Arno Ching-wan | 3 | Ghost in the Shell Réminiscence(s) |
Astec | 3.75 | L'affaire est dans le SAC ! |
Ordell Robbie | 2.5 | Version Musée Grévin du chef d'oeuvre d'OSHII. |
Autant il est parfois arrivé à la série de recycler des éléments des métrages de Mamoru Oshii sans que cela gêne vraiment, autant là l’hommage plus qu’appuyé fait à ces derniers donne plus l’impression d’assister à un étrange remake télévisuel qu’à une prolongation du show. Pourtant très attendue.
Le scénario fait se croiser dans sa trame les deux éléments forts et constitutifs des films que sont 1 – les errances de Batu une fois disparue sa chère et tendre Motoko, et 2 - l’intégralité du final du premier film, à savoir une Motoko, par terre, à côté d’un pantin désarticulé, qui s'en ira ensuite s’évader dans la « vaste toile du réseau ». Dans le désordre. L’ensemble crée un ressort dramatique particulièrement moisi. Le reste ne relève malheureusement guère le niveau : les quelques (rares) scènes d’actions sont platement réalisées, très statiques, peu imaginatives dans leur traitement, tandis qu’à la BO Yoko Kanno fait du Yoko Kanno au style à ce point institutionnalisé qu'il tend désormais vers une certaine sonorité routinière. La routine tuant le couple, le couple, raide, tombe et le couperet tombe : c’est la déception.
On s’attendait à une chouette série B, on se retrouve avec un Kenji Kamiyama voulant côtoyer Oshii l’espace d’un téléfilm n’ayant ni les moyens de ses ambitions, ni l’envie de faire dans le bourrin décomplexé, ni, surtout, de thématique nouvelle à apporter à la saga. « Solid… » est une sorte de cross-over impossible entre la progression scénaristique d’Oshii et celle suivie par une série qui, elle, pourra s’en défendre en parlant de la base commune que fut la BD de Shirow. Il n'empêche, la redondance fait qu'on aurait préféré une ellipse permettant de passer à autre chose, un autre chose qui aurait pu, à la rigueur, se servir épisodiquement de ce SSS pour y piocher des flashbacks constructifs. On se consolera avec les quelques points positifs : l’agent Togusa gagne en développement, le scénario - autour des redites - n’est pas mal du tout, le character design signé Takayuki Goto et Tetsuya Nishio (Jin-Roh) est excellent, une scène de sniper est à sauver... et à l’arrivée ce gros épisode se laisse même bien voir. Mais on en attendait tellement plus. Trop ? Non pas, revoyez la construction d’un épisode tel que le très ample « Another chance » (2ng Gig, Ep. 16) pour être convaincus que les talents étaient bel et bien à même de pondre une OAV dantesque. Mettons que cette transition, plus ou moins obligée, débouchera sur une saison 3(*) qui pourra joyeusement aller de l’avant. Ou se ramasser. A moins qu’en lieu et place de transition, il s’agisse là d’une conclusion en forme de courbette finale vis à vis de Shirow et d'Oshii, illustres prédécesseurs desquels il faudrait s’affranchir une bonne fois pour toutes. Mais peut être aussi avons-nous fait le tour de l’univers GITS, auquel cas lui dire au revoir ainsi qu’à tous ses personnages ne serait pas forcément une si vilaine chose. A méditer...
(*) Ou 4 si, et c'est la mode, cette OAV fait office de saison 3 à elle toute seule.
GITS : SAC 2nd GIG prolongeait de façon magistrale une première saison déjà brillante. Mais en se terminant sur une fin qui suscitait autant de questions qu’elle nous livrait de réponses, une suite semblait s’imposer d’elle-même. Avec Solid State Society, c’est donc une conclusion sous forme de véritable bouquet final que s’offre la « franchise » phare de Production IG : un « super » épisode qui sans épuiser les possibilités de l’univers GITS, va au bout de ses intentions narratives. Avec cet OAV de prestige produit pour un budget équivalent à celui d'un long métrage d'animation au Japon ( 3 millions de dollars), Production IG propose un volet final qui doit autant à l'intelligence du réalisateur qu'à la qualité de l'oeuvre originale.
Une intrigue qui part sur les chapeaux de roues, un hacker de génie aux objectifs plus que troubles, une Section 9 mobilisée, louvoyant entre manipulations et jeux de pouvoir, et un Major jouant les « barbouzes » de service…, tous les ingrédients d’un « ride » réussis sont réunis dans GITS SAC SSS. Les amateurs d’intrigues touffues et de scènes d’action efficaces ne risquent pas d’être déçus. SSS tient ainsi pas mal de ses promesses comme divertissement de qualité et le budget ne semble pas avoir été gaspillé. Mais plus qu’un final particulièrement bien achalandé, cette dernière incursion du réalisateur Kenji KAMIYAMA dans l’univers créé par Masamune SHIROW, lui permet surtout d’aller au fond des pistes narratives disséminées dans les séries, en s’attardant en premier lieu sur les relations entre les personnages principaux.
Plus que tout autre, c’est Batô qui catalyse les enjeux dramatiques de cet OAV. Pris entre sa fidélité pour la Section 9 et ses sentiments envers le Major, il devient l'exemple même d’un amour solitaire. Avec lui, la complexité du récit se réduit à une question simple : choix d’amour ou de raison, où va sa loyauté ? Si le « triangle » Motoko/Batô/Section 9 a toujours affleuré, que ce soit dans les mangas ou dans les films de Mamoru OSHII, c’est bien Kenji KAMIYAMA qui l’a le plus exploré. Ici, KAMIYAMA laisse derrière lui son laborieux travail de citations et poussé par la dynamique même de l'univers de la série, il se risque dans un registre peu exploré par l'oeuvre originale et ses adaptations cinéma. Sur cette question comme beaucoup d'autres, les propos du réalisateur à la fin de la deuxième saison de la série, GITS - SAC 2nd GIG, ne laissent pas planer le doute : « Pendant ces dernières années, alors que je travaillais sur les séries SAC, j'ai essayé de cesser de discuter avec Oshii.(...) Le résultat en a été que le GITS de Oshii, y compris Innocence, n'avait plus d'humains en lui, alors que mon GITS SAC traitait définitivement d'humanité.» Le dernier plan de Solid State Society qui ancre sans ambigüité les personnages dans leur dimension humaine justifie presqu'à lui seul la mise en chantier de cette production par son caractère inédit dans l'univers GITS.
Il y aurait encore beaucoup à dire sur SSS, sur les personnages, sur ses problématiques d’actualité (le nationalisme, le racisme…), sur la manière dont a été produite l’animation, sur les rapports au manga GITS 1.5 auquel l'intrigue doit énormément... SSS n'est sans doute pas l'anime parfait, mais il mérite assurément d'être vu.