La Légende de Zu est l'histoire d'un groupe d'immortels combattant leur ennemi le plus terrible, Insomnia. En l'espace de 1h40, nous découvrons le monde de Tsui Hark et plus précisement sa vision du combat entre le Bien et le Mal de même que sa vision reconstruite de la vie des Immortels.
Tsui n'échoue jamais à stimuler les spectateurs en faisant de son film une déferlante ininterrompue d'images fantastiques, et aussi à les forcer à rechercher des indices pour comprendre le scénario. En bref, La Légende de Zu n'est jamais une histoire facile à saisir, même si vous avez lu le roman à l'origine du film (plus de 8 millions de mots et qui ne finit jamais ). En fait, je trouve le film incroyablement construit avec cette tentative de Tsui Hark de ne pas choisir une narration classique comme dans Zu, mais plutôt de réinventer le genre de l'heroic fantasy chinois.
La Légende de Zu raconte l'histoire d'un groupe d'Immortels (les Supra-humains) qui vivent dans les hauteurs de la montagne deZu et sont regroupés dans différents écoles. Les maîtres et leur élèves représentent ce qui est appelé "le pouvoir de justice" (des mots de Zhang Zi-Yi, qui interpréte le rôle d'une femme soldat désirant devenir immortelle). Dès le début, nous sommes amenés à voir que le film va nous imposer sa logique en nous rappelant les différences entre un Immortel et un humain. Sky King (Ekin Cheng) a suivi son maître, Dawn (joué par Cecilia Cheung) pendant près de 200 ans à la recherche de la voie de l'immortalité. Mais la lutte entre le Bien et le Mal avait déjà débuté 300 ans auparavant quand Insomnia détruisit le clan de Wah Shan. En ce sens, La Légende de Zu tente, des mots même de Tsui Hark, d'aller un peu plus loin que son prédécesseur dans l'exploration du thème de l'immortalité.
En effet, La Légende de Zu touche à de multipples aspects de la vie des Immortels et la route vers l'Immortablité, thèmes qui n'étaient pas explorés dansZu. Même si au final on se rend compte que Tsui Hark n'a pas totalement réussi à clarifier sa théorie de l'Immortalité et de l'Eternité, mais la tentative est intéressante.
Quel est le secret de l'Immortalité ? D'après le grand maître du clan Omei (longs sourcils blancs), il faut combiner 3 pouvoirs : le pouvoir de l'Esprit, le pouvoir de l'Univers et le pouvoir de la Régénération. Le film nous emmène à la découverte ces pouvoirs de combination et de transformation. Zhang Zi-Yi représente l'effort humain ordinaire de recherche de l'immortalité en formatant son esprit pour permettre au maître (Thunder, joué par Patrick Tam) de l'accepter. Son esprit vacille en quelque sorte mais elle a finalement surpassé l'épreuve. Le film prouve subtilement que son épée brille soudainement pour impliquer que son apprentissange effectue un saut vers le deuxième niveau, la puissance de l'Univers. Le pouvoir de l'Univers signifie pour Tsui Hark l'existence de différentes formes de pouvoir élémentaire. (par exemple les nuages d'arc-en-ciel, le tonnerre, le clair de lune, le feu, etc..) dans l'univers. Le chemin vers l'éternité revient pour un immortel à s'équiper avec un pouvoir de l'Univers spécifique (habituellement représenté sous forme d'une arme / épée). Pour Dawn et Sky King, leurs armes ou puissance de l'Univers sont la lune et le soleil Orbs; pour Enigma (interprétée également par Cecilia Cheung, représentant Dawn réincarnée après sa mort il y a 200 ans) et Hollow, leurs armes sont les épées de Sky Strike et Thunder Strike c.-à-d., les armes ultimes montrées dansZu. Une combinaison de la Puissance de l'Esprit et de la Puissance de l'Univers représente un saut de capacité pour un Immortel. L'étape la plus difficile est d'atteindre le niveau de la Puissance de la Régénération. Ceci est montré (à mon avis, de façon très ambigüe) dans le film par la mort de Body et Spirit et de leur Régénération finale à la vie. Sky King caractérise cette transformation en élevant sa capacité pour incorporer une arme supplémentaire (Puissance de l'Univers), l'épée Ming Fire, pour lutter contre Insomnia, le Mal Absolu.
