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3.13/5
Chacun son Cinéma
les avis de Cinemasie
2 critiques: 3.5/5
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10 critiques: 3.02/5
Un ensemble d'oeuvres d'une grande richesse
Même si l'entreprise n'est pas très nouvelle, l'idée de réunir toute une poignée de cinéastes issus du monde entier pour rendre hommage au cinéma, et de surcroît aux 60 ans du Festival de Cannes, est tout à fait louable, ne serait-ce que pour mettre en avant une certaine idée du cinéma actuel. Pour cela Gilles Jacob donne carte blanche à 35 des cinéastes les plus influents du cinéma actuel (du moins dans sa représentation purement artistique) avec un budget ne dépassant pas les 25 000 euros par segment, autour du thème de la salle de cinéma. Un pari osé mais pas si risqué que ça quand on connaît le grand talent de chacun : Polanski, Egoyan, Cronenberg ou encore les frères Cohen, épaulés par quelques grands noms du cinéma asiatique : Tsai Ming Liang, Chen Kaige, Wong Kar-Wai, Hou Hsiao-Hsien, Zhang Yimou et enfin Kitano Takeshi.
Il n'y a aucune appréhension à avoir sur Chacun son cinéma puisqu'il relève avant tout de l'exercice purement stylistique d'une durée de trois à cinq minutes maximum par segment. On n'attend donc personne au tournant, on apprécie et on savoure les délires assez incroyables de cinéastes en pleine possession de leur moyen. On pense d'amblé à Kitano, deuxième segment de l'oeuvre et l'un des plus drôles : un fermier arrive au cinéma en fin de matinée pour assister, seul, à la projection de Kids Return dans une copie complètement massacrée par le projectionniste qui n'est autre que Kitano lui-même. Autre sketch particulièrement amusant, celui de Polanski, modèle d'humour grinçant et d'ironie, où un pauvre homme agonise dans une salle projetant un film érotique. Les frères Cohen s'en donnent aussi à coeur joie avec la discussion d'un cow-boy macho homosexuel et un cinéphile-nerd autour du film Les climats et Les règles du jeu. Dans le registre humoristique, Nanni Moretti s'amuse à raconter ses expériences cinéphiliques avec son segment Diario di uno spettatore, gavé de références.
Mais Chacun son cinéma c'est aussi l'occasion d'assister à de petits chefs d'oeuvre de mise en scène, qui même en l'espace de trois minutes arrivent à proposer autant qu'un film de deux heures. C'est aussi ça la force du projet de Gilles Jacob, qui au passage n'a pas particulièrement raté son casting. On pense à Atom Egoyan et son hallucinant travail Artaud double bill où le cinéma fusionne avec l'espace et le temps, avec en fond sonore d'un côté un vieux film en noir et blanc et de l'autre un vulgaire film pornographique. Le contraste est saisissant, la maîtrise formelle absolue. Belle surprise aussi venant d'un Chen Kaige en état de grâce avec Zhanxiou village ou une poignée de gamins s'affolent à faire marcher le rétroprojecteur d'une petite salle de cinéma improvisée, en pédalant sur des vélos. Filmé avec justesse (grand travail de composition des plans) et superbement photographié (teintes entre le noir et blanc et le sépia). Dans un registre totalement différent, Wong Kar-Wai fait du Wong Kar-Wai, avec une histoire d'amour entre deux jeunes gens qui débuta dans une salle de cinéma, filmé en 12 images par secondes, très joli au demeurant, Hou Hsiao Hsien nous ramène quant à lui à l'époque des années 60 où un militaire amène sa femme et ses enfants dans une salle de cinéma. Pas très recherché, ce segment vaut surtout pour la beauté de son cadre. Zhang Yimou joue dans le registre du spectacle d'ombres chinoises avec un gosse adorable et passionné des back stages d'une projection. Pour terminer, Tsai Ming-Liang poursuit sa quête de réaliser le moins de plans possibles, à savoir trois plans en trois minutes où l'on retrouve une nouvelle fois son acteur fétiche, Lee Kang-Sheng.
