Kwak Kyung-Taek confirme
Après le succès historique de Friend, Kwak Kyung-Taek était attendu au tournant: futur grand cinéaste ou simple faiseur doué? Champion vient de sortir en dvd et répond à cette question...
Le choix de Kwak Kyung-Taek de retracer la vie du boxeur Kim Deuk-Goo est assez audacieux vu qu'à l'instar d'un Titanic, le déroulement du film est connu à l'avance par la population coréenne. D'ailleurs, par un malheureux hasard du calendrier, la semi-victoire de l'équipe coréenne de foot à la world cup 2002 est sûrement pour quelque chose dans les résultats modestes du film au box-office local, les gens n'ayant sûrement pas à coeur de se voir rappeler une tragédie qui a marqué les esprits alors que le sentiment national était à son pic. Mais ce semi-échec commercial est tout relatif car il confirme la volonté de Kwak Kyung-Taek de n'avoir pas justement "héroïsé" son film et c'est là la qualité numéro de ce métrage, à savoir raconter une histoire le plus simplement du monde et en toute modestie. Ca paraît évident d'un premier abord mais aujourd'hui, il n'y a presque plus de cinéastes qui savent s'effacer devant leur script et leurs personnages pour laisser leur talent se diffuser insidieusement à l'écran en dehors du cercle des cinéastes-auteurs (dont Kwak Kyung-Taek ne fait pas partie). Et cette prise de position s'accorde bien au personnage de Kim Deuk-Goo qui évolue en toute simplicité au cours du film. Dans cette optique et contre toutes attentes, le film ne s'attarde jamais sur les combats qui d'un point de vue objectif ne représente qu'une faible partie de la vie d'un boxeur et ça Kwak Kyung-Taek le montre bien en s'attardant sur le club de boxe, les amis et la fiancée de Kim Deuk-Goo. En celà, Champion se rapproche avec bonheur de la démarche de Stallone lorsqu'il écrivit le premier Rocky en évitant de calquer sur ses suites indigestes.
La bonne idée esthétique du film est de baigner l'ensemble dans une photographie très jaune ocre, justement proche des photos jaunies pour renforcer l'impression de passé et ceux que la volonté parfois spectaculaire de Friend rebutait apprécieront l'économie de moyens adoptée par Kwak Kyung-Taek: hormis une courte scène un peu trop emphatique et déplacé lors d'un bagarre dans une boîte de nuit, la réalisation fait preuve d'ingéniosité pour contourner les sommets dramatiques du scénario (la façon dont il aborde la mort de Kim Deuk-Goo est exemplaire). Mais évidemment, ça ne saurait être un bon film sans acteur capable de porter tout ça sur ses épaules et Yoo Oh-Sung était l'acteur parfait pour incarner ce rôle(mettez Jung Woo-Sung à la place et le film aurait été totalement différent): pas vraiment beau mais détenant un fort charisme, renforcé d'un côté par son côté maladroit et direct, de l'autre par la force à l'écran que cet acteur peut dégager(cf. Friend, Beat). Mais aussi, la bonne surprise c'est de voir Jeong Du-Hong obtenir un vrai rôle à part entière où il s'en sort avec honneur et prouve qu'il peut devenir un acteur-clé des futures productions coréennes à venir en dehors de ses capacités déjà existantes de chorégraphe/directeur d'action. Avec Champion, Kwak Kyung-Taek entre définitivement dans la cour des cinéastes-phares coréens, déjà composés de personnalités aussi diverses que Park Chan-Wook, Kim Ki-Duk et Lee Chang-Dong. Mon seul bémol serait les conditions visionnages désatreuses dues à la qualité médiocre des sous-titres et qui plombent accidentellement la force émotionelle du film mais que celà ne vous empêche pas de passer à côté, vous rateriez une belle tranche de cinéma.
