Arno Ching-wan | 3.75 | Allegro ! |
Tenebres83 | 3.75 | |
Xavier Chanoine | 3 | Frais, sans être une montagne d'ambitions |
Bande annonce
Piano Forest n’a pas les coupes de cheveux, les pantalons moulants et l’énergie dévastatrice d’Iron Maiden c’est sûr. On troque la batterie, les guitares et la basse Kalachnikov pour un simple piano, cinq fois la taille de Kai, et l’on joue pourtant avec la même passion. Tout n’est que question de musique, d’envie, d’affinités avec l’instrument et le monde de la musique : Kai n’arrive pas à jouer sur un piano classique, mais démonte sur ce piano déposé en forêt qui accepte de sortir des sons uniquement lorsque ses doigts l’effleure avec grâce. L’un des pianistes les plus importants du pays aura beau s’y essayer, il n’y arrivera pas. Idem pour le petit nouveau de la région, Shuhei, pourtant très doué et en rendant plus d’un jaloux. Au départ un poil inquiétant, Piano Forest ne brille pas par son chara-design manquant d’originalité et ses personnages pas plus travaillés qu’à la télévision durant les années 90. Malgré tout, la clarté pastelle emporte le morceau, les couleurs naturelles et la bonne qualité d’animation finissent par nous faire mentir, qui plus est une fois la seconde enclenchée et l’humour bagarreur bien établi. L’anime paraîtrait même violent aux premiers abords, avec une première empoignade en classe faussement misogyne : Kai est bel et bien un garçon malgré Aya Ueto au doublage, qu’importe les droites qu’il se mange par un gros plein de soupe, on ne bronchera donc pas. On est en pleine jungle. Piano Forest annonce en moins de dix minutes le charisme et les ambitions de ses personnages, issus de milieux sociaux bien différents : Shuhei est un gosse de riches, et entre lui et la musique ce n’est pas le grand amour malgré ses remarquables capacités et compétences en solfège, contrairement à Kai, le garçon de la campagne, petit prodige malgré son désintéressement de la pratique pure et dure.
Il joue avec le cœur et laisse ses neurones de côté. Kai est le genre de garçon qui se contrefiche de Chopin et Mozart. Il joue ses compositions personnelles, magnifiques, mais qui n’intéresseront évidemment pas le jury lors d’un concours national auquel il y participera avec Shuhei. Avant cela, les gamins auront eu le temps de sympathiser, de partager une véritable amitié malgré la compétition qui plane au-dessus de leur tête. Et comme belle quantité d’animés, le film de Kojima Masayuki s’attarde sur le souvenir. On peut crier à la facilité avec cet immense pianiste devenu simple professeur de musique à l’école après un accident irréparable, ancienne connaissance de la mère de Shuhei, et il ne manque plus que la neige ou les cerisiers en fleurs pour être dans le formaté à outrance. Et si chez Miyazaki les bons sentiments pleuvent très souvent, la grâce répond présent, grâce qui manque tout de même à Piano Forest malgré une histoire attachante et une douceur reposante, à l’image d’une Traversée du temps sans doute plus riche à ce niveau et plus marquante d’un point de vue musical, même si l’art musical n’est pas son fond de commerce après tout. On retrouve néanmoins, dispersé ça et là, un humour décalé, à la limite d’effleurer le mauvais goût hilarant lors du concours de musique final. Là aussi, le film ne prend pas de risques en se mettant clairement du côté du perdant, en fin de compte grand gagnant dans l’histoire, confirmant la douceur de l’ensemble et la légèreté du métrage, frais comme une brise en forêt.