Mémoire d'outre-tombe
Dans la foulée de l'incroyable succès de la première aventure de "Jaka Sembung", le réalisateur Sisworo Gautama Putra a la bonne idée de donner vie à une légende folklorique très connue, celle de "Sundelbolong" ou "Le fantôme avec le trou (dans le dos)". Une légende urbaine passée de génération en génération, qui raconte comment une femme violée et tuée par des vils hommes va revenir d'entre les morts pour se venger de sa mort injuste.
L'histoire remise au goût du jour, il est presque curieux de voir Barry Prima et la reine du film d'horreur indonésien Suzzanna dans le cadre contemporain des swingin' seventies s'achevant, tout de pattes d'eph vêtus…Une fois le cadre posé, on attend donc avec fébrilité l'histoire de vengeance annoncée – sauf que Putra opte pour une approche bien plus sérieuse, que la plupart des productions de l'époque.
"Sundelbolong" se pose loin des délires kitschissimes de l'époque et tient davantage du film d'horreur intelligent, en prenant le temps de développer ses personnages, de les montrer au quotidien pour les inscrire dans une ambiance plus réaliste et faire davantage "claquer" les scènes d'horreur. Le viol et – surtout – l'avortement ratée sont du coup deux moments assez éprouvants, car extrêmement crues et réalistes dans leur description…Et les mises à mort des différents bourreaux sont également pour la plupart exécutées dans la parfaite tradition d'un pur "revenge movie", plutôt que comme des films d'horreur grand-guignolesques.
Il est d'ailleurs d'autant plus dommage, que Putra se sente tout de même obligé de rajouter quelques moments grossièrement comiques, sans aucun doute pour alléger quelque peu l'ambiance poisseuse, de peur d'effrayer le grand public.
Un film mature, sans doute pas assez sanguinolent pour les aficionados du pur film d'horreur, ni assez sérieux pour les adeptes des films psychologiques plus cérébraux à la "Rosemarie's Baby", mais qui constitue néanmoins une bien belle adaptation de la célèbre légende urbaine. Et les plus patients seront récompensés par la curieuse introduction d'un fantôme "Penanggalan" (une tête volante aux entrailles pendantes, qui dévore ses victimes) en toute fin du film.