23 novembre 2002
par
Alain
D'une grande honnêteté à défaut d'être aussi touchant qu'espéré
De même que
Friend,
Champion bénéficie d'une qualité finalement assez rare dans le cinéma moderne: une honnêteté cinématographique de tous les instants. Jamais le film ne donne l'impression de jouer la carte du compromis commercial, de la scène calibrée, du personnage secondaire stéréotypé, du produit de grande consommation. Avec son image un peu vieillote, sa bande son pas vraiment tonitruante, le film n'a pas les apparats du blockbuster moyen. Et le film ne confirme tout du long, avec des personnages paradoxalement un peu trop réalistes, des situations manquant de spectaculaire. Le réalisme du film est à la fois sa plus grande qualité et quelque part son seul défaut.
Champion ne s'envole jamais, ne prend jamais le spectateur au corps alors que l'histoire en théorie s'y prettait un peu. Il n'y a pas à proprement parler de faute de goût, l'interprétation de Yu Oh-sung est excellente, la mise en scène est soignée, la musique et la photo sont dans le ton.
Champion est tout simplement un très bon film auquel il manque un peu de passion pour en exacerber la conclusion au potentiel dramatique ici sous exploité.
Champion confirme donc l'honnêteté et le sérieux de Kwak Kyung-taek, réalisateur auquel il ne manque plus grand chose pour devenir un incontournable en Corée. A une époque où le formatage des blockbusters sévit partout sur la planète,
Champion, s'il n'est pas un grand film de boxe comme Scorcese ou Mann ont pu nous en offrir, est un vrai bon film de cinéma qui peut se regarder à nouveau avec le même plaisir de voir du travail bien fait.
Plaisant mais sans grande dimension
Un film relatant la vie d’un champion de boxe ? Pourquoi pas, mais vu que Raging Bull et Ali sont déjà passés par là, il faut voir… D’ailleurs, même si les 3 premiers quarts de Champion sont assez plaisants, on se demande bien ce qui a pu pousser Kwak à se pencher sur le destin de ce sportif certes champion d’Asie-Pacifique de boxe catégorie poids légers, si ce n’est ressusciter une vieille gloire coréenne pour flatter son ego patriotique : pas vraiment charismatique, un parcours plutôt classique de gosse pauvre des campagnes qui n’avait « que les poings pour s’en sortir » comme tant d’autres, Kim Deuk a gravi un à un les échelons grâce à son entêtement malgré son arrivée à la boxe sur le tard. Kwak choisit de s’intéresser principalement à l’homme, en laissant un peu de côté le boxeur, son entraînement et ses combats. Mais l’homme Kim Deuk n’est pas franchement passionnant. Heureusement, le dernier quart du film se fait plus grave et justifie enfin l’existence de ce dernier en tant qu’hommage à un sportif courageux qui est allé au bout de lui-même sans penser aux conséquences ; il était temps...
Fugace instant magique
Un bus gravit une côte. A l’intérieur, une jolie jeune fille qui ne sait pas que son destin va être bouleversé à ce moment précis. En effet, sur le trottoir, un jeune homme en survêtement poursuit le bus en faisant des grands signes et en montrant une inscription sur son dos : «
Kim Deuk ! C’est moi, Kim Deuk, le champion de boxe ! Tu te souviens de moi ? »
Second round correct mais décevant
Petite mise au point. Champion confirme le talent de cinéaste classique de Kwak Kyung Taek entrevu dans Friend. Malgré tout, il représente une certaine déception.
