Epopée zen
BASARA est la suite de RIKYU,tourné trois ans plus tôt par le même HIROCHI TESHIGAHARA.
Si le célèbre maître de thé du temps du Shogûnat Tokugawa reste présent,directement ou en filigrane tout au long de l'histoire ,ce deuxième opus nous offre de nouveaux personnages complexes:
ORIBE est le nouveau maître de thé du Shogûn,la jeune princesse GOH est sa nièce aimée et la fille adoptive de Tokugawa,et enfin USU est un guerrier et homme de confiance rustre mais d'une noblesse évidente, attaché corps et âme à ORIBE.
La structure même du film est différente: si RIKYU était avant tout une enquête fouillée sur la mort mystérieuse du vieil homme, PRINCESSE GOH brasse d'autre thèmes historiques comme la répression sanglante du christianisme au Japon,ou la place de la femme dans les luttes pour le pouvoir.
Sur plusieurs années nous suivons alors l'évolution des trois héros principaux dans le contexte tourmenté du moment,avec un changement de pouvoir déterminant pour leurs vies respectives .Si ORIBE se révèlera aussi fin que son précédesseur à son poste,GOH,elle,passera d'une adolescence dorée et fantasque au statut d'épouse et mère séparée de sa famille par intérêt politique, vivant alors quasiment en recluse mais gardant toujours cet esprit farouche qui la caractérisera.Quant à USU,il vivra longtemps en homme des bois solitaires avant de retrouver son maître et la princesse avec qui il entretient depuis le début des sentiments ambivalents.
La destinée dramatique des trois personnages rejoint plus ou moins celle de RIKYU pour des raisons similaires de manigances politiciennes,la boucle est alors bouclée.
Film ambitieux par son sujet,il s'avère déjà une véritable épopée passionnante à suivre,mais encore plus intéressante est la profondeur des pensées et des sentiments,souvent évoqués par des non-dits entre des personnages se révélant d'une complexité remarquable.Avec en contrepoint des moments contemplatifs ou la beauté des plans laisse pantois.
TESHIGAHARA travaille en architecte obsessionnel de la caméra ,nous livrant des images millimétrées ou chaque élément est à sa place,décors,costumes,
maquillages,composant un tableau d'époque authentique et magnifique,étayé par un score musical à la hauteur de l'ensemble.
L'interprétation nous ramène TATSUYA NAKADAI,superbe vétéran à la longue filmographie (RAN,KAGEMUSHA,GOYOKIN...), et la belle RIE MIYAZAWA,idole japonaise du début des années 90,parfaitement crédible en princesse GOH.Le guerrier USU est interprété par le puissant TETSUYA BESSHO.
TESHIGAHARA a eu l'opportunité de développer un sujet qui ne semblait guère propice à une suite,il nous étonne pourtant avec cette oeuvre maîtrisée de bout en bout,d'une perfection formelle constante et d'une grande richessse psychologique.
Du grand Art.
