2002 est l'année de la rechute commerciale à Hong-Kong, où la crise économique persistante n'a pas favorisé le timide retournement de situation de l'industrie du cinéma. Après une légère augmentation des bénéfices depuis 1999, c'est la rechute. Peu de films, peu d'entrées, quantitativement 2002 est une petite année. Mais qu'en est-il de la qualité ? Même s'il ne s'agit aucunement d'une année faste, on dénote tout de même quelques points intéressants qui laissent espérer une année 2003 un peu plus joyeuse.
Outre ces quelques exemples notoires, les résultats du box-office viennent confirmer ce nouvel état d'esprit: les comédies "concon" à gros casting comme Irresistible Piggies ou Women From Mars ne font plus recettes. Les comédies qui ont su trouver leur public avaient soit un humour typique, mais doublé d'un vrai scénario (Golden Chicken, Chinese Odyssey 2002), soit un humour moins lourd et un scénario un peu plus écrit (les Miriam Yeung par exemple). Bref, le concept "système D + casting étoffé" disparaît progressivement au profit d'un nouveau concept "Scénario plus écrit + qualités techniques".
Ceux qui ont lu le premier article de notre série consacrée à l'année 2002 (Girls With Guts) savent déjà que l'année 2002 a été une année féminine, et tout logiquement les stars du moment appartiennent au sexe "faible". Sammi Cheng conserve sa place de reine du box-office, Miriam Yeung s'impose
Concernant les "anciennes", on est content de revoir Carol Cheng (qui officie surtout à la TV maintenant) dans un rôle très convainquant pour Frugal Game, et surtout Sandra Ng, phénoménale dans Golden Chicken. On suivra les jeunes Karena Lam (2 HK awards l'année dernière, une nomination cette année), Eugenia Yuan (un award + une nomination cette année) et Angelica Lee (meilleure actrice 2002 pour The Eye) évidemment. Du côté masculin, Andy Lau et Tony Leung prouvent qu'ils restent de solides valeurs que ce soit en qualité de jeu ou en rentabilité (Chinese Odyssey 2002, Fat Choi Spirit, Hero et surtout Infernal Affairs), Louis Koo s'impose doucement comme une des valeurs sûres des "vieux jeunes acteurs", et on suivra le jeune Chatman To avec attention.
Si au final cette année 2002 n'est pas si mauvaise que ça, il lui manquera toujours deux ou trois films définitifs, probablement à cause de l'absence des ténors. En effet, pas de Tsui Hark (dont les échecs commerciaux ont sérieusement entamé la crédibilité au niveau financier et qui va jouer gros sur sa série TV dont nous allons vous reparler longuement), pas de Stephen Chow (trop occupé à promouvoir son Shaolin Soccer toujours pas sorti aux USA...), des Jackie Chan et Jet Lee américains pas très intéressants, des Johnnie To commerciaux, pas de Ringo Lam... Reste la bonne tenue de Ann Hui avec son superbe July Rhapsody (mais qui ne rapporte pas grand chose au box office), le sympathique Hollywood Hong Kong de Fruit Chan (mais qui ne vaudra jamais son Made in Hong-Kong), ou encore le retour au premier plan de Ching Siu-Tung avec le débilo-jouissif Naked Weapon et le très clinquant Hero. Bref, pas d'oeuvre culte à se mettre sous la dent comme les Legend of Zu ou Shaolin Soccer de l'année précédente.