Champion contient encore quelques idées narratives et de mise en scène intéréssantes. Après un combat de Las Vegas filmé de façon clippeuse, l’exposition post-générique de Champion est une réussite. Plan large de la mer qui prendra toute son importance au cours de la seconde partie du film. Et ensuite on voit un jeune enfant quitter une cabane d’apparence pauvre puis demander avec succès à une conductrice de bus de monter sans payer puis de façon très cocasse le même dans la même situation une décennie plus tard et cette fois-çi refusé. L’attachement aux parties pauvres de la cote maritime coréenne comme le désir de quitter malgré tout ces lieux et ce qu’ils représentent sont immédiatement posés. C’est le fait de se concentrer sur cet itinéraire plutôt que sur les scènes de combat qui fait l’originalité du dispositif narratif du film. Les scènes de combat du film sont d’ailleurs très brèves car elles ont un enjeu dans l’ascension sportive de Kim Duk-koo mais pas d’enjeu psychologique. Le seul combat un peu étiré sera le combat final à Las Vegas car le boxeur y affronte Ray Boom Boom Mancini, un boxeur à la stature physique identique, dans un combat en forme d’aboutissement de l’idée de lutte contre soi-même qui sous-tend le film. Une belle digression a également lieu lors du discours public de Kim Duk-koo où il évoque son attachement à ses origines populaires et à sa cote maritime native qui débouche sur un flash-back où on le retrouve jeune et risée de ses camarades. Cet aspect se retrouve dans un combat final qui digresse de façon superbe avec son long travelling survolant le ciel de Las Vegas pour se poser sur la cote coréenne et se terminer sur un plan du boxeur enfant. Parmi les scènes fortes, on a également la ballade sur la plage dont le score et l’ampleur sont un modèle de classicisme ainsi que les scènes d’entraînement filmées avec d’amples travellings se frayant un passage à travers la salle. Quant à la photo légèrement orangée du film, elle semble faire écho au sable et à l’ensoleillement intense de la région native du héros.
Parmi les défauts du film , on a le filmage clippeux de la scène de dérive nocturne, l’utilisation confuse de la caméra portée lors des extraits de combats là où un Scorcese et un Mann savaient styliser sans nuire à la visibilité des combats, une utilisation parfois lourde du son pour appuyer certains moments du combat, l’ouverture clippeuse déjà mentionnée. Et enfin une musique plombant certains moments de la première partie du film : le score de sous-Joe Jackson des premiers pas urbains du héros, le générique très dessin animé de super héros qui sabote le potentiel lyrique de la scène où le boxeur court après le bus de celle qu’il aime, une scène d’entrainement du boxeur seul qui sent le Scorcese mal digéré. Mais ce ne sont pas ces défauts-là qui empêchent le film d’égaler le touchant Friend. Le précédent Kwak Kyung Taek tirait en effet sa force de la longue période historique sur laquelle s’étendait l’amitié décrite. Dès lors, le découpage en périodes bien distinctes donnait à un récit ordinaire l’ampleur d’une saga mafieuse avec les fortes évolutions des personnages que cela implique. Ici, la carrière sportive trop courte du personnage ne permet pas ce type de changement, ce qui a pour défaut d’amoindrir fortement l’impact du choix narratif pourtant original de se concentrer sur la vie intime du boxeur. La fidélité littérale aux évènements qui était déjà une limite de son opus précédent gâche encore plus ici le potentiel du sujet traité.
Le talent de Kwak Kyung Taek ne s’est pas éteint. Il s’est simplement dilué dans un sujet amplifiant les limites déjà entrevues dans Friend. Depuis, Kwak Kyung Taek a continué à décevoir avec un Mutt Boy juste moyen.
moyen
ce n'est pas un film de boxe, c'est un film sur la vie d'un boxeur, mélangeant boxe, romance, drame et touche de comédie.
dans l'ensemble c'est pas mal mais un peu mou. on aurait été en droit d'attendre plus de combats, et ceux ci plus satisfaisants. pour la baston à tout crin il faudra repasser. le film passe bien mais manque d'accroche, on s'ennuie gentiment au bout d'un moment, certaines scènes cassant la tension et l'attention.
côté visuel, l'image est léchée (Corée oblige), la réalisation est travaillée mais assez impersonnelle, voire malheureuse dans certaines tentatives qui plombent l'efficacité de l'ensemble. néanmoins ce n'est pas fait sans minutie. beau résultat.
au final on obtient un film de boxe passé à la moulinette coréenne, le traitement étant typique. je lui reprocherai son côté lisse, "le cul entre deux chaises" (ce qui aurait pu être mieux géré), et son manque de dynamisme. CHAMPION offre quand meme de beaux moments, légers ou plus graves, mais ne m'a comblé en tant que spectateur.
