahiro faisait des tentatives de suicide.
Je dirais que ce second opus est moins désespéré, surtout au vu de la fin, qui montre les limites de liberté du réalisateur face à ses producteurs.
Reste que l'ensemble est correct, et devrait ravir la plupart de ceux qui ont aimés "Gonin" et l'ambiance que celui-ci dégageait.
A noter que la musique du générique ainsi que celles accompagnant certains passages forts, sont les mêmes que celles employées dans "Gonin".
pour tous ceux qui ont aimé GONIN vous pouvez y aller!
film noir jusqu'auboutiste comme le 1, un peu moins réussi à mon gout mais dans la meme veine: violent (à la limite du cat.3 dans certaines scènes), sombre, malsain et nihiliste.
les trois premiers quarts d'heures sont assez intenses et tendus mais comme le niveau ne baisse presque pas on finit par s'habituer et la deuxieme moitié y perd en efficacité, un peu dommage donc. reste que tous les amateurs de films de gangsters y trouveront leur compte.
et si vous n'avez pas vu GONIN 1, jetez vous dessus, c'est vraiment un film à voir!
L'Homme et Les Femmes, tous égaux devant la Vengeance ! (ou le Film Maudit d'un Grand Cinéaste)
1996 ; Devant l'énorme carton du choc
Gonin, Ishii est quasiment en odeur de sainteté à la
Shochiku. Kazuyoshi Okuyama, vice-président de la compagnie (sorte de Joel Silver nippon), demande à l'auteur-réalisateur de signer un
Gonin 2. L'original n'appellant pas du tout à suite, Ishii décide tout d'abord d'en écrire une préquelle consacrée au personnage d'Hizu joué par Jinpachi Nezu (tous les circonstences qui le méneront à la prison, à la drogue et au divorce), mais finalement, il souhaite faire un film sur, dit-il, "
la trajéctoire d'une balle qui toucherait n'importe qui". En gros, l'histoire d'une sanglante fusillade du point-de-vue de cinq personnes... Mais les producteurs, Okuyama en tête, effrayés par la teneur "expérimentale" du projet titré "
Left Alone" (en gros, du Iñarritu avant l'heure), lui ordonne un copié-collé de l'original, mais au féminin.
Ishii n'a pas dit son dernier mot et écrit entretemps "
Rampaged" où l'érrance d'un simple quidam qui recherche les meurtriers de sa femme lors d'une sanglante et longue nuit. D'un projet de film entier, finalement, Ishii se résout à en faire une sous-intrigue qui pose le contèxte du grand projet des producteurs, à savoir refaire
Gonin, mais avec des femmes à la place. Si les femmes chez Ishii ont une forte importance (
Rouge Vertige,
Péché Originel,
A Night in Nude,
Red Flash et
Seule dans la Nuit), dans
Gonin 2, elle deviennent presque des caricatures (traitresses, femmes fatales, etc...). L'intérêt demeure dans le casting de fidèles ; entre Shinobu Ôtake (Nami dans
Péché Originel) en prostituée déguisée en étudiante, Kimiko Yô (Nami dans
Les Orchidées du Clair de Lune et dans
A Night in Nude) en mystérieuse braqueuse (sorte de version féminine du
Parker de Richard Stark), Yui Natsukawa (Nami dans
Seule dans la Nuit) reprennant la figure tragique de femme violée dans son film précédent, mais aussi Shingo Tsurumi (autre fidèle d'Ishii) en tueur tout droit sorti d'un Post-Nuke, Reiko Katoaka (la pianiste dans
Onibi le Démon, qu'on verra plus tard dans les 2
Black Angel) en braqueuse toute de cuir vétue trahie par son amant, Yumi Takigawa (inoubliable nonne dans
Le Couvent de la Bête Sacrée) en épouse sacrifiée et fantôme silencieuse, Mai Kitajima (future Nami dans
The Brutal Hopelessness of Love) en traitesse rongé par les remords... mais le meilleur personnage étant bien sur Ken Ogata, qui brille de mille feux dans son rôle de mari aimant, d'impitoyable vengeur et de "grand frère" protecteur. On sent que l'idée de base d'Ishii est bien cette traversée des enfers d'un pauvre homme vaincu par la violence des Autres, mais qui appliquera une revanche implacable dans les règles de la Loi du Talion.
ATTENTION SPOILERS !!!
Si le film suinte à fond le projet maudit par les producteurs, il reste néanmoins des moments de grâce portant incontestablement la marque du cinéaste ; la mort inattendue de Shinobu Ôtake (rappellant celles de Janet Leigh dans
Psychose, Julianne Moore dans
Les Fils de l'Homme, William Petersen dans
Police Fédérale Los Angeles, Anthony Wong dans
Infernal Affairs, et Robert de Niro dans
15 Minutes), celle tout aussi inattendue qu'éfficace de Reiko Kataoka lors d'une scène d'acalmie, toute la partie consacrée au personnage d'Ogata...
FIN DES SPOILERS
Il est d'autant plus regrêttable que les personnages crées pour Naoto Takenaka (en simple homme d'affaires qui voulait mettre son argent en banque et traquera les filles. Au final, il fer aun sympathique caméo en vendeur de pistolet éléctrifié), Masahiro Motoki (en tueur à gages mélancolique) et Jinpachi Nezu (en flic compréhesif et amoureux) aient été sacrfiés lors de la pré-production et que l'épilogue, plus réalisé pour le plaisir fétichise, soit quand même tourné contraint et forcé (pour Ishii, le film s'arrête sur le freeze-frame qui conclue le gunfight final)...
Un semi-remake, étrangement meilleur, sera le
Venganza (
Solo quiero Caminar) d'Agustin Diaz Yanes (les femmes dedans sont de vraies femmes et on retrouve la figure purement ishiienne de l'anti-héros mélancolique qui se dresse contre son propre clan pour proteger un amour impossible, mais sincère et salvateur) qui demeure plus Ishiien que le film malade d'origine. Un film malade dans la carrière d'un grand cinéaste qui contient néanmoins de bien beaux restes...
Et n'est-ce pas le propre d'un grand cinéaste que d'avoir au moins un film avorté, maudit ou même raté (le cas de
Flower & Snake 2) dans sa filmographie ?