Au final, 2002 reste une année de crise, aussi bien financière qu'artistique, mais il reste de quoi boire et manger, même si les genres "rois" ou "âge d'or" sont absents (peu de films d'arts martiaux, plus de films bricolés avec peu de moyens et des idées). On assiste maintenant à une élévation des standards techniques (voir le très chiadé Infernal Affairs, même si manquant de développement), ainsi qu'à une ouverture vers le marché chinois (présence plus marquée d'acteurs chinois comme Chang Chen ou Vicky Zhao dans les films Hong-Kongais, coproduction comme Hero). Les coproductions HK/Chine seront d'ailleurs sûrement l'un des faits marquants de l'année 2003. La production 2002 est moins délirante que par le passé, et attirera plus sûrement les personnes qui s'intéressent à l'histoire et à la culture de Hong-Kong qu'aux Hong-Kongistes de la première heure. La partie qui intéressait ces derniers a disparu pour être remplacée par quelque chose d'hélas plus académique. Mais d'un autre côté le cinéma de Hong-Kong 2002 est un témoin de l'évolution d'une société en crise, et à ce titre se montre culturellement très intéressant, aussi bien grâce à ses réussites que ses ratages. Simplement il y a plus de personnes intéressées par le cinéma de Hong-Kong vieille génération que par Hong-Kong en elle-même. Il y aura donc plus de déçus que de réjouis.
Just One Look: bien plus qu'une comédie, un vibrant hommage au cinéma de Hong-Kong et aux années 60, plein de qualités diverses et variées. Incontournable.
Chinese Odyssey 2002: l'humour non-sensique des années 90, la technique des années 2000, la touche de sérieux des années crise, le casting mi HK-mi Chine, tout le nouveau cinéma de Hong-Kong résumé dans un seul film. A ne pas manquer
Frugal Game: La Crise version HK, avec un casting très bien employé et un bon scénario. A voir.
Golden Chicken: aisément un des meilleurs UFO/Applause, vibrant hymne à Hong-Kong, porté par une Sandra Ng au sommet de son art. Immanquable.
A considérer:
Fat Choi Spirit: le savoir faire de Johnnie To avec un casting
rempli de bonne humeur.
Dry Wood Fierce Fire: un Wilson Yip plutôt réussi
Love Undercover: l'équipe de Joe Ma signe une comédie fort réussie
My Wife is 18: Ekin devient amusant sous la caméra du scénariste
des meilleurs UFO
No Problem 2: cette coproduction avec le Japon permet de revoir
Yuen Biao et assume de la comédie bien lourde.
The Lion Roar: Chinese Odyssey 2002, en moins bien
On évite:
Women From Mars: malgré un gros casting, le scénario
à la philosophie puéril manque cruellement d'écriture.
Going Home: un moyen métrage techniquement impressionnant, très bien interprété et au scénario bouleversant. Marquant.
Demi Haunted: plus Hong-Kongais que Hong-Kongais, drôle, tragique, outrancier, nostalgique, réaliste, un film bancal mais passionnant
The Eye: scénario convenu mais réalisation soignée et Angelica Lee. A voir
On évite:
Sleeping With the Dead: le twist est dans le titre pour cet ersatz
raté de Sixième Sens
Hero: même coupé de 20 minutes et politiquement correct, le film évènement délivre les délires de Ching Siu-Tung en grand large. Le plaisir des yeux. A voir.
Naked Weapon: Scénario de Wong Jing bête à manger du foin, mais jolies pépés sur des choré de Ching Siu-Tung. Pas génial, mais Hong-Kongais dans l'âme. A voir.
So Close: début moyen, mais scénario pas si vide et final de feu.
Corey Yuen sait encore y faire. A voir.
July Rhapsody: une réussite majeure pour Ann Hui, avec pour thème l'adolescence et le passage des 40 ans. Superbe à tous les niveaux.
Hollywood Hong Kong: un Fruit Chan mineur, mais bien en phase avec l'évolution de la culture locale, et à l'humour noir étonnant.
My Left Eye Sees Ghost: lent à démarrer, un mélo à regarder en sens inverse.
Infernal Affairs: grosse interpréation et scénario plus intéressant que la moyenne (même si un peu court) pour le plus gros succès de l'année.
Top 10 | Flop 3: |
-July Rhapsody -Golden Chicken -Just one Look -Hero -Hollywood Hong Kong -Chinese Odyssey 2002 -Demi Haunted -Frugal Game -Naked Weapon -Love Undercover |
-Psychedelic Cop -Partners -Women From Mars |
Cette sélection est bien sûr personnelle, et il manque peut-être certains films, comme Mummy Aged 19, Shark Busters, Princess-D ou Runaway Pistol entre autre. La sélection sera donc peut-être remaniée.