This is a LIFE and DEATH match!
Ce film est a classé parmis les chefs d'oeuvre du 7eme art!
Pas besoin d'etre un amateur du noble art pour apprécié ce film,car avant tout d'etre un film sur la carrière d'un boxeur,c'est un film retraçant la vie d'un homme ordinaire,issu d'une famille "pauvre"(car comme il le dit si bien,bien que sa famille soit la plus pauvre de son village,il N'EST PAS PAUVRE!),dont la boxe sera un tournant majeur dans sa vie,et ce dans plusieurs cas(amitié,vie amoureuse,argent...).
Les acteurs sont superbes,avec une mention spécial pour YOO OH-SUNG bien sur.Il est tout bonnement impérial,avec un jeu tout en nuance(il ne tombera jamais dans la caricature),jouant parfaitement cet etre un peu timide,mais sur de ce qu'il veut:accéder au titre du champion du monde!
La réalisation ne sombre pas un seul instant dans le déjà vu:les combats ne sont jamais montrés en entier,soit on en voit la fin,ou alors le début.Ce parti pris du réalisateur est a salué,car il n'a a aucun moment voulu faire dans le spectaculaire(bien que le peu de combats que l'on voit reste incroyablement bien fait!),en essayant de refaire un ROCKY(avec ses interminables combats),ou alors d'essayer de faire un combat qui soit classé le plus stupéfiant.Il a tout simplement évoqué la vie de KIM DEUK GU,et ce avec beaucoup de pudeur,puisque les combats ne sont jamais l'atout principal de ce film.
Avec cela,on voit a quel point KWAK KYUN-TAEK a voulu rendre un vrai hommage a l'homme qui marqua la corée en meme temps que le monde de la boxe(depuis sa mort,un match de boxe se déroule en 12rounds,et non plus en 15rounds).Alors que d'autre réalisateur ce serait servi de cette légende pour faire un film qui se voudrait avant tout spectaculaire.
KWAK KYUNG-TAEK est vraiment un grand réalisateur,il n'y a qu'a voir ses idées de mise en scène,avec en tete le dernier match,où ila décidé de ne pas montré la fin du combat!Il fallait oser!Mais là où l'on croit que l'effet serait de mauvaise augure,c'est l'effet inverse qui se produit!Je n'en dis pas plus,a vous de voir cette superbe transition.Puis il y a aussi,cette scéne où la femme de KIM DEUK-GU,vient a l'aéroport pour lui dire au revoir:on voit KIM partir tout en regardant sa femme,puis un mur les sépare,s'ensuit un fondu au noir,ayant pour but de souligner la dernière vision de sa femme!
Voilà j'arrete là les effets de mise en scene,a vous de les découvrir!
Ce film est un pur chef d'oeuvre!
superbe film
quelle superbe film "champion". tout est superbement réalisé, les combats de boxe(memes s'il y en a pas des masses) sont tes bien chorégraphiés. une interprétation magistrale (je connais pas les acteurs coréens, en tout cas celui qui tiens le role du champion d'asie nous livre une performence haut de gamme) du boxeur coréen. ne croyez pas que les combats sont le principal atout du film, non, "champion " est un film plein d'images fortes , grandiose, il faut pas etre spécialement fan de ciné asiatique pour voir ce film, ce film est une réussite sur toute la ligne.
