Ordell Robbie | 4 | Seuls les anges ont des ailes |
Qu'est-ce qui ne fonctionne pas dans La Cigogne en papier? Une bande-son d'époque recouverte par la voix d'un benshi de la partie musicale de laquelle le film aurait pu se passer. Car ce score classique se serait mieux marié au mélodrame hollywoodien de base qu'au cinéma de Mizoguchi, son usage étant bien loin de la délicate élégance de ce dernier. Mais aussi quelques mouvements de caméra brouillons montrant que le cinéaste n'est pas encore nanti de cette précision maniaque de mise en scène des films de la gloire occidentale fifties. Pour le reste, La Cigogne en papier démontre que les bases des splendeurs futures du cinéma de Mizoguchi étaient déjà en place lorsqu'il était cinéaste muet. Meme si certains mouvements de caméra énergiques tranchent avec la tournure stylistique prise au fur et à mesure que sa carrière avançait, on retrouve ici son sens aussi évident qu'unique du cadre et sa lumière très particulière (de meme intensité en extérieur et en intérieur). Chose rare dans la filmographie du cinéaste: Mizoguchi use ici parcimonieusement du gros plan, mais pas pour susciter l'identification avec Osen. Il s'agit de faire comprendre la situation du personnage dans la gare, son ignorance fière de la foule. Osen est ici déjà la parfaite héroine mizoguchienne, une femme digne malgré les pires humiliations, un etre etant pret à la chute et au sacrifice pour la réussite d'un homme. Du taillé sur mesure pour le mélodrame de haut vol. Et le tout emballé par une narration en flash backs ouvrant avec brio la voie à un final poignant. Pas encore grandiose, déjà grand.