Parfaitement inclassable, une oeuvre formidable
Véritable objet de culte à l'époque au Japon et faisant de son actrice principale Yakushimaru Hiroko la plus populaire auprès des jeunes mais aussi une véritable icône de Jpop durant des années (découverte entre autre la même année dans
Sailor Suit And Machine Gun et y interprétant la chanson principale),
The Aimed School est une oeuvre inclassable. Qui oserait d'ailleurs la classer dans un genre particulier? Mélange improbable de science-fiction entre
San Ku Kaï et
Cobra, de comédie juvénile et de pur produit typé manga,
The Aimed School repose à la fois sur un pitch casse gueule et sur des ambitions formelles culottées lui valant à la fois la médaille du film le plus attachant vu depuis belle lurette mais aussi l'un des plus lourds, car à aucun moment la suggestion est de mise et si Obayashi daigne inclure des éléments animés à l'écran, il ne se gêne pas quitte à verser dans le navrant au détriment d'une fluidité visuelle. Evoquons un peu le scénario, tout débute comme le plus classique des dramas nippons saupoudrés d'un zeste d'esprit manga, avec élèves en costume, gamins pervers attendant au pied des marches d'un escalier pour scruter ce qu'il y a sous les jupes des demoiselles, ambiance entre apocalyptique et fête universitaire destroy. On fait la connaissance de Yuka, élève studieuse, plutôt mignonne et bien quottée auprès des autres. On découvre aussi Koji, l'inverse de Yuka pourtant ce contraste les rassemble. Après moult entraînements au Kendo et faux tutorat à domicile, Yuka et Koji sont sur le point d'assister à l'accident d'une fillette à vélo, lorsque Yuka réussit par on ne sait quel moyen à arrêter le temps et ainsi éviter le pire. Koji n'ayant rien remarqué, Yuka décide de garder cette manipulation psychique secrète.
Le jour des élections de délégués approche à grand pas, une nouvelle élève, Takasawa fait alors son apparition. Alter plus ou moins ego de Yuka version dark, cette dernière vient d'Hokkaido pour mettre à bien les plans maléfiques pensés par son patron (un Biceps de Phantom of The Paradise avec une cape, en gros). La seule à douter de la fausse franchise de cette dernière est bien sûr Yuka, qui tente à son tour de garder les règles de l'établissement intact. Si il est délicat de résumer The Aimed School dans son intégralité, c'est parce qu'il fait preuve d'une immense richesse quitte à paraître troublant voir ridicule. Ses 15 idées par plan, sa narration décousue puis recousue avec les moyens du bord lui confère un charisme redoutable à ne pas sous-estimer. Il a beau jouir d'une photo de téléfilm et d'inserts animés vieillots (nous sommes tout de même qu'en 81), son rythme endiablé, ses personnages hallucinés et ses situations très "manga" peuvent le définir comme parfaitement audacieux : un professeur de sport qui, en tapant du poing sur la table, fait voltiger les objets posés, un nerd paranoïaque pactisant avec le diable en personne, un combat au Kendo qui vire au grand n’importe quoi, un background dessiné à la main, tout relève de l'audace. De plus, le film est accompagné d'une bande-son inégale, oscillant entre l'extraordinaire et le sous Jarre, encore un facteur qui démarque The Aimed School d'un autre. Le film joue la carte du kitsch et de la rencontre entre l'animation et le live, avec un superbe générique d'introduction doté d'une sublime chanson, le Mamotte Agetai version pop.
Pas d'échappée possible pour le spectateur, il reste devant un produit aussi inexplicable que merveilleusement fichu. On comprend dès lors son importance à l'époque, à l'heure où l'avènement de la pop japonaise n'était pas loin. La pop à elle seule est incarnée par Yakushimaru Hiroko, attachante et certaine dans la peau d'une élève pas comme les autres, moderne mais aussi dotée d'une belle voix (le thème de Sailor Suit And Machine Gun sera d’ailleurs repris dans un épisode du drama populaire Densha Otoko). Essayer The Aimed School c'est prendre un gros risque, mais quoiqu'il arrive, le résultat en vaut la chandelle malgré un combat de fin irregardable et pas bien utile. On lui pardonnera car l'oeuvre de Obayashi est fantastique, tout simplement.