Quels sont les obstacles sur le chemin de l'Immortalité? La croyance, affection amoureuse et le désir. Tsui Hark décrit très clairement comment les personnages doivent faire face à ces difficultés. Les exemples de Zhang Zi-Yi et même de son maître, Thunder, nous ont montré comment une faiblesse dans la croyance est nuisible à l'Immortalité. Tsui et Lee Man Choi (Co-scénariste) se servent astucieusement d'un monologue classique, appuru dans A Chinese Odyssey 2 avec Stephen Chow, pour transmettre ce message. Zhang Zi-Yi récite ce monologue: "Il y a une Puissance de Justice dans le monde. Je l'ai rencontré par le passé une fois, malheureusement je le l'ai pas estimé à sa juste valeur. Si je pouvais, j'aimerais redécouvrir cette puissance." Ses regrets payent finalement quand son épée se transforme en or, impliquant son emprise sur la Puissance de l'Univers. Dans A Chinese Odyssey 2, Stephen Chow dit "J'avais trouvé mon plus bel amour, mais je ne l'ai pas estimé à sa juste valeur. Je me suis senti plein de regrets ensuite. C'est la douleur ultime dans ce monde."
L'affection amoureuse est un problème complexe évoquée dans La Légende de Zu. En refusant les conventions, Tsui Hark dépeint les rapports de maître-disciple chez les Immortels de manière très intéressante. Dawn et Sky King possèdent un rapport de Maître-Elève même s'ils sont amoureux. L'affection amoureuse les attirent tellement intimement l'un vers l'autre que cela affecte la recherche d'immortalité de Dawn, qui se blâme d'échouer à accroître la Puissance de l'Esprit en cédant à l'affection amoureuse. Tour à tour, l'affection amoureuse fait également fait également payer très cher à Hollow la tentative de fusion des épées de Sky Strike et Thunder Strike (représentant les deux puissances de l'univers, le Yin et le Yang). L'affection amoureuse peut clairement être détectée dans le rapport maître-élève entre Thunder et Zhang Zi-Yi (il est intéressant de noter que Zhang ne révèle jamais son nom dans le film). Tsui Hark démontre très implicitement que l'affection amoureuse entre les deux gaspille presque leur parcours vers l'Immortalité. En fin de compte, à moins que l'émotion amoureuse puisse être neutralisée, la chemin vers l'Eternité et l'Immortalité est impossible.
La puissance nuisible du Désir est montrée dans le rapport entre le Red (Louis Koo) et Amnesia (Kelly Lin). Le désir fétichiste de Red le mène à succomber au contrôle de l'esprit d'Amnesia et au grand désastre arrivant à la fin.
Les trois exemples ci-dessus révèlent convenablement la subtilité de Tsui Hark pour dépeindre une image plus que complexe des Immortels dans La Légende de Zu. Nous avons le rapport affectif amoureux entre les Immortels (Dawn et Sky King), l'immortel et l'humain (Thunder et Zhang) et l'immortel et un démon (Red et Amnesia). Il n'était pas possible de trouver une représentation si complexe des sentiments émotifs d'amour parmi les Immortels, les forces du mal et les humains dansZu.
Finalement, La Légende de Zu souffre d'un déséquilibre entre les personnages et les effets spéciaux. C'est une chose de féliciter Tsui Hark pour sa tentative de réinventer le genre des films d'heroic fantasy chinoise et de remplir les trois quarts du film avec des effets spéciaux. Mais le public abandonne à nouveau clairement Tsui Hark à cause de son autorité et son indiscrétion. La morosité apparaît encore plus grande quand on se rappelle du sens de l'humour de Tsui dans Zu ou même dans Time and Tide. La Légende de Zu n'est pas drôle et Tsui Hark souligne clairement que, même pour les Immortels, la route vers l'Eternité et l'Immortalité est pleine d'embuches.
Il est malheureux que Tsui Hark et La Légende de Zu soient liés pour recevoir un accueil controversé à nouveau, à la différence de l'éloge proche de majorité pour Shaolin Soccer. Mais une attention plus particulière à l'audace de Tsui Hark me convainc de la valeur de La Légende de Zu.