Été japonais : double suicide est comme souvent avec Oshima, voir presque toujours, un grand film de composition du cadre. Pour éviter de laisser le spectateur trop sur la touche, le cinéaste découpe son film en trois parties, aussi bien sur le plan formel que narratif : ainsi le film débute en extérieur, sur une immense route déserte située en pleine ville, vient ensuite pour un bon bout de temps le huit-clos, pour finir de nouveau en plein air, lieu paisible transformé pour l’occasion en territoire de guérilla. Un Oshima qui prend les armes ? On est en plein dedans. Même enfermé, cet été japonais plutôt sulfureux dégage une impression de liberté assez sidérante. Ici, tout le monde est personne. Personnages sans intérêts, incapables (de faire l’amour à une qui n’attend que ça, ou d’appuyer sur la gâchette), courageux, lâches. Tout le monde, mais personne. Un paradoxe plutôt intéressant surtout qu’Oshima met en scène des soi-disant yakuzas. Une liberté que l’on retrouve dans son premier tiers aéré où l’on y voit un défilé de jeunes –censés représenter, en quelque sorte, l’avenir du pays – ressemblant plus à des machines dressées à la baguette qu’à des étudiants contestataires qui pourraient prendre les armes. La jeune femme, dérangée sur le plan sexuel, s’en étonnera.
En étudiant au microscope les êtres reclus au fond d’un trou, avant de faire parler la poudre, Oshima expose sa fascination pour toutes les formes d’obsessions en société. Le personnage de Nejiko éprouve une véritable obsession pour le sexe (elle fera d’ailleurs l’amour en fin de métrage, sous une pluie de balles), « l’homme » (Sato Kei) pour la mort et un des plus jeunes pour les armes. Pour faire simple, l’amour, la violence et la mort (tout ce qui se rapporte également de près ou de loin aux pulsions) s’entremêlent pour aboutir à un résultat shamanique digne des œuvres fortes que l’on peut attendre d’Oshima, celles en marge de la production habituelle, ces productions ATG ou Sozosha qui ont ce quelque chose d’électrisant, gênant, mais fascinant. Pourtant, cet été japonais est loin d’être l’un de ses plus accessibles. On y distingue toujours ce sentiment d’irréalité (pourtant, l’histoire, les personnages, les faits sont tous ancrés dans une certaine réalité sociale) par ces instants figés, sourds, tandis que les voix des protagonistes sont parfaitement audibles. Et que vient faire cette route déserte, en pleine ville ? Pourquoi les forces armées sont-elles invisibles ? Là est aussi l’une des interrogations du film : contre qui/quoi se battent ces marginaux d’un temps ? Oshima, seul contre tous ? Son cinéma, seul contre le Japon ?
Années 1960. C'est l'histoire d'une fille aux mensurations (qu'elle nous fournit avec fierté) et à la coiffure assez rares au pays du Soleil Levant. Elle veut faire l'amour avec son copain mais se retrouve sequestrée par une bande de yakuzas qui préparent une guerre chimérique contre on ne sait qui. Chacun poursuit ses obsessions (sexe, mort, guerre) sans parvenir à les satisfaire dans un huis clos qui ne s'éclairera qu'à la conclusion du film. Magnifique photographie Noir et blanc et cadres soignés dans ce film très oshimien à la contemplation duquel, pour ma part, j'ai péri d'ennui. Pose affectée de l'ensemble, confusion extrême du propos : le cinéma n'est guère attrayant quand il se réduit à des marionnettes ânonnant un texte qui leur est inintelligible.