Kwak Kyung-taek champion par ko
Kwak Kyung-taek est decidement tres bon et même le meuilleur réalisateur coreen pour moi. Le sujet du film est difficile a traité car ce genre de film a deja ete fais maintes fois et surtout tres bien comme Rocky ou Ali mais kwak kyung-taek manie la camera comme personne et nous offre une mise en scene de toute beauté. Contrairement au autre films de boxe on ne vois jamais un combat en entier dans le film. Au debut ça peut derouter et paraitre frustrant mais par la suite ça se montre diablement efficace et prend toute son ampleur a la fin dans un plan de toute beauté, avec un final superbe. L'interprétation de Yoo Oh-sung est sans faille et il confirme tout le bien que je pensais de lui dans friend. Concernant les combats car c'est quand même un film sur la boxe et bien il rivalise avec la puissance de ceux de ragging bull. Voila donc un bien bon film avec une realisation et une interpretation de taille !
Kwak Kyung Taek: un auteur ignoré en Françe ,pourtant...
Champion narre l’histoire véridique et tragique du champion de boxe sud-coréen Kim Daek Gu qui, après un parcours foudroyant, trouvera la mort à la suite de son combat contre le mythique champion américain Ray « Boom-Boom » Mancini.
Champion est aussi le second film du réalisateur Kwak Kyung-Taek déjà responsable du superbe Friend, un des 5 plus gros succès de l’histoire du cinéma sud-coréen. D’ailleurs on retrouve dans Champion la même tonalité que dans le précédent chef d’œuvre de Kwak Kyung-Taek c’est à dire un mélange de tragédie et de films intimiste, une ambiance nostalgique douce amère traversée par des éclairs de violence.
Tout comme Friend, Champion traite de la fêlure résultant d’une transition difficile entre l’enfance et l’âge adulte. Kim Daek Gu est un enfant qui a trop vite grandi, partagé entre une réalité sordide ( il est né dans un village de pêcheurs misérables, ne connut pas son père, fut surnommé le chien par ses camarades car sa mère collectionnait les amants et fugua enfin pour la grande ville à l’âge de 14 ans et où il y vécut en tant que SDF ) et ses rêves enfantins ( devenir un grand champion ). D’ailleurs comme tous les enfants livrés trop rapidement à la vie active, Kim Daek Gu est un grand gamin, souvent paumé, entêté, peu à l’aise dans les rapports sociaux , parfois naïfs ( la scène où, pataud et timide, il essaye de draguer pour la première fois sa future femme est à ce titre phénoménale ) mais aussi un peu poète à sa manière ( ah ! La scène où il coure derrière le bus pour prouver son amour ! ).
Ensuite, de même que dans son précédent opus, Kwak Kyung-Taek dresse une radiographie assez sévère mais juste de la société sud-coréenne des années 70 et 80 en montrant du doigt sa paupérisation ( avec un passage assez dur où des enfants SDF se battent très violemment pour assurer leur survie ), sa rigidité ( le père qui refuse à sa fille, majeure et salariée, de fréquenter Kim Daek Gu car ce dernier est boxeur ) et sa sévérité extrême ( voir le passage où le coach frappe Kim Daek Gu à coups de bâtons, car ce dernier a perdu un match, devant tous ses camarades ).
En ce qui concerne la structure du film, il est vrai que la première moitié du film, même si elle contient son lot de passages émouvants ( et notamment une très touchante scène de beuverie )est assez déroutante voir confuse. On a du mal à voir se former un tout vraiment cohérent, la narration étant assez elliptique. Toutefois cela se révèle rapidement être un choix de mise en scène, assez pertinent d’ailleurs, du réalisateur visant à démontrer le caractère paumé du personnage, confronté à ses hésitations, ses doutes et ses démons intérieurs. Ainsi la deuxième partie commence quand, sur l’instigation de son coach il décide d’affronter le reflet renvoyé par le miroir ( et donc tout ce qui l’empêche de progresser). Dès ce moment le scénario est plus linéaire et moins elliptique, épousant le mental d’un Kim Daek Gu plus confiant et ayant enfin affronté son chaos personnel. De même, le réalisateur livre par la suite certaines clés sur la vrai personnalité boxeur en insérant des flash-backs sur son enfance dans, notamment, une scène superbe faisant directement écho à un discours tenu par le boxeur devenu le héros local de la ville même qu’il avait fui des années avant.
