Une variation sur l'apprentissage du piano par deux adolescents talentueux venant de milieux différents. L'un est fils de bonne famille, l'autre est enfant des rues. Ils n'ont en commun que Mozart et Chopin...
Masayuki Kojima est un bon conteur, il nous l'avait déjà prouvé sur l'efficace série Monster, mais avec ce film on ne s'attendait pas pour autant à un exploit en devenir. Pourquoi? Parce que le concept un piano + une forêt = "Piano Forest", un pitch à l'attrait commercial évident fait d'une écologie Myiazakienne de bon aloi et de la mièvrerie d'une musicalité à la pédagogie lourdingue. Oui mais non, car en effet et je le répète : "Masayuki Kojima est un bon conteur", il sait jongler comme peu de monde avec ses impératifs et obtient à l'arrivée un anime clair(ière)ement réussi, frais comme un soir au clair de lune et doux comme quand on marche pieds nus sur la mousse près des arbres.
Un an après on pense à La traversée du temps, souvent, parce qu'une belle histoire simple nous est joliment racontée, parce que Madhouse produit, parce qu'Eurozoom va le distribuer au ciné en France et parce que le character design y est commun et épuré, oui, mais plus logiquement parce que les personnages y sont forts, l'enfance décrite sans manichéisme aucun et l'émotion flagrante au détour de plusieurs scènes. Happy en parle très bien dans sa critique, insistons sur le dosage parfait qui est fait là entre divertissement et ode à la musique : les scènes d'apprentissages sont voluptueuses, les mouvements de doigts suivent réellement les partitions et via l'animation Kojima s'offre des contre-plongées depuis le piano sur les visages d'enfants, concentrés sur des morceaux de musiques formidablement étudiés. La récurrence japonaise du dépassement de soi est appuyée par des résultats de jeu sans appel au piano. Ajoutons à cela une concurrence entre les deux amis traitée sur ton très adulte, une très bonne mise en image, l'humour hilarant apporté par une jeune pianiste stressée lors du concours (no spoiler, ce serait dommage, la scène vaut le détour !) et vous obtenez là une franche réussite. Merci Wendy !
Bande annonce
Piano Forest n’a pas les coupes de cheveux, les pantalons moulants et l’énergie dévastatrice d’Iron Maiden c’est sûr. On troque la batterie, les guitares et la basse Kalachnikov pour un simple piano, cinq fois la taille de Kai, et l’on joue pourtant avec la même passion. Tout n’est que question de musique, d’envie, d’affinités avec l’instrument et le monde de la musique : Kai n’arrive pas à jouer sur un piano classique, mais démonte sur ce piano déposé en forêt qui accepte de sortir des sons uniquement lorsque ses doigts l’effleure avec grâce. L’un des pianistes les plus importants du pays aura beau s’y essayer, il n’y arrivera pas. Idem pour le petit nouveau de la région, Shuhei, pourtant très doué et en rendant plus d’un jaloux. Au départ un poil inquiétant, Piano Forest ne brille pas par son chara-design manquant d’originalité et ses personnages pas plus travaillés qu’à la télévision durant les années 90. Malgré tout, la clarté pastelle emporte le morceau, les couleurs naturelles et la bonne qualité d’animation finissent par nous faire mentir, qui plus est une fois la seconde enclenchée et l’humour bagarreur bien établi. L’anime paraîtrait même violent aux premiers abords, avec une première empoignade en classe faussement misogyne : Kai est bel et bien un garçon malgré Aya Ueto au doublage, qu’importe les droites qu’il se mange par un gros plein de soupe, on ne bronchera donc pas. On est en pleine jungle. Piano Forest annonce en moins de dix minutes le charisme et les ambitions de ses personnages, issus de milieux sociaux bien différents : Shuhei est un gosse de riches, et entre lui et la musique ce n’est pas le grand amour malgré ses remarquables capacités et compétences en solfège, contrairement à Kai, le garçon de la campagne, petit prodige malgré son désintéressement de la pratique pure et dure.
Il joue avec le cœur et laisse ses neurones de côté. Kai est le genre de garçon qui se contrefiche de Chopin et Mozart. Il joue ses compositions personnelles, magnifiques, mais qui n’intéresseront évidemment pas le jury lors d’un concours national auquel il y participera avec Shuhei. Avant cela, les gamins auront eu le temps de sympathiser, de partager une véritable amitié malgré la compétition qui plane au-dessus de leur tête. Et comme belle quantité d’animés, le film de Kojima Masayuki s’attarde sur le souvenir. On peut crier à la facilité avec cet immense pianiste devenu simple professeur de musique à l’école après un accident irréparable, ancienne connaissance de la mère de Shuhei, et il ne manque plus que la neige ou les cerisiers en fleurs pour être dans le formaté à outrance. Et si chez Miyazaki les bons sentiments pleuvent très souvent, la grâce répond présent, grâce qui manque tout de même à Piano Forest malgré une histoire attachante et une douceur reposante, à l’image d’une Traversée du temps sans doute plus riche à ce niveau et plus marquante d’un point de vue musical, même si l’art musical n’est pas son fond de commerce après tout. On retrouve néanmoins, dispersé ça et là, un humour décalé, à la limite d’effleurer le mauvais goût hilarant lors du concours de musique final. Là aussi, le film ne prend pas de risques en se mettant clairement du côté du perdant, en fin de compte grand gagnant dans l’histoire, confirmant la douceur de l’ensemble et la légèreté du métrage, frais comme une brise en forêt.
Tous les ingrédients étaient réunis pour faire de l'adaptation du manga de Makoto Isshiki un vrai échec. Ca commence comme un sous-Miyazaki avec un petit garçon en route vers une sacrée étape dans sa jeune vie, qui est de suite attiré par une forêt en lisière d'une zone résidentielle peuplée. Le dessin et l'animation laissent franchement à désirer. Il intègre une école, fait ami-ami avec un autre (sur-)doué du piano et apprend que son instituteur est un ancien champion déchu de l'instrument. Ah. La compétition de la fin d'année guette.
Et puis s'instaure petit à petit une atmosphère ultra positive et un goût propre au réalisateur. L'apprentissage des deux garçons se transforme en véritable leçon de piano et vulgarisation d'une musique par trop méconnue par les jeunes d'aujourd'hui. A voir Chopin, Mozart ou Beethoven expliqués de la sorte, ça donnerait presque envie de se remettre au solfège!! LA fin laisse craindre une bonne leçon moralisatrice…mais est étonnamment réaliste dans son traitement. Une pure merveille, qu'il serait bon de voir distribué en France, tiens!
Pour l'anecdote, les partitions musicales sont signées par Davidovich Ashkenazy, jeune prodige du piano depuis ses six ans…et une belle garantie supplémentaire quant au sérieux de l'entreprise.