Si certains sketchs font preuve d'inventivité, de recherche et d'audace, d'autres véhiculent des messages de paix et de tolérance au détriment d'une recherche esthétique et stylistique. Le thème sur la cécité est aussi très prononcé, comme quoi on ne regarde pas le cinéma, on le vit. Chacun son cinéma reste donc un hommage d'une grande richesse à la fois culturelle et thématique, permettant de se familiariser avec des cinéastes qu'on ne connaissait pas forcément et qu'il serait à présent bon de suivre de plus près.
Au contraire, intéressant
Je trouve qu'au contraire le temps passe très vite, et les courts sont rarement ennuyeux ce qui est le principal. Certains ne marquent pas vraiment, mais la plupart sont sufisament pourvus d'intérêt, voire même de messages, pour que ce métrage mérite attention. On est d'un coup curieux, sensible, hilare, triste..., et on voyage a travers le monde pour découvrir les "salles de cinema" de la planète ainsi que les différentes manières d'appréhender ces séances. Bien sûr c'est souvent très caricatural, mais au fond, c'est aussi du cinéma et ce qui fait le plaisir de ce film. A voir s'il passe à la télé (vu sur Arte perso) sinon, c'est vrai, l'intérêt est peut être limité, mais ça n'empêche pas que c'est un projet rigolo où on a jamais le temps de s'ennuyer puisque toujours curieux d'aller au moins à la fin de chaque court.
Chacun son histoire
Œuvre hétéroclite, où le pire côtoie de l'intéressant, mais où chacun trouvera très certainement son compte ne raison de la richesse des segments.
Personnellement, mon préféré est indéniablement le segment d'Elia Suleiman, qui m'émerveille à chacune de ses apparitions et réalisations avec son humour (universel) muet et légèrement décalé (et rappelle parfaitement ces instants de grande solitude pour mener – parfois – des "Questions-Réponses" avec certains types de public).
Côté asiatique, pas tellement de belles choses à se mettre sous la dent.
Wong Kar-Wai réitère paresseusement ce dont les gens le savent capable de faire. Chen Kaige s'applique à réaliser des belles images, mais ne peut s'empêcher de mettre une grosse couche de pathos en fin d'histoire – d'ailleurs l'ensemble de son histoire manque une nouvelle fois d'une sensibilité suffisante; ce ne sont là que des images sur papier glacé sans aucune vie. De même pour Zhang Yimou, qui ne surprend guère dans la reconstitution d'une scène déjà maintes fois vu au cinéma (chinois). Tsai Ming-liang reste également fidèle à son propre cinéma, tout comme Hou Hsiao Hsien, dont le segment a au moins l'intérêt d'en apprendre une nouvelle fois un peu plus sur son auteur. Seul le segment de Kitano tente effectivement de raconter une vraie histoire en moins de trois minutes et réussit à faire rire avec son lieu et ses personnages décalés, même s'il y avait peut-être un peu plus encore à tirer de son concept.
Sur un concept aussi vaste, on aurait pu s'attendre à mieux dans l'ensemble par des gens dits des véritables "auteurs".
Intérêt (très) limité...
Si on ne peut pas par principe être contre ce genre de démarche, au moins il faut reconnaitre que ca n'a qu'un intérêt minime. Il ne s'agit pas de faire la promotion de cinéastes pas très connus... il n'y a que des noms comme des cathédrales dans Chacun son cinéma. Quel peut bien être l'intérêt de voir de grands réalisateurs forcément limités par la durée très minime qui leur est impartie? Pour moi, il n'y a en a pas vraiment... certes, séparément ca se regarde, mais tous à la suite, houlalala, faut s'accrocher! Foncièrement déforcé par l'aspect compilation de grands noms comme autant de vignettes de la planête cinéphile, Chacun son cinéma déçoit parce qu'aucun fil ne se dégage et qu'aucun segment ne peut franchement se détacher. Les voir séparément permettrait probablement de leur rendre justice, mais là, non, ca ne va pas, on s'ennuie, et on décroche rapidement si on est pas un tant soit peu volontaire.