Et de véritables moments de grâce, le film en contient un nombre assez impressionnant, que ce soit la scène du miroir justement ( où la chansonnette du héros devant la glace accompagne les images du combat de boxe qui lui assura le titre de champion Asie-Pacifique) mais aussi des images fugaces mais superbes comme la vieille mère égrenant un chapelet en priant pour son fils dans le coin d’un café bondé ou alors le coach penché au dessus du cerceuil de son poulain, lâchant, comme à un soldat mort en héros au champ d’honneur, un « good job son ». Et que dire de la fin si ce n’est qu’elle est d’une intensité poétique rare en plus d’être un hommage émouvant à la boxe et aux sportifs en général, achevant de transformer Kim Daek Gu, mais aussi tous les autres boxeurs, en héros mythologique hantant à jamais le lieu où il versa son sang et sa sueur pour atteindre son idéal ( on est alors plus très loin du Ken de Kenji Misumi ).
Reste les scènes de boxe, peu nombreuses mais parfaitement exécutées que ce soit dans la chorégraphie ( brutale ) et la réalisation ( sobre et élégante avec des montées d’adrénaline).
Ce film prouve que Kwak Kyung-Taek est le réalisateur sud-coréen à suivre ( à égalité avec Park Chan Wook ) et que la boxe est le sport le plus cinégénique qui soit.
L'anti-Rocky
Kwak Kyung-Taek, un réalisateur brillant.
J'ai vu il y a quelques mois son "Friend", qui m'a fait fort impression. En tant que scénariste/réalisateur/directeur d'acteur, il s'est imposé à mes yeux comme un auteur à part entière; son premier film est un chef d'oeuvre de mise en scène, et il manquait juste une heure de plus dans son scénario si dense et chargé en émotion pour atteindre le niveau de drame culte.
J'ai donc inévitablement attendu avec une impatience certaine son deuxième film, "Champion", chronique d'un boxeur sud-coréen ayant failli atteindre des sommets au début des années 80. Si l'idée nous est familière, le scénario ne pouvait pas l'être totalement, l'histoire étant vraie. De plus, Yo Ooh-Sung, un des acteurs les plus remarquables de "Friend" avec Jang Dong-Kun, y jouait le premier rôle...
J'ai sauté sur le DVD à sa sortie et l'ai regardé le soir même. Et là... impression mitigée: si son film a quelques grosses qualités et des petits défauts, la chose la plus frappante reste son traitement scénaristique.
Je compare "Champion" à "Rocky". Ce n'est pas innocent. Prenez le film de Alvidsen: une pure fiction, un conte de fée paradoxalement urbain, sale et réaliste; une réalisation solide dotée d'un scénario béton, ayant fait l'objet d'un travail acharné de la part de Stallone. Il a mis toutes ses trippes pour pondre le scénario ultime sur le rêve américain de la fin des années 70, avec simplicité et grandeur. Ultime signifie jubilatoire: on sait que rien de tout cela n'est vrai. Mais le cinéma est fait pour faire ressentir des émotions; et "Rocky" est à ce niveau une belle réussite. Tout est fait pour impressionner (en dépit de son budget minable), et tout impressionne. Le résultat est là: "Rocky" est un film culte.
Prenons maintenant "Champion", que j'ai nommé dans mon titre l'anti-Rocky. Sans spoiler quoi que ce soit, je dirai simplement que c'est pour moi ce qui résume le mieux le film de Kyung-Taek. Pourquoi? voilà pourquoi: là où "Rocky" montrait tout ce qu'il y avait à montrer, "Champion" fait tout le contraire, et ne montre jamais ce que l'on est habitué à voir; là où "Rocky" mettait en scène une histoire d'amour pure mais non épurée entre Rocky et Adrienne, "Champion" zappe quasiment tous les symboles (sauf le marriage) d'une relation profonde entre le héros et sa compagne; là où "Rocky" grimpait en crescendo car il était libre, "Champion" reste collé à la réalité et n'emporte jamais le spectateur hors des frontières du "réel donc plat". Mais ce dernier point n'est pas une critique, et "plat" n'est pas le mot exact.
Champion est une histoire vraie. C'est ce qui fait aussi sa force et sa faiblesse. Je parlais de qualités et de défauts. Prenons les... ou plutôt LA qualité, l'atout majeur: Yo Ooh-Sung. Doté de la puissance généreuse d'un James Caan des années 70 (dont le must est SON chef d'oeuvre, "Rollerball"), de son air d'enfant fragile caché par une stature de brute, l'acteur emporte tout sur son passage, aussi bien dirigé que dans "Friend", et fait preuve d'un talent littéralement bluffant. A lui seul, il émeut plus que de nécessaire.
Maintenant, prenons les défauts: la première heure. Coller à la réalité, c'est bien; mais faire chier, c'est pas non plus autorisé pour autant. La première heure de "Champion" est une suite de scénettes pseudo-comiques ou pseudo-tragiques, plombées par des acteurs qui surjouent et une écriture très peu inspirée. On a déjà vu ça en mieux dans le ciné américain. Les deux seules choses qui aident au spectacle sont Ooh-Sung et la photo de Kyung-Pyo (qui en fait un peu trop mais reste savoureuse), car même Kyung-Taek semble s'em@!#$.
La deuxième heure relève donc le niveau lorsque l'histoire s'emballe, vous l'avez compris. Mais bon, avec ce genre d'histoire, c'est dur d'em@!#$ totalement...
Ooh-Sung reste génial jusqu'au bout, la photo itou, la réa part en vrille (en bien), mais le syndrome "anti-Rocky" frappe trop fort...
C'est très subjectif, car ce mode de narration peut vous emballer. Mais je pense qu'un avertissement est nécessaire: à force de vouloir trop sortir des canons habituels du genre, à force de vouloir jouer les auteurs jusque dans le pop-corn, Kyung-Taek laisse sur sa faim. Ne vous attendez pas à des scènes de boxe à la "Raging Bull", c'est bien simple, il n'y en a presque pas; et ne croyez pas que cette absence est compensée volontairement par une longue et puissante scène finale, on a droit à rien. Mais là n'est pas le problème: se concentrer sur les émotions était un parti-pris vraiment louable. Malheureusement... sans Ooh-Sung et malgré les efforts de seconds couteaux très corrects, l'émotion ne décolle pas... c'est monochrome, trop réaliste, et pas assez maîtrisé dans son traitement "inédit".
Au-delà de ça, on voit que Kyung-Taek, malgré tout son talent, ne s'est visiblement plus senti: à l'instar d'un Shyamalan qui a pondu son "Signs" en trois jours parce qu'il pensait pouvoir faire quelque chose de génial sur commande, le cinéaste coréen n'a pas pris le temps de choisir son nouveau sujet après l'épreuve de force "Friend", et s'est lancé dans une autobiographie somme toute mineur en pensant en faire un chef d'oeuvre. Raté... ça se voit jusque dans le prologue, et l'épilogue: le premier met en scène le héros jeune prenant un autocar (2 minutes, totalement inutile), et le second est complètement foir@!#$, et passablement naïf (je ne révelerai rien). Las...
Au final, Kwak Kyung-Taek reste à cinéaste à suivre, notamment pour les quelques scènes grandioses du film (car le film reste bon), comme la dernière de Ooh-Sung sur un ring, lorsqu'il retrouve ses forces, et se lance à corps perdu dans son dernier combat... le traitement visuel et sonore de cette scène est terrassant, et laisse penser de ce que le cinéaste pourra faire... quand il prendra son temps.
En définitive: à voir pour l'originalité de l'objet, bâclé mais passionné, à l'image de Ooh-Sung, futur grand acteur du cinéma coréen.