Grosses ficelles tirées avec talent
Soyons clair, Derek Yee n'a rien du scénariste visionnaire et torturé qui délivre des scénarios ultra complexes et à 36 niveaux de lecture. Non, Derek Yee, c'est l'éloge de la simplicité même. Une histoire simple, des thèmes forts, des acteurs bien choisis, une réalisation discrète. Et dans le genre du mélo, il possède tout de même de solides références: la petite amie touchée par la maladie dans
C'est la Vie mon Chéri, la femme célibataire avec enfant à charge dans
Lost in Time, les larmes et les Awards tombent. Après un
One Nite in Mongkok un peu plus complexe mais tout aussi humain, il revient au bon vieux mélo des familles avec cette fois-ci un regard sur les turpitudes de l'adolescence et d'une grossesse trop précoce.
Comme toujours, on n'ira pas crier au génie pour ce scénario fort convenu. Elle fille de bonne famille, avec un Anthony Wong sans surprise comme figure parternelle très rigide, lui enfant des quartiers pauvres, fils d'un Eric Tsang également pressenti dans le rôle d'un père gueulard au grand coeur et d'une Teresa Mo aussi excentrique que d'habitude. On voit tout venir à des kilomètres, le film n'évite pas le défaut habituel des productions Derek Yee, à savoir le petit discours moralisateur tout à fait inutile vu la qualité de la narration (ici le monologue d'Anthony Wong à la fin). La réalisation ne vient sûrement pas révolutionner le cinéma non plus, c'est minimaliste et sans surprise.
Oui mais une nouvelle fois, cela fonctionne. Car le tout est fait avec sincérité. Les acteurs y croient, et ne peuvent se cacher derrière un montage Michael Bayesque, Derek Yee utilisant les plans séquences avec gourmandise. Il faut dire qu'Anthony Wong et Eric Tsang ne surprennent pas, mais savent évidemment y faire. De même que la trop rare Teresa Mo. Quant aux deux petits jeunes, ils se débrouillent finalement très bien. Les malheureux spectateurs de
Twins Effect 2 pouvaient nourrir de légitimes craintes quant à Jaycee Chan. Heureusement, ce dernier se défend plus qu'honorablement, de même que sa jeune partenaire. Les caméos finissent de compléter ce casting plaisant, avec en tête un David Chiang en juge qui vient faire un sympathique discours final dans lequel on pourra voir un message de l'ancienne génération d'acteurs à la nouvelle.
Derek Yee ne surprend donc pas avec ce nouveau mélo. Mais il tire très bien les grosses ficelles qui font les bons mélos. On passe un bon moment avec cette histoire certe dramatique mais qui ne se prend pas toujours trop au sérieux et se permet même de désamorcer elle même son côté convenu parfois ("on se croirait dans une de ces séries" comme le dit l'un des personnage). Le plus important dans ce genre de film reste de croire aux personnages, et c'est ce qui se produit. Fiona Sit est crédible dans son rôle de jeune fille qui se constitue la famille qu'elle n'a pas. Jaycee Chan est crédible en jeune père qui tente tant bien que mal de nourrir sa famille. Bref, du rire, des larmes, du cinéma certes classique mais fait par des artisans sérieux.
Derek c'est du solide
S'il manque souvent (toujours?) à Derek Yee la petite touche de merveilleux qui parvient à rendre un film unique, une chose est sûre c'est qu'il connaît à la fois son métier et ses limites (volontaires?) personnelles. Avec un sujet comme celui de 2Young, il aurait été facile de tomber dans le larmoyement, de faire jouer la corde sensible de la spectatrice hongkongaise moyenne. Mais lui sait garder toute la retenue nécessaire pour toujours conserver ce bon sens qui ancre le film dans la réalité plus que dans la fiction. Certes on est ici plus proche de la comédie dramatique que de la romance pure comme dans
Lost In Time, et cet aspect double est assez bien exploité à travers le jeu d'Eric Tsang ou de Teresa Mo qui incarnent les parents du jeune homme. La bonne surprise vient aussi de l'interprétation de Jayceen Chan qui se réhabilite de sa prestation dans Twins Effects 2 et de celle de Fiona Sit pour sa première performance au grand écran. Alors même si le scénario est totalement prévisible, l'absence de défaut dans la réalisation (de génie aussi mais bon...) et les bonnes performances des acteurs font que le film se laisse voir sans encombre même si le coté préservation de la morale et des bonnes moeurs pourrait en géner certains.
Certainement un des meilleurs réalisateurs actuellement en activité à Hong-Kong, Derek Yee prouve avec "2 Young" qu'il ne perd pas la main.
Certes, moins définitif que certains de ses films précédents, notamment "One Nite in Mongkok", "2 Young" est une comédie dramatique simple mais néanmoins efficace.
Dans les mains d'un tâcheron, le film aurait pu ressembler à s'y méprendre à un téléfilm de France 2 du mercredi soir. Dans celles de Derek Yee, "2 Young" est, pour sa part, un joli film émouvant, touchant voire parfois amusant.
Porté par de très bons acteurs (mention spéciale à Jaycee Fung et Eric Tsang), le film ne révolutionnera pas le genre mais est, néanmmoins, une oeuvre des plus sympathiques pour les amateurs du genre et de ses ficelles parfois grossières.
Y' a pas que les grands qui rêvent...
Après une année pharaonique pour Derek Yee, il entame l'année 2005 en demi-teinte avec ses deux décevants "2 young" et "Drink, Drank, Drunk". Tous deux faisant certainement preuve d'un grand savoir-faire dans sa mise en scène, comme dans une surabondance de moments mélodramatiques permettant au moins à ses acteurs d'avoir quelque chose à jouer, c'est avant tout le scénario qui pêche.
En vue du titre, il était raisonnablement permis d'espérer la résurrection du teen-movie des années '70s durant cette période économique incertaine; c'était sans compter sur l'honnête travail d'artisan de YEE, ainsi que les nouveaux impératifs omniprésents d'une présence officieuse dictatoriale de la chine dans l'actuelle cinématographie HK...
Il s'agit donc d'un mélodrame 100% adolescent, dans le pur style des anciennes comédies dramatiques de l'archipel. Basé sur un scénario relativement mince, le but est de faire pleurer dans les chaumières jusque dans son final terriblement conservateur et conformiste (faut pas que le p't jeune soit trop puni, mais quand même...). Le pathos dégouline donc à chaque recoin de plan et des rebondissements d'eau de rose sont servis à la louche à chaque fois qu'un ennuyeux temps mort guettait le spectateur. Si l'on s'arrêtait cinq minutes pour réfléchir au bon-sens prétendu de cet immense cliché, la comparaison avec les téléfilms américains à la pelle serait vite établie. Le bonheur des deux jeunes tourtereaux est prompt à venir, leur différence sociale terriblement clichéesque dans son exécution, le malheur bien vite arrivé et leur refuge campagnard absolument risible...
Mais voilà, YEE sait effectivement emballer le tout dans un joli paquet cadeau pour faire illusion le temps de son métrage et d'emmener le spectateur dans son tourbillon d'images rose-bonbon. Et puis qu'est-ce qu'il fait bon de voir des acteurs - connus ou moins - avoir l'occasion de réellement interpréter un rôle, au lieu de simplement prendre des poses ou se débattre avec des stéréotypes sans aucune psychologie. Si les adultes (les omniprésents Anthony Wong et Eric Tsang dans la production HK de l'année 2005 !!!) s'en sortent avec leur talent certain, ce sont surtout les jeunes, qui portent le film à bout de bras : Jaycee Chan, surprenant dans un rôle de composition - ressemblant parfois terriblement à son illustre père; et la chanteuse Fiona Sit, fragile et crédible dans son rôle d'une jeunette de 16 ans (alors qu'elle en a 23 en 2005 !).
Totalement inoffensif, seule la fin grandiloquente et terriblement consensuelle achève ce mélodrame de déraper dans le pur pathos. Dommage.
(Et dire, qu'il s'agit pourtant là des meilleurs films HK